Nicolas Sarkozy n’aura donc tenu qu’un seul mandat présidentiel. C’est François Hollande qui remporte cette course à la présidence de la République, au terme d’une campagne que beaucoup ont trouvé pénible. Voici quelques réflexions personnelles pour se caler les idées.
Nicolas Sarkozy, un mauvais communicant?
J’ai le sentiment que Nicolas Sarkozy paie avant tout ses erreurs de communication. Souvenez-vous l’enthousiasme qui l’avait porté à l’Elysée il y a 5 ans. Une large victoire sur la candidate du PS. Et le sentiment qu’après quelques années d’immobilisme chiraquien, on allait enfin lancer les grandes réformes dont la France avait besoin… avant la crise. Las, les premiers gestes du président élu furent pour sa compagne (Le Fouquet’s, le yacht de Bolloré) ou lui-même (une augmentation de salaire mirobolante de 140%). Etait-ce vraiment ce qu’attendaient ses électeurs? N’y avait-il rien d’autre à leur montrer que cette relation décomplexée à l’argent?
Puis vint la crise. Notre pays a relativement bien tenu, malgré quelques frayeurs, notamment sur la solidité de son système bancaire. De nombreuses réformes furent lancées, notamment celle sur les retraites, ou sur les grèves dans les transports en commun. Mais de nombreuses autres furent bâclées, ou abandonnées en route. Pire, la succession d’affaires (Bettencourt, Woerth, Karachi) venues ternir la fin du mandat ont complètement brouillé l’image de ce quinquennat, pour ne plus donner que l’impression d’un président brouillon, nerveux, hâtif, comme pressé d’en finir dès qu’il se lançait dans un projet.
La campagne fut à l’image de son mandat. On a d’abord attendu longtemps avant qu’il ne s’annonce officiellement candidat, laissant planer le doute d’une forme d’abus de sa fonction de président. Donné perdant par les sondages depuis de nombreux mois, attaqué par une presse qui ne lui a rien lâché, il a p ainement cherché à rabaisser son adversaire plutôt que de mettre en avant le bilan de son mandat. Et face à la hausse du Front National, il s’est perdu dans une course à l’électorat de Marine Le Pen, axant sa campagne d’entre-deux tours sur des sujets subalternes comme le vote des immigrés, et cherchant a faire peur plus qu’à séduire. L’annonce du vote de François Bayrou vendredi dernier fut le coup de grâce, qui confirmait l’erreur de l’école Buissonnière, comme le qualifie le Canard Enchaîné (du nom de Patrick Buisson, conseiller du président sortant, ancien militant et journalisme d’extrême-droite).
François Hollande, la force tranquille?
Personne n’aurait certainement donné François Hollande président si on avait posé la question il y a 5 ans, il y a 3 ans, il y a même 1 an. Car depuis l’échec de Ségolène Royal, la gauche n’attendait qu’un candidat: DSK. Il devait être le sauveur, avant de sombrer, corps et biens, dans l’affaire du Sofitel de New-York, il y a un an moins une semaine. DSK sorti, tout devenait possible au sein du PS, qui, habilement, s’est lancé dans une primaire qui faisait office de tour de chauffe de la présidentielle: cela leur a permis d’occuper le terrain pendant tout l’automne 2011, au détriment de la droite et du gouvernement, qui semblait regarder avec amusement cette joute interne. Quelle erreur stratégique! Un temps de parole béni, quasi illimité à 6 mois des élections! De quoi instaurer le candidat socialiste dans l’esprit des électeurs, et montrer qu’une alternative existait.
François Hollande, qu’on qualifiait de « mou », n’ayant jamais participé à aucun gouvernement socialiste, s’en tira avec une remarquable aisance. Dès lors, il n’avait plus qu’à surfer sur la vague de mécontentement issue de ces trois années de crises. Face à des verts d’une faiblesse paradoxale – il faudra un jour analyser comment un mouvement qui compte quelques un des personnages les plus appréciés des français comme Nicolas Hulot a pu laisser Eva Joly aller au casse-pipe, à un Mélenchon bagarreur mais sans réel danger, il ne restait plus à Hollande qu’à espérer que les mécontents du premier tour (près de 30%) se rallieraient à lui, plutôt que de s’abstenir.
Et maintenant?
La gauche détient désormais presque tous les pouvoirs en France: la présidence de la république, celle du Sénat, la plupart des conseils généraux, et peut-être l’assemblée nationale, si les français poursuivent leur vote de rejet du président sortant et de sa famille politique. Le front de gauche a beau avoir fait un joli score, il y a peu de chances qu’il récolte de nombreux sièges. Les verts, malgré leur score étriqué, ont encore quelques chances.
Le véritable sujet de préoccupation, c’est le nombre de triangulaire, où l’UMP et le Front National devront s’entendre s’ils veulent faire barrage au PS. On a entendu le président sortant dire qu’il n’y aura aucun marchandage, je veux bien ne pas le croire. Souvenons-nous de 1995, des Charles Millon et autres élus prêts à tout pour garder leur siège…
Une fois la période d’euphorie passée (disons jusqu’à fin août), il faudra bien se mettre au travail, au « vrai travail » comme disait l’autre. Notre pays n’est pas sorti de crise. Son endettement s’est accentué. Faut-il augmenter l’impôt au risque de faire chuter dangereusement la consommation et notre marché intérieur, ou au contraire aider les français à consommer, pour relancer la croissance? Freiner, ou accélérer? Je n’aimerais pas être à la place du prochain ministre des finances…