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Présidentielles : si nous étions les barbares

Publié le 30 avril 2012 par Marine8888

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Le poème "Les barbares" de Constantin Cavafy, poète grec (1863-1933), me vient toujours à l'esprit lorsque j'entends le candidat président reprendre une fois de plus le théme récurrent et lourdement insistant de l'immigration, ajoutant à chaque discours des fioritures comme l'apologie des frontières pour ratisser largement les voix  de la droite et au-delà. 

Comment pouvons-nous accepter d'en être encore là ?

Les barbares sont ceux-là même qui veulent nous enfermer dans des frontières étriquées. 

Les barbares

Qu’attendons-nous rassemblés ainsi sur la place ?

Les barbares vont arriver aujourd’hui.

Pourquoi un tel marasme au sénat ?

Pourquoi les sénateurs restent-ils sans légiférer ?

C’est que les barbares arrivent aujourd’hui.

Quelles lois voteraient les sénateurs quand ils viendront ?

Les barbares feront la loi.

Pourquoi notre empereur levé dès l’aurore, siège-t-il sous un dais aux portes de la ville, solennel et la couronne en tête ?

C’est que les barbares arrivent aujourd’hui. L’empereur s’apprête à recevoir leur chef. Il a même fait préparer un parchemin qui lui octroie des appellations honorifiques et des titres.

Pourquoi nos deux consuls et nos prêteurs arborent-ils leur rouge toge brodée ?

Pourquoi se parent-ils de leurs bracelets d’améthystes et de  bagues étincelantes et d’émeraude ?

Pourquoi portent-ils leurs cannes précieuses et finement ciselées ?

C’est que les barbares arrivent aujourd’hui et ces coûteux objets éblouissent les barbares.

Pourquoi nos habiles rhéteurs ne pérorent-ils pas avec leur coutumière éloquence ?

C’est que les barbares arrivent aujourd’hui. Eux, ils n’apprécient ni les belles phrases ni les longs discours.

Et pourquoi, subitement cette inquiétude et ce trouble ?

Comme les visages sont devenus graves.

Pourquoi les rues et les places se désemplissent-elles si vite et pourquoi rentrent-ils tous chez eux d’un air sombre ?

C’est que la nuit est tombée et que les barbares n’arrivent pas. Et des gens sont venus des frontières et ils disent qu’il n’y a point de barbares.

Et maintenant que deviendrons-nous sans barbares ?

Ces gens-là c’était quand même une solution.


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