L'homme blanc

Par Anne Onyme

Perrine Leblanc
Éditions Le Quartanier
173 pages

Résumé:

L’homme blanc, c’est Kolia, né dans les monts K. en Sibérie orientale, élevé dans les prisons de Staline. Là-bas, enfant encore illettré s’habituant à la faim et au froid, il fait la rencontre de Iossif, un prisonnier originaire d’Europe de l’Ouest qui le prend en charge et lui donnera le goût de l’art, du français, du monde libre. Relâché des camps à la fin de l’adolescence, Kolia découvrira l’URSS des années cinquante pour bientôt intégrer un cirque à Moscou et devenir clown. Mais le souvenir de Iossif, disparu dans des circonstances inconnues, le hante, l’accompagne, comme tout son passé qui marque sa drôle de gueule et que recouvrira la blancheur du clown muet.

Mon commentaire:

L'homme blanc. Ce simple titre est chargé de symboles. L'homme blanc c'est, entre autres, le nom qu'on donne à celui qui est muet dans le monde du spectacle: le mime, le Pierrot, le clown muet. Pour moi, aussi, l'homme blanc est celui qui vient du froid.

Kolia est un homme de peu de mots. Il est plutôt muet, dans la vie comme au cirque. Cependant, son histoire débute bien loin du chapiteau. Kolia passa seize ans au goulag. Il est d'ailleurs né au camp, d'une mère qui a subit le viol d'un plus haut placé. C'est presque par miracle qu'il a survécu et a pu rester avec sa mère les premières années de sa vie. Après la mort de sa mère, c'est Iossif, une sorte de maître, qui prendra en charge l'éducation de Kolia. On se demande pourquoi on octroie certains privilèges à cet homme, mais il semble avoir des amis bien placés.

Kolia apprendra donc à lire et à s'intéresser aux livres. Il survivra au camp grâce à une forte constitution, à sa facilité à se fondre dans le groupe et aux conseils avisés de Iossif. Quand il est enfin libéré, il est relâché dans un monde qu'il n'a jamais connu. Il doit faire l'apprentissage de tout ce qui compose le quotidien. Il doit apprendre à vivre en homme "libre".

Le roman est composé de quatre parties. La première parle de la naissance de Kolia, de la vie au camp et de sa libération. Cette partie est humainement terrible et la vie dure et ignoble des camps donne le frisson. La seconde parle du cirque et de l'engagement de Kolia dans une carrière de plusieurs années au sein de la troupe. Cette partie m'a moins intéressée. Je ne suis pas particulièrement attirée par le monde du cirque. La troisième partie parle de l'après-cirque, alors que Kolia décide de quitter la troupe. Il erre un peu, cherchant un sens à ce qu'il fait. La dernière partie raconte, quant à elle, la sortie de prison de Kolia et sa dernière quête. Ce qui relie les quatre parties entre elles c'est la recherche inlassable de Iossif, l'homme qui a marqué Kolia, et qui a mystérieusement disparu. Cette quête ponctue toute la vie de Kolia et tout le roman.

L'homme blanc fait à peine plus de 170 pages. Il retrace la vie entière de Kolia, de la naissance à la vieillesse. Kolia rencontrera toutes sortes de personnages qui ne donnent pas toujours un portrait flatteur de la nature humaine. L'auteur a le talent de raconter avec peu de mots, tout un univers. L'aspect russe m'a fortement intéressée. Je l'ai été beaucoup moins par tous les passages traitant du cirque et du monde du spectacle.

J'avais très hâte délire ce roman à cause de son sujet. Je trouvais également très intéressant qu'un premier roman s'attarde sur la réalité du goulag de la Russie, quand même loin de notre réalité à nous, québécois. Je suis contente de l'avoir lu. Cependant, ce roman m'a mise mal à l'aise par moments. Je dois aussi dire qu'il est très court. Peut-être un peu trop. Kolia m'a donné l'impression d'être un personnage rempli de paradoxes, à la vie totalement extraordinaire et parfois effrayante, mais j'ai surtout eu le sentiment de ne pas le connaître. J'ai eu l'impression de survoler son histoire et de refermer la dernière page en gardant peu de choses de ce que j'avais lu. Une sensation de manque. Comme si finalement, il avait été dit sur Kolia que si peu de choses... à l'image du personnage.

Ce livre a remporté plusieurs prix, dont le Prix du Gouverneur Général et le Grand Prix du livre de Montréal. Il a été édité en France il y a quelques mois sous le titre Kolia.