L'opéra est affaire sérieuse, tellement qu'il faut protéger les cordes vocales des petites filles que l'on destine à cette discipline, les cordes vocales plus précieuses que le sexe. Elina Marsch naît dans ce monde-là. Sa naissance occupe les deux premières pages du roman de Régine Detambel. Pages magnifiques donnant le ton de tout le livre, fait d'ombres et de lumières, de scènes de théâtre et d'obscurs recoins. Parce que les livrets d'opéra renferment « d'exquises recettes de cruauté », cette biographie romanesque en est pleine. Insidieusement la cruauté va s'introduire en vous et ne plus vous lâcher tandis que vous serez séduits par le chant des Sirènes dont pourtant, souvenez-vous, Ulysse s'est sauvegardé en se faisant attacher au mât de son bateau. L'écriture de Régine Detambel vous révèlera les secrets de la voix humaine et vous fera goûter au plaisir du bâillement, « une jouissance, un bref et monumental bien-être, une satisfaction invraisemblable. »