Roman - Editions Gallimard - 219 pages - 16.90 €
Parution en septembre 2011. Rrentrée littéraire
L'histoire : Fadila fait le ménage quelques heures par semaine chez Edith, dans le Paris huppé. Edith réalise que Fadila ne se sait ni lire ni écrire et entrevoit à quel point le quotidien de Fadila est compliqué dans ces conditions. Comment prendre le métro quand on ne lit pas le nom des stations, comment connaître le prix d'un aliment au marché, et comment remplir les papiers administratifs.... Alors Edith entreprend d'apprendre la lecture et l'écriture à la vieille marocaine. Elle s'arme de courage et de patience mais n'imagine pas un instant l'ampleur de la tâche qui l'attend. Et entre les deux femmes, c'est une toute autre relation qui va naitre, un relation où chacun rencontre l'autre et apprend à la connaitre, voire à la comprendre jusque dans un système de pensée on ne peut plus opposé.
Tentation : la blogo
Fournisseur : La bib
Mon humble avis : A force de lire, on en oublie que l'on sait lire. Et que ce n'est pas le cas pour tout le monde. Nous avons la chance de pouvoir lire pour le plaisir, quand d'autres n'ont pas ce don qui permet la liberté, l'indépendance et une vie quotidienne qui ne s'arrête pas au premier panneau routier incompréhensible. Le personnage du livre, Fadila, ne peut prendre le métro : elle ne sait lire ni les directions, ni le nom des stations. "Avec le bus, c'est mieux, j'reconnais mieux les chiffres"
Les amandes amères m'ont passionnée, captivée, touchée et interrogée sur par mal de choses.
Edith entreprend d'apprendre la lecture et l'écriture à Fadila, sa femme de ménage marocaine de 65 ans, dont le français est déjà parfois à peine compréhensible. Les démarches entreprises par Edith sont extrémement bien décrites et expliquées et son investissement force le respect. Elle recherche la bonne méthode, se renseigne, tente de trouver des cours d'alphabétisation. Finalement, c'est chez elle et entre elles deux que l'apprentissage se fera. Il sera long, laborieux, et même décourageant. Le résultat au bout de 18 mois est hallucinant. Et pourtant, Edith ne se décourage pas, ne perd pas patience. Car Edith découvre surtout Fadila et son histoire. Mariée de force à 14 ans au Maroc, battue, puis vendue à un autre mari etc... Et une vie en France dans une chambre de 4m² où tout est si étroit que Fadila a des crises d'angoisse. Edith apprend aussi les us et coutumes des relations familiales dans les familles maghrébines. Car Fadila n'est pas seule, elle a 3 enfants en France avec elle. Et pourtant, elle souffre d'une solitude effroyable. Fadila en vient même à surprendre Edith par des propos butés, extrémiste, intolérants qui la poseraient plus dans les rangs de la droite très à droite quand dans les rangs de gauche. Et pourtant, beaucoup de clairvoyance aussi de la part de Fadila sur "l'eden" que représente la France pour les prétendants à l'immigration. Les Amandes amères offrent donc un oeil et la parole à une de ces femmes émigrées, un regard sans complaisance mais très surprenant. La relation entre les deux femmes est donc très intéressante, même si je ne la qualifierais pas d'amicale comme le fait la 4ème de couv. Elle est faite de respect, d'attachement, de curiosité, d'apport mutuel.
Mais revenons en au sujet principal du livre : l'apprentissage de la lecture et de l'écriture. Fadila est très peu réceptive car elle n'a jamais été à l'école de sa vie, donc ne s'est jamais trouvée en situation de répétition, d'apprentissage, de récitation, de recopier. Alors d'une semaine sur l'autre, Fadila oublie ce qu'elle a appris. Elle ne reconnait pas les lettres. Ecrire son prénom lui prend des semaines. Alors oui, dans le livres les situations se répètent beaucoup. Certains pourraient y voir des longueurs. Et bien non, ces répétitions sont juste du réalisme nécessaire, pour faire comprendre au lecteur le temps, les semaines, les mois nécessaires pour apprendre quelques mots à quelqu'un.
Je suis sortie de ce livre bien sûr bouleversée et bien remuée mais surtout, admirative pour 4 personnes.... L'auteur pour son talent.... Edith pour sa patience.... Fadila pour son courage tout au long de sa vie difficile.... Et pour mon petit cerveau qui, il y a longtemps, a réussi a apprendre à lire et à écrire et qui me permet de partager tout cela avec vous !