Le magazine américain Wizard fait partie de mes plaisirs coupables : je sais qu'il n'a guère d'intérêt, même pour un sujet aussi trivial que les comics, qu'il n'est qu'un torchon pour fanboys défenseurs de chapelle et accrocs à l'argus qui clôt la publication et pourtant, je le lis tous les mois. Quelle lose.
Peut-être parce que j'ai des gènes de fanboy justement, puisque je ne crache pas ni une illustration inédite en guise de couverture ni sur les croquis qui émaillent chaque numéro. Et aussi parce que, malgré ses nombreuses tares, il reste un bon moyen de se tenir au courant de ce qui se passe de l'autre côté de l'Atlantique quand on est accroc au papier. En revanche, ne comptez pas sur l'équipe éditoriale pour vous parler d'autre chose que des mastodontes du secteur (Marvel, DC, dans une moindre mesure Image, et une poignée d'indépendants bankable comme Aspen). Pour le reste, il faudra passer par Internet ou faire confiance à votre libraire spécialisé attitré (comme Frans, tenancier d'Evil One à Clermont-Ferrand, dont la boutique et les recommandations valent le détour). Pire, ce manque d'ouverture se double d'un enthousiasme irritant et d'un goût prononcé pour le sensationnalisme mensonger.
En clair : tous les mois, les rédacteurs en font des caisses sur les "évènements" (à ce niveau, c'est de l'auto-prophétie) qui secouent la ligne éditorial des deux gros et promettent moult secrets dévoilés et interviews bouffies de révélations. Problème, entre la langue des bois des auteurs, condamnés à en dire le moins possible et à flatter tous leurs collègues (à l'exception de trublions comme Alan Moore) et l'impossibilité pour Wizard de flinguer le suspens des récits qu'ils promeuvent, il faut se contenter d'hypothèses, de contradictions et de titres racoleurs. Ce qui ne serait évidemment pas gênant, si le ton n'était pas irrémédiablement à la surenchère. A ce titre, la plus grande prudence est de mise à l'égard des rubriques consacrées au cinéma, aux jeux vidéo ou aux séries TV (Lost et Heroes en tête), la meilleure tactique étant de les zapper. Tout simplement. Sans parler des classements et tops typiques des publications médiocres, comme le récent et douteux "The sexiest women of TV" avec Hayden Panettiere en tête, du haut de ses 19 ans et de son rôle de lycéenne pom-pom girl...
Évidemment, en lisant entre les lignes et en prenant du recul, il y a toujours quelques informations à dénicher sur tel auteur (populaire et/ou vendeur évidemment, ce qui n'est pas incompatible avec le talent), sur telle publication ou tel éditeur, et toujours de quoi gonfler sa "wishlist si je deviens millionnaire sans vendre mes organes", notamment grâce à la rubrique Checklist, qui propose une sélection de TPB et un chouia de sens critique. Les quatre meilleures pages en somme. Quelle lose (bis).
Verdict du Père Siffleur