L'actualité "hollandaise" du week-end mérite l'attention. Car elle nous éclaire sur le nouveau paysage politique européen.
1/ Actualité hollandaise, tout d'abord, à la suite du premier tour. Il ne vous aura pas échappé que F. Hollande arrive donc en tête. Et que si l'on en croit les sondages (qui globalement ne se sont pas trompés, sauf dans la cotation de M. Le Pen qui arrive à 18% quand les derniers sondages la donnaient à 16 : pas un grand écart, somme toute), ce candidat arrivé en tête sera désigné dans quinze jours comme le prochain président de la République. (Ceci n'est qu'un constat).
2/ Du point de vue européen, quelle signification ? tout d'abord, la loi politique qui me semble immuable depuis quatre ans : "sortez les sortants". Où que je regarde, je ne vois que des gouvernements sortants qui perdent les élections. La faute à la crise, bien sûr, et à la récession qui l'accompagne. Quels que soient les efforts et les réussites des équipes en place, elle sont balayées. En Islande, Irlande, Pologne, Danemark, Tchéquie, Grèce, Espagne, Portugal ... Je dois en oublier et peut-être il existe un contre-exemple (l'Europe est si diverse quelle doit bien avoir aussi un pays qui a vu sa majorité rester en place)...
3/ Si F. Hollande est le prochain président, cela posera la question de la stratégie européenne face à la crise. En effet, on a entendu ces derniers jours de multiples économistes (Krugmann, Artus, ... ) qui ne sont pas des gauchistes venir déclarer en Allemagne que la rigueur n'était pas la solution à tout et qu'il fallait aussi de la croissance. De ce point de vue, F. Hollande devrait trouver rapidement des appuis au sud de l’Europe : en Grèce, en Italie et en Espagne, même si les dirigeants de ces pays ne le disent pas ouvertement. En effet, les cures drastiques qu'ils font subir à leurs pays sont en train de tuer le malade. Il semble qu'ils soient ouverts à une autre ligne de politique économique, plus favorable à la croissance.
4/ C'est ici que le week-end "hollandais" prend tout son sens et justifie ce billet : car l'autre événement fut la chute du gouvernement néerlandais, à cause de l'abandon du soutien du leader populiste Geert Wilders, le "populiste" batave (voir ici).
5/ En effet, alors que la coalition au pouvoir négociait sur un nouveau plan de rigueur, celui-ci a été refusé par le parti de M. Wilders : "Nous ne voulons pas soumettre à une saignée nos pensions à cause du diktat de Bruxelles." On notera le primat social de son discours. Et l'accusation contre Bruxelles. A ceci près qu'il se trompe. Ce n'est pas Bruxelles qui est la cause de la rigueur, c'est l'Allemagne.
6/ Car voici en quoi cette nouvelle constitue le deuxième chamboulement européen du week-end : dans la gestion de la crise européenne de la dette, les Pays-Bas faisaient traditionnellement parti du front des durs et des vertueux, aux côtés de l'Allemagne : le front du nord contre les pays du club Méd. Pour Mme Merkel, ce sont deux mauvaises nouvelles "hollandaises" : non seulement la position de favori de FH, mais aussi la chute de l'allié néerlandais. Il est très probable qu’un tournant européen va devoir avoir lieu.
Bref, en regardant un peu plus largement, il y aura eu plein d'événements politiques ce week-end en Europe : et ils sont autant d'épines dans le position de Mme Merkel.
O. Kempf
NB Ces positions n'engagent que moi et aucune des organisations pour lesquelles je travaille. Il va de soi que je ne soutiens aucun des candidats en lice et que ce billet n'est qu'une analyse géopolitique sur la politique macroéconomique européenne.