Editions Viviane Hamy, 2012
Un court récit flamboyant d'une jeune étudiante en lettres de 22 ans...et ce n'est pas son premier roman !
Un beau succès bien mérité pour ce roman français qui sent bon la littérature américaine. Et dans la production française d'aujourd'hui, c'est très rare...
Assurément, Cécile Coulon est en train de se faire un nom. Sur 170 pages, elle arrive à nous livrer le destin d'un jeune homme, Thomas Hogan, intelligent, silencieux et taciturne, marqué par la mort de son père suite à un accident dans une scierie.
Nous sommes dans une ville, quelque part dans l'Amérique traditionnelle. Une grande propriété, des forêts de sapins, un bar du coin aux airs de saloon, le Blue Budd. Des bûcherons, quelques ivrognes, un médecin qui respire la bonté. Il n'en faut pas plus à l'auteur pour créer une véritable atmosphère. On y est, on sent l'odeur des sapins, on voit de suite ce village traditionnel. Une Amérique fantasmée, sans indication temporelle, un peu hors du temps.
Unité de lieu pour le portrait d'un destin : dès la première page, nous savons que Thomas a été arrêté par la police. Quelques éléments : un médecin qui arrive, une mère qui hurle. Une scène décrite par petites touches. Puis Cécile Coulon retrace son itinéraire sur 160 pages. Elle en parle à la fois comme une vie de tous les jours et aussi comme une légende. Comme si une petite voix nous disait : viens, approche, je vais te dévoiler le secret de Thomas Hogan.
Elle retrace cette vie trentenaire en finalement peu de pages. Quelques événements majeurs : deux accidents, un meurtre, une amitié trahie...
Cécile Coulon aime ses personnages, elle aime les décrire, patiemment pour leur donner corps : le médecin dévoué O'Brien, l'amoureux secret, le vieux Puppa à la cigarette au bec, Maryr, la mère dévouée...
Et, il y a aussi et surtout cette écriture à la fois classique, simple et parfois insolite, où des images, des métaphores curieuses nous sautent aux yeux : des poumons qui battent comme des éventails cassés, une vengeance qui est un plomb qui se mange chaud, une bouche qui brille au soleil à la manière de bulles de savon traversées par des rayons de lumière blanche, des joues roses comme des peaux de poulet rôties au soleil...Une belle langue inventive, moderne, imagée.
Jugez-en plutôt par ces premières lignes, où les sodas et les hot dogs nous plongent de manière surprenante en Amérique :
"Ce poids, cette horreur planquée derrière chaque phrase, chaque geste, couverte par les capsules de soda, tachée par la moutarde des hot-dogs vendus avant les concerts...."