François Hollande a gagné. Flanby pour ses amis, Amsterdam pour #radiolondres ou tulipe noire pour moi, le capitaine de pédalo avait sans doute un bateau plus léger que son adversaire. N'ayant jamais connu les affres du pouvoir, la terre de Hollande était vierge, plate comme un galet, pleine de beaux moulins brasseurs de vent.
Tandis que certains se réjouissent sur les places de France, croyant à des lendemains qui chantent (ils ont la mémoire courte), d'autres regardent déjà le prix des billets d'avion pour Genève, Bruxelles ou San Francisco. Je ne crois pas, pour ma part, qu'il faille exulter ni se morfondre. Nous avons connu la Corrèze de droite, nous aurons la Corrèze de gauche. Elle sera plus libertaire, plus étatiste, plus laïciste; elle taxera plus et modifiera les livres d'histoire; mais bon an mal an, l'anguille essaiera de rester dans la rivière.
Ce qui me vient ce soir, à la lumière de ces dernières semaines, est plutôt une analyse générale sur l'état de notre pays. Depuis la "fracture sociale" de 1995, la France semble avoir le plus grand mal à progresser positivement. Nous nous retrouvons en 2012 avec plein de petites et grosses fractures que le gouda rassembleur est loin d'avoir apaisées. Riches, pauvres, gaulois, immigrés, musulmans, laïcistes, catholiques, entrepreneurs ou fonctionnaires, ils sont nombreux à se sentir incompris, méprisés, oubliés. Chacun à ses raisons qui s'opposent à celles des autres et pourtant chacun a sa part de vérité, celle d'hommes et de femmes finalement perdus dans un pays qui ne portent plus suffisamment les valeurs qui l'ont construit. "Pour un peuple, la plus sûre étoile dans la tempête, c'est la fidélité à sa vocation" (Charles de Gaulle).
Au cours de ces semaines de campagne, nous avons entendu beaucoup de choses. Des bonnes et des mauvaises idées, des analyses naïves et pertinentes, des fausses promesses et des vraies angoisses. Mais aucun des candidats n'a véritablement réussi à ancrer son programme dans une vision à long terme de la France et du monde.
Sur les réseaux sociaux, les chrétiens se sont pourtant mobilisés pour faire entendre leur voix. A droite et à gauche, ils ont essayé à leur manière de rappeler des valeurs qui devraient être les fondaments de n'importe quelle politique: respect de la vie, dignité de la personne humaine, rôle premier de la famille, liberté de l'education, recherche du bien commun, attention aux plus faibles. J'ai considéré sur ce blog que Nicolas Sarkozy avaient porté à ces justes revendications une attention plus forte, affirmant avec courage ses convictions concernant la famille, le mariage, la fin de vie ou encore l'école. La famille est pour moi l'enjeu majeur, le seul socle sur lequel peut se construire sereinement une société charitable.
Mais voilà, François Hollande est aujourd'hui Président de la République.
Que faire?
Lorsqu'un parti ou un candidat perd une élection, il perd aussi des amis. Chacun y va de sa critique sur la stratégie qui a été prise et qui fut un échec. Mai 2012 ne fera pas exception à la règle et les tireurs d'élite ont d'ailleurs déjà joué de la gachette. A 20h01, le secrétaire national de l'UMP chargé de la presse et des médias, David-Xavier Weiss, a déjà réclamé un recentrage de l'UMP et une ouverture sur les sujets de société comme le mariage gay, le droit de vote des étrangers aux élections locales ou encore l'euthanasie... Il y aura sans doute dans les heures qui suivent des prises de position inverses, des volontés de scission, de rassemblement, d'éclatement. Il y aura même peut-être un secrétaire national sorti de derrière les fagots qui demandera le recrutement de 300.000 professeurs de maternelle ou le développement d'un nouveau programme spatial.
Il me semble que nous, lecteurs ou amis de BeniNews, devons tout simplement poursuivre sur notre lancée. Lire encore plus la Doctrine Sociale de l'Eglise, ancrer un peu plus notre réflexion politique sur la vocation de l'homme, de la France et du monde, retrouver toujours plus les valeurs qui soudent un peuple, le plongent dans ses racines et lui donnent des ailes.
Nos valeurs sont nombreuses, vous les connaissez. La recherche permanente du Bien Commun tant dans notre vie que dans nos entreprises et nos actions politiques et sociales; la subsidiarité qui nous rappelle que le plus petit doit être au coeur de la décision et que ceux qui ont ce que l'on nomme le "pouvoir", les chefs, les dirigeants, les institutions sont des aides, des recours, des serviteurs; le combat quotidien pour la liberté qui nous impose de faire confiance aux hommes et aux femmes de notre pays, de nos entreprises, de notre économie, de nos vies; la préservation de la famille; l'exigence d'une véritable charité libre et personnelle qui fait la distinction entre plaisir et amour; l'écologie humaine qui est un respect de la vie créée; le souci de la paix qui doit orienter notre diplomatie; l'accueil des plus faibles; le souvenir épanoui de notre histoire; et bien d'autres.
Nos valeurs ont du mal à émerger sur la place publique, leur absence dans le débat télévisé en fut la triste démonstration. Nos valeurs ne sont pas toujours défendues à gauche évidemment mais également à droite. Pourtant nos valeurs sont celles de tous, car elles remettent la personne humaine au centre du jeu, dans toute sa complexité, sa dignité, son intelligence.
Alors que faire? Poursuivre la mobilisation commencée pour que les législatives de juin 2012, les municipales de 2014 et tous les grands et petits moments qui construisent notre société s'impreignent toujours plus de ces convictions. Qu'elles s'impreignent au fond de nous pour que nous soyons capables de les transmettre avec joie; qu'elles s'impreignent au fond de nous pour que nous évitions les mauvaises tentations; qu'elles s'impreignent au fond de nous pour qu'elles deviennent incontournables.
Votre mission, si vous l'acceptez, sera de ne jamais baisser les bras mais bien au contraire de les lever un cran plus haut dès demain et pour les jours, semaines, mois et années qui viennent.
Comme l'a si bien dit Jacques Parizeau dans un discours d'anthologie le soir de la défaite du référendum pour l'indépendance du Québec en 1995 : "on s'est bien battu, et nous, on a quand même réussi à indiquer clairement ce qu'on voulait. Puis on a raté par une petite marge, quelques dizaines de milliers de voix. Bon ben dans un cas comme ça qu'est-ce qu'on fait ? On se crache dans les mains et on recommence."