Au delà des résultats, il faut regarder le premier tour de la présidentielle la tête froide. Le score élevé de Marine le Pen a monopolisé l'attention, la majorité de la soirée électorale. Sur les différents plateaux de télévision, ou avec les interventions des auditeurs à la radio. Sur les réseaux sociaux, mes fréquentations un rien orientées à gauche, l'écoeurement et le dégoût fleurissaient au gré des commentaires.
Si les résultats avaient été éclipsés, on aurait pu croire que le FN venait d'accéder au pouvoir... On en oublierait presque que François Hollande reccueillait une majorité relative de suffrage, devant le président sortant. Oui le Front National est haut, mais ce n'est pas un nouveau 21 avril, puisqu'il n'est que troisième. La gauche depuis 1988, dispose de sa plus grande chance de gagner une élection présidentielle. Comme un seul homme/femme, Jean-Luc Mélenchon et Eva Joly ont appelé leurs électeurs à faire gagner la gauche, et c'est là un point important.
Car le score du Front National, n'avantage pas vraiment Nicolas Sarkozy. Marine le Pen, forte de son poids nouveau (au passage sérieusement dégonflé durant la soirée descendant de 20,7% à 17,9%), ne devrait pas se rallier au camp UMP. Pris au piège de la stratégie Buisson, le président sortant va se trouver écartelé entre la chasse au centriste ou au frontiste, entre l'orange et la francisque. Contrairement à François Hollande qui pourra disposer d'une union de gauche, qui a toujours fait bloc contre les extrêmes, et sans doute d'électeurs du Modem refusant l'alliance avec l'extrême droite.
Alors, on devrait se réjouir d'une probable victoire de la gauche. Sauf que plus de 6 millions d'électeurs ont porté leur voix sur le Front National. Et cela pose problème. Force est de constater que si la liberté de choix est absolue, le choix par la peur est une constante depuis dix ans. Nous eûmes le 21 avril 2002, le ratissage à droite toute de Sarkozy en 2007, et la même méthode bodybuildée en 2012. Sauf que cette fois, à l'opportuniste, le frontiste préféra la Marine. Aux débuts de sa carrière politique, elle bénéficie d'une assise supérieure à celle que son père mit un demi-siècle à créer...
De Vienne à Paris, on sait faire la fête au FN...
Il faut bien admettre que 20% à un quart des électeurs sont attirés par les idées portées par ce Front de l'exclusion, du sectarisme et du racisme. Les facteurs sont multiples, la volonté affichée de Nicolas Sarkozy d'occuper et d'amplifier ce domaine depuis 2002 en est une, la condescendance médiatique, disposée à prêter l'antenne à ce vecteur porteur d'audimat, une autre, mais pas seulement.Oui, comme Gicquel en son temps le disait, la France a peur. De quoi concrètement, on se demande, mais a peur. Ne soyons pas dupes que l'islamisation supposée, l'assistanat évoqué, et l'Europe diabolisée ne sont que des prétextes. Par la peur, on gouverne plus aisément. Le peuple qui tremble trouvera toujours plus rassurant les bras autoritaires censés les protéger.
C'est de la peur que naquis les plus dures dictatures. La France de la débâcle effrayée, livrée à l'exode plongea dans les bras rassurant du Maréchal. Le peuple de la Révolution se livra au premier consul Bonaparte, plus sûrement alors que nos frontières étaient menacées. Aujourd'hui on brandit le voile vert de l'islam, nourrissant la psychose à coup de viande halal, et de cohortes d'islamistes débarquants. La France éternelle de la crainte va aux urnes, manifestant son raz le bol au mépris des conséquences...
Notre pays a, faut-il le rappeler, une histoire troublée. Il suffit de descendre à la décolonisation, et à la collaboration pour trouver trace de notre propre ignominie. Fait étrange depuis sa fondation, on retrouve les second rôles des plus basses périodes en soutien des mouvements d'extrême droite. Dernièrement des jeunes frontistes en formation se gondolaient de blagues antisémites...
Plus que jamais, le combat est d'actualité
Et aujourd'hui encore, ils veulent la lumière. D'une dose de populisme, d'autorité, ils voudraient couvrir notre pays. Ce n'est pourtant pas pour demain. Le combat n'est pas fini, nous avons dans les mains le pouvoir de leur dire non! Le Front, de Gauche cette fois, appelait à la Résistance. Plus que jamais il est nécessaire de lutter contre le fléau de la division. Résister, militer, mais d'abord le 6 mai faire changer le destin. D'un bulletin nous pouvons nous débarrasser d'un Sarkozy déclinant. Moindre mal, le Parti Socialiste au pouvoir, mais occasion de faire passer une autre idée de la France, celle que partagent ceux épris de solidarité, de fraternité, de valeurs humanistes. La haine ne se combat pas par le mépris, elle ne se combat pas avec les même armes salies. Montrons qu'un autre monde est possible, car ce ne sont que les actes qui les feront virer de bord.Depuis quelques jours c'est à Belfast que je vis, je découvre une ville marquée. Au nom de divergences religieuses, il y eut des combats, des attentats, des victimes innocentes. Pas un quartier où, n'apparaissent les stigmates de la haine. Les murs de la paix, séparants les communautés apportent encore leurs témoignages. Dix ans que la paix est signée, mais le soir ressemble toujours à un couvre feu, où la ville après sept heure semble se refermer. Ce n'est pas en Asie, ce n'est pas en Orient, c'est au Royaume Uni. Ce n'était pas il y a 50 ou 100 ans, c'était il y encore dix ans. Ce n'est pas si loin, est-ce à jamais du passé?