Publié le 26 avril 2012 par H€nri
La percée de Marine Le Pen et la droitisation de Nicolas Sarkozy ont suscité de vives réactions en Europe, lundi 23 avril. Sur fond de montée en puissance de l’extrême droite chez les Vingt-Sept, les responsables européens s’inquiètent de la force du Front national et de l’énergie déployée par le président sortant pour tenter de séduire cet électorat, afin de combler son retard sur M. Hollande.
« La rhétorique antieuropéenne et nationaliste de Sarkozy a amené de nombreux électeurs à soutenir Marine Le Pen », a déploré Hannes Swoboda, le chef de file des socialistes au Parlement européen. « Ses arguments anti-européens ont été extrêmement inquiétants. Les annonces sur la remise en question de Schengen et la réintroduction des contrôles aux frontières ont révélé ce qu’il pense vraiment », a expliqué le député européen autrichien.Fait rare, les résultats du premier tour ont été très commentés en marge d’une réunion des ministres des affaires étrangères à Luxembourg. Le Luxembourgeois Jean Asselborn ne s’est pas privé, lui non plus, d’accuser M. Sarkozy d’être en partie responsable du succès de la candidate du Front national. « Si on répète tous les jours qu’on doit changer Schengen, qu’on doit avoir une politique dure en matière d’immigration, qu’on doit parler de l’exception française pour les entreprises, tout cela, c’est de l’eau au moulin du FN », a estimé ce membre du gouvernement de Jean-Claude Juncker.Le ministre de l’intérieur français, Claude Guéant, est d’ailleurs attendu au tournant par ses homologues, jeudi, pour défendre son projet de réforme de l’espace Schengen, afin d’en renforcer le pilotage par les capitales. Faute de quoi, M. Sarkozy a menacé de quitter ce cadre dans les douze mois.
« Je suis inquiet de ce sentiment que nous constatons contre des sociétés et une Europe ouvertes. Cela me préoccupe, et pas seulement en France », a estimé le ministre suédois des affaires étrangères, Carl Bildt. Certains de ses homologues, dont le Belge Didier Reynders, proche de M. Sarkozy, ont parlé d’un phénomène « inquiétant ».
Jusqu’ici plutôt discrète à propos de la campagne française, la Commission européenne est sortie de sa réserve. Elle a appelé « les dirigeants politiques à faire attention à la menace populiste et à la propagation d’idées contraires aux idéaux de la construction européenne ». Au-delà du succès de Mme Le Pen, la droite extrême ou populiste est bien implantée en Autriche, en Finlande, en Suède, au Danemark, en Suisse ou encore en Hongrie. Elle connaît une forte progression en Belgique, dans la région flamande.
Quelle peut être la réponse politique à ces phénomènes ? L’exécutif européen ne porte-t-il pas une part de responsabilité dans la progression de partis au programme anti-européen et qui critiquent son libéralisme ? « La crise économique a exacerbé les inégalités sociales, ce qui crée un terreau pour le développement des populismes », a observé Olivier Bailly, l’un des porte-parole de José Manuel Barroso. « Notre réponse, a-t-il continué, est qu’il faut agir ensemble, au niveau européen, face à ce que le citoyen perçoit parfois comme un risque, la mondialisation ou l’immigration. Comme il convient de le faire face à la crise financière ».
Introduire plus d’Europe reste l’issue à privilégier, martèle Bruxelles. « Le repli, la recherche de solutions nationales dans un espace mondialisé ne peuvent être efficaces, juge-t-on au sein de la Commission. Notre devoir est de rappeler qu’agir à Vingt-Sept vaut mieux qu’agir seul ».
Pour M. Bailly, il est toutefois inexact de conclure que c’est l’austérité qui conduirait au développement de courants populistes. « Les Etats où ils sont les plus forts ne sont pas ceux qui souffrent le plus de l’austérité », a-t-il estimé. C’était une référence implicite à la Finlande, à l’Autriche, mais aussi à la France.