Après Wolfsmund chez Ki-oon mercredi, continuons dans les bonnes découvertes du printemps avec un titre très différent, mais tout autant prenant : 7 Shakespeares d’Harold Sakuishi.
Tout comme le précise son éditeur Kazé Manga dans sa communication, ce manga est signé par l’auteur de Beck, même s’il s’inscrit dans un genre tout à fait différent de ce titre rock’n roll. 7 Shakespeares mélange récit historique librement adapté et destinées hors du commun, au beau milieu d’un puzzle assez intrigant qui tentera de répondre à une question historique : qui était William Shakespeare ?
Ce seinen est publié depuis 2010 dans le magazine Big Comic Spirit (Ikigami, Bonne nuit Punpun) de la Shôgakukan et il est sorti chez nous le 04 avril 2012. Toujours en cours de parution, il compte pour l’instant 6 volumes.
Passons maintenant aux choses sérieuses et entamons cette preview…
Bonne lecture
« Maudit soit celui qui viole mon ossuaire… »
An 1600, Londres.
Même s’il est populaire, certains considèrent que le théâtre n’est rien d’autre qu’un loisir vulgaire, alors que d’autres y voient un contre-pouvoir corrupteur. Et pourtant, lors d’une représentation le public va découvrir, estomaqué, que la Reine elle-même est venu assister à la même pièce du jour : Hamlet, écrit par un certain William Shakespeare.
Cet homme, pourtant sans éducation, a réussi à renouveler l’écriture théâtrale et sa renommée est de plus en plus croissante, chez le peuple comme dans les hautes sphères. Néanmoins, William Shakespeare n’est pas le seul à réclamer la paternité d’Hamlet… Au moment même où il s’oppose à l’arrestation de ses comédiens par les forces de l’ordre, un autre homme est en train de négocier la vente du manuscrit.
Et pour ce dernier une chose est sure : Shakespeare n’est pas l’auteur de cette pièce et le dramaturge est un imposteur !
William Shakespeare a-t-il existé ?
L’histoire nous dit que le plus célèbre poète, dramaturge et écrivain anglais est né le 23 avril 1564 à Stratford Upon-Avon. Mais de ça comme du reste, personne n’en est complètement sur. En fait, toute la vie et l’œuvre de William Shakespeare sont entourés de mystères.
Premièrement, plusieurs critiques postulent que le dramaturge n’a pas vraiment existé. Certes, la plupart des spécialistes sont aujourd’hui d’accord pour identifier Sir William Shakespeare comme l’auteur des pièces. Mais cela n’a pas toujours été le cas… Des écrivains comme Walt Whitman, Mark Twain, Henry James ou Sigmund Freud ont tous douté que le citoyen de Stratford nommé William Shaksper ou Shakspere ait réellement composé les œuvres qui lui sont attribuées.
Pourquoi tant d’interrogations me direz-vous ? En fait, beaucoup pensent que ce petit-fils de paysan n’a jamais eu le « niveau littéraire » pour écrire ce qu’il a écrit, faute d’éducation, et que ce sont des aristocrates comme Francis Bacon, Christopher Marlowe, John Florio, la reine Élisabeth Ire ou le roi Jacques Ier d’Angleterre qui se sont cachés derrière le pseudonyme de Shakespeare (à l’époque, les grands seigneurs pouvaient écrire et faire circuler leurs textes à la cour, mais n’avaient pas le droit de les publier). Dans son autobiographie Francis Bacon a même clamé avoir « réalisé des œuvres diverses, comédies, tragédies, qui ont connu une grande renommée sous le nom de Shakespeare ».Au-delà de ces conjectures, il est admis de manière quasi-unanime que Shakespeare n’inventait pas le thème de ses pièces et piochait le fonds traditionnel comme c’était la coutume à l’époque… Comme l’explique un spécialiste français de la question Shakespearienne, François Laroque, dans un entretien à l’Express : « à l’époque, il n’y avait pas de droits d’auteur. Toute sa vie, Shakespeare n’a fait que prendre des textes et les mettre en musique et en scène. Le dramaturge passe son temps à réécrire. À l’époque, ça ne choque personne. Par contre, aujourd’hui, c’est totalement interdit. Il faut l’autorisation de l’auteur, et il faut payer. Je pense que la notion de plagiat n’a pas du tout le même sens aujourd’hui et à l’époque. »
Le manga qui nous intéresse aujourd’hui, 7 Shakespeares suit en partie cette thèse et propose une multitude d’auteurs ou de co-auteurs, 7 si on en croit le titre. Mais à travers ce seinen, Harold Sakuichi tente également de résoudre un autre mystère : la disparition pendant 7 longues années de William Shakespeare… De 1585 où il quitte Stratford à son apparition à Londres en 1592.
On s’attend donc à suivre Sir William et sa vie pendant cette période… Et pourtant, surprise, le tome 1 ne nous parle – quasiment – pas de notre écrivain britannique. Mais ce premier opus n’est pas sans intérêt pour autant….
Un premier tome inattendu…
Le premier chapitre de 7 Shakespeares se situe bien à Londres où l’on découvre William Shakespeare, l’officiel, son œuvre Hamlet et les premières questions sur son écrivain d’origine.
Mais à peine ces bases sont-elles posées que nous partons quelques années en arrière pour nous focaliser sur l’histoire de Li, une jeune chinoise qui possède depuis sa plus tendre enfance le don de prophétie. Contre toute attente le mangaka nous plonge donc dans une destinée cruelle et prenante, celle d’une jeune fille vue comme une sorcière. Annonçant sans jamais se tromper le décès des gens qui l’entourent, elle et sa famille deviennent rapidement des pestiférés.Toutes les vérités ne sont pas donne à dire et celles que prophétise Li, parfois bonnes mais souvent mauvaises, ne font que susciter la peur des gens, effrayés comme toujours par ce qu’ils ne peuvent pas comprendre.
C’est donc sur une tragédie que commencent 7 Shakespeares, mais il faut avouer qu’ont s’attendait tout de même à tout autre chose. La vie de Li finit bien sur par croiser celle de Shakespeare, mais on aurait envisager d’autres personnages. Heureusement la surprise ne tourne pas à la déception et le très grand potentiel derrière le mystère historique nous donne envie d’aller plus loin. Comme tout puzzle qui se respecte, on ne peut pas prétendre connaître et jauger l’image d’ensemble avec aussi peu de pièces. Mais peut-être qu’une publication des 2 premiers tomes simultanément au lieu du seul tome 1 aurait pu régler le problème.
Du coté du graphisme, il est d’un excellent niveau et on se fait rapidement au chara-design un peu exagéré de l’auteur, avec des bouches souvent surdimensionnées. Elles peuvent paraître grotesque au premier abord mais elles apportent un plus indéniable dans l’expressivité des personnages. Ces « tronches » sont aussi un plus sur le plan comique, en donnant une tournure caricatural à nos protagonistes. On notera également que le héros de l’histoire, Sir William Shakespeare est très bien croqué avec un regard aussi bien intense qu’intelligent, qui le rend rapidement charismatique. Harold Sakuichi n’a pas 20 ans de métier pour rien.
7 Shakespeares commence sous des auspices plutôt favorables, grâce à la nature de son histoire, mystérieuse et intrigante, et le talent de son auteur Harold Sakuichi sur les plans du graphisme et la mise en scène. Mais ce seinen fera (ou ne fera pas) ses preuves sur le long terme, donc rendez-vous en juin pour la sortie du tome 2 et la suite des aventures de Sir William.
Titre : SHICHININ NO SHAKESPEARE – 7 Shakespeares
Auteurs : Harold Sakuishi
Date de parution : 04 avril 2012
Éditeurs fr/jp : Kazé Manga / Shôgakukan
Nombre de pages : 292 pages
Prix de vente : 9.99 €
Nombre de volumes : 1 et 6 au Japon (en cours)
SHICHININ NO SHAKESPEARE © 2010 Harold SAKUISHI / Shogakukan Inc.
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