Plus de 10% de la population française est composée d’Arabes et de Noirs, Français par différents chemins historiques : la colonisation, les traites ou l’immigration postcoloniale. Une petite majorité d’entre eux vit dans des quartiers délabrés et souvent enclavés, des ghettos où l’échec scolaire le dispute à la précarité et à la petite délinquance. Ces Français ne sont pas arrivés hier, et aucun d’eux n’a vocation à partir demain, malgré ce qu’espère le cinquième des électeurs qui a voté Marine Le Pen. Ceux qui votent FN malgré le puissant tabou imposé par l’antiracisme du siècle dernier ne sont cependant que la partie émergée de l’iceberg. Ils révèlent une faille identitaire profonde, qui divise les Français bien au-delà de l’électorat du parti d’extrême droite. C’est pourquoi il faut s’inquiéter, et réagir. Depuis plus de trente ans, la majorité des Français semble en effet refuser l’évidence de l’évolution « raciale » de la population de la nation (le mot « race » est dans ce texte utilisé dans le sens de groupes qui sont des constructions sociales et auxquels on appartient ou non du seul fait de sa naissance et de son apparence physique. Il ne s’agit évidement pas ici de défendre l’idée que les races existeraient). Ces Français s’opposent en fait à la réforme radicale de l’idée de nation que cette situation rend pourtant indispensable et inévitable. Cependant, des territoires ruraux ou périurbains, des petites villes, sont restés à l’écart de l’évolution de la population, car la ségrégation est forte. Ceci laisse croire que la composition de la population pourrait changer brutalement, ajoutant la crainte de la délinquance, favorisée par la ségrégation, à la peur de ne plus se sentir « chez soi ». C’est ainsi que la ségrégation, qui en France n’a pas été le résultat d’une politique déterminée, mais fut encouragée par les politiques du logement et d’urbanisme, a pour conséquence une question raciale qui traverse la nation. Une partie des Français sont « racisés », c’est-à-dire que l’ensemble de leurs interactions avec autrui est influencé par l’identité étrangère qui leur « colle à la peau ». Cela mine en profondeur leur confiance dans le système politique et assoit un vote Front national toujours plus important. A l’issue de la campagne de premier tour, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Eva Joly ont donc raison sur un point : l’opposition structurante après l’élection séparera l’extrême droite et la gauche… à condition que celle-ci en prenne conscience.
France : pour dépasser la question raciale, il faut s'y attaquer.
Publié le 30 avril 2012 par Ananda
Tribune de Jérémie Robine publiée sur rue89 le 28 avril :
http://printemps2012.fr/index.php/tribunes-a-debat/item/140-pour-d%C3%A9passer-la-question-raciale-il-faut-s%E2%80%99y-attaquer
Plus de 10% de la population française est composée d’Arabes et de Noirs, Français par différents chemins historiques : la colonisation, les traites ou l’immigration postcoloniale. Une petite majorité d’entre eux vit dans des quartiers délabrés et souvent enclavés, des ghettos où l’échec scolaire le dispute à la précarité et à la petite délinquance. Ces Français ne sont pas arrivés hier, et aucun d’eux n’a vocation à partir demain, malgré ce qu’espère le cinquième des électeurs qui a voté Marine Le Pen. Ceux qui votent FN malgré le puissant tabou imposé par l’antiracisme du siècle dernier ne sont cependant que la partie émergée de l’iceberg. Ils révèlent une faille identitaire profonde, qui divise les Français bien au-delà de l’électorat du parti d’extrême droite. C’est pourquoi il faut s’inquiéter, et réagir. Depuis plus de trente ans, la majorité des Français semble en effet refuser l’évidence de l’évolution « raciale » de la population de la nation (le mot « race » est dans ce texte utilisé dans le sens de groupes qui sont des constructions sociales et auxquels on appartient ou non du seul fait de sa naissance et de son apparence physique. Il ne s’agit évidement pas ici de défendre l’idée que les races existeraient). Ces Français s’opposent en fait à la réforme radicale de l’idée de nation que cette situation rend pourtant indispensable et inévitable. Cependant, des territoires ruraux ou périurbains, des petites villes, sont restés à l’écart de l’évolution de la population, car la ségrégation est forte. Ceci laisse croire que la composition de la population pourrait changer brutalement, ajoutant la crainte de la délinquance, favorisée par la ségrégation, à la peur de ne plus se sentir « chez soi ». C’est ainsi que la ségrégation, qui en France n’a pas été le résultat d’une politique déterminée, mais fut encouragée par les politiques du logement et d’urbanisme, a pour conséquence une question raciale qui traverse la nation. Une partie des Français sont « racisés », c’est-à-dire que l’ensemble de leurs interactions avec autrui est influencé par l’identité étrangère qui leur « colle à la peau ». Cela mine en profondeur leur confiance dans le système politique et assoit un vote Front national toujours plus important. A l’issue de la campagne de premier tour, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Eva Joly ont donc raison sur un point : l’opposition structurante après l’élection séparera l’extrême droite et la gauche… à condition que celle-ci en prenne conscience.
Plus de 10% de la population française est composée d’Arabes et de Noirs, Français par différents chemins historiques : la colonisation, les traites ou l’immigration postcoloniale. Une petite majorité d’entre eux vit dans des quartiers délabrés et souvent enclavés, des ghettos où l’échec scolaire le dispute à la précarité et à la petite délinquance. Ces Français ne sont pas arrivés hier, et aucun d’eux n’a vocation à partir demain, malgré ce qu’espère le cinquième des électeurs qui a voté Marine Le Pen. Ceux qui votent FN malgré le puissant tabou imposé par l’antiracisme du siècle dernier ne sont cependant que la partie émergée de l’iceberg. Ils révèlent une faille identitaire profonde, qui divise les Français bien au-delà de l’électorat du parti d’extrême droite. C’est pourquoi il faut s’inquiéter, et réagir. Depuis plus de trente ans, la majorité des Français semble en effet refuser l’évidence de l’évolution « raciale » de la population de la nation (le mot « race » est dans ce texte utilisé dans le sens de groupes qui sont des constructions sociales et auxquels on appartient ou non du seul fait de sa naissance et de son apparence physique. Il ne s’agit évidement pas ici de défendre l’idée que les races existeraient). Ces Français s’opposent en fait à la réforme radicale de l’idée de nation que cette situation rend pourtant indispensable et inévitable. Cependant, des territoires ruraux ou périurbains, des petites villes, sont restés à l’écart de l’évolution de la population, car la ségrégation est forte. Ceci laisse croire que la composition de la population pourrait changer brutalement, ajoutant la crainte de la délinquance, favorisée par la ségrégation, à la peur de ne plus se sentir « chez soi ». C’est ainsi que la ségrégation, qui en France n’a pas été le résultat d’une politique déterminée, mais fut encouragée par les politiques du logement et d’urbanisme, a pour conséquence une question raciale qui traverse la nation. Une partie des Français sont « racisés », c’est-à-dire que l’ensemble de leurs interactions avec autrui est influencé par l’identité étrangère qui leur « colle à la peau ». Cela mine en profondeur leur confiance dans le système politique et assoit un vote Front national toujours plus important. A l’issue de la campagne de premier tour, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Eva Joly ont donc raison sur un point : l’opposition structurante après l’élection séparera l’extrême droite et la gauche… à condition que celle-ci en prenne conscience.