Le 12 mai, à Calce, les caves se rebifferont une nouvelle fois. Traversé par la D18, chère à Olivier Pithon, Calce, Roussillon, petit village perdu sur les hauteurs de la vallée de l'Agly, fera pour la 7ème année consécutive une opération caves ouvertes avec séance dédicalce par les vignerons du village. And guests. Six invités, triés sur le volet, venant de toute la France et répartis chez chaque vigneron-hôte. Pas chauvins, les Caleçons et les Calzones, si tant est que les gens du cru s'appellent comme ça. Pas encore complètement chauves non plus, même si certains arborent fièrement et majestueusement le bonnet pour se protéger de la tramontane et d'un décoiffage intempestif.
Le vignoble calc-ique est constitué d'une mosaïque de sols variés. Il n'y a guère que l'Alsace qui puisse se prévaloir d'être aussi géologiquement diversifiée. Le défi que Jean-Philippe Padié s'est fixé est que chaque type de sol soit représenté au sein de son domaine et, de ce fait, puisse se retrouver dans chacun de ses vins. Un genre de dé-calco-manie, quoi! Constitué au départ de micro-parcelles, la plus emblématique est sans aucun doute la première qu'il a acquise, ceinte d'un mur de pierres sèches et baptisée humblement Clos du Moucheron, en hommage au Clos des Mouches bourguignon, région où Jean-Phi a passé une grande partie de son enfance. Il faut bien avouer qu'il a de l'allure, ce moucheron, avec ses vieux carignans plantés en foule, désormais uniquement travaillés à la pioche, et ses pieds de lavande dans l'inter-rang. L'herbe dans les vignes, c'est quand même bien plus joli, à partir du moment où, évidemment, elle ne concurrence pas la plante. Certaines, comme le trèfle, ont même un effet bénéfique en libérant des substances azotées dans le sol, évitant un apport exogène. Une forme d'autorégulation bienfaitrice, en fait.
Plus de 14 hectares en tout pour le domaine Padié, parce qu'il est dur de ne pas reprendre telle parcelle de vieux grenache blanc, même si elle fait partie d'un lot plus important dont le vigneron ne sait pas bien que faire dans un premier temps. Mais, comme Jean-Phi est doté d'une grande perspicalcité, nul doute que, à terme, l'investissement ne sera pas vain (mais, finalement, quand même un peu vin, on espère). Sauver les vieilles, un leitmotiv qui reviendra tout au long de ce périple septimanien, en Languedoc comme en Roussillon, pour ne pas voir tout un patrimoine viticole disparaitre purement et simplement.
Au fil des différentes failles géologiques, les vallées, appelées "coumes", offrent des terroirs et des paysages variés, somptueux. On passe de l'une à l'autre avec émerveillement, traversant dans le même temps les vignes des autres prestigieux vignerons rebiffants (Gauby, Matassa, Pithon...). Au loin, majestueux, le Canigou met la patée à tous les sommets avoisinants. Même la tête dans les nuages, même par un temps petit sibérien, ce n'est pas une montagne pour les chiens!
Pour manger de la cuisine calc-ifiée, pas besoin de se faire prier, il faut aller au Presbytère. Bistrot de pays multi-services, on peut venir y boire un coup et se confesser au bar, en plus de s'y régaler de plats goûteux du marché, accompagnés des vins des vignerons calc-inés, vendus à prix propriété.
Ce jour-là, après une D18 2010 à l'apéritif, avec une planchette de charcuteries hispanisantes, puis une autre de fromages bio du coin, Calice 2011, Petit taureau 2010, Ciel liquide 2007, Fleur de cailloux 2010, et Milouise 2010 se sont succédés. Suivis de quelques extras jurassiens, qui ne sont pas parvenus à éclipser les blancs de l'Agly, même sur l'assiette de fromages.
Le seul Calice que l'on puisse boire jusqu'à la lie avec délectation...
Calce? Il n'y a pas plus bel endroit dans le Roussillon! Excepté Trilla, peut-être?
Olif
P.S.: bon, sérieusement, ils s'appellent comment, pour de vrai, les habitants de Calce?