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Pourquoi le vote FN est profondément anti-républicain

Publié le 23 avril 2012 par Davidme

Voilà. Les résultats du premier tour de l'élection présidentielle sont tombés. Hollande réalise une très belle performance, inédite sous la Ve République pour un candidat de gauche au premier tour. Nicolas Sarkozy résiste, mais les résultats sonnent tout de même comme un profond désaveu. Non seulement, il enregistre le plus mauvais score d'un président sortant (hormis Chirac 2002 mais avec une participation moindre), mais en plus le FN est à 17,9%, démontrant ainsi que Nicolas Sarkozy depuis qu'il est arrivé au pouvoir en 2002 (ministère de l'Intérieur) et en 2007 (présidence de la République) n'a en aucun cas siphonné les voix du FN, il les a au contraire décomplexées.
Ecrire cela et sentir déjà la première critique poindre : "non il n'y a pas 17% de racistes en France". C'est en partie vrai tant le vote FN se décompose de fait en motivations sociales et xénophobes. C'est du 50-50. 50 % des ces électeurs sont racistes. Les 50 autres sont effrayés par le monde.
Pourquoi le vote FN est profondément anti-républicain

Il sera toutefois plus difficile à ceux qui disent que le FN est un vote comme un autre de contester que c'est un vote profondément anti-républicain. Anti-Républicain dans le sens où la République construit et accueille. Or, ce vote Le Pen-Dupont raciste, antisémite, xénophobe est dans le rejet de tout. De l'Autre comme du monde. Il faut arrêter de se voiler la face (quel bon slogan pour la nouvelle droite décomplexée ou déniaisée comme le disaient certains hier soir !). Ce n'est pas seulement -loin de là- un vote de souffrance comme le dit Monsieur Sarkozy (que voulez-vous qu'il dise d'autre le pauvre homme !).
Pas seulement un vote de souffrance car comme le montrent les résultats, les quartiers populaires ont plutôt plébiscités Hollande, sanctionnés Sarkozy sans forcément faire monter Le Pen. Dans de nombreuses villes populaires d'Ile-de-France, François Hollande a approché voire dépassé les 45% des voix, comme à Grigny (44,60%) et Courcouronnes (43,80%) dans l'Essonne ou dans les villes communistes de Saint-Denis (45,79%), La Courneuve (46,95%) et Bobigny (47,86%), en Seine-Saint-Denis.
Le phénomène est particulièrement visible dans le "9-3", où le candidat socialiste obtient 38,68% des suffrages, contre 34,17% des voix pour Ségolène Royal au premier tour de l'élection de 2007, tandis que Nicolas Sarkozy a dégringolé, passant de 26,85% au premier tour en 2007 à 19,48% en 2012. Le vote des quartiers populaires a aussi profité au Front de gauche, dont le candidat a su mobiliser les électeurs des milieux défavorisés. A Rennes, dans le canton du Blosne, classé zone urbaine sensible, Jean-Luc Mélenchon (15,30%) ravit la deuxième place à Nicolas Sarkozy (14,40%) tandis que François Hollande (44,76%) trône en tête. Dans le quartier de la Grande Borne à Grigny (Essonne), Jean-Luc Mélenchon obtient 26,01% des suffrages, derrière François Hollande (48,49%). Nicolas Sarkozy (9,05%) n'arrive qu'à la quatrième position, derrière Marine Le Pen (9,56%). Idem dans les quartiers nord de Marseille où Nicolas Sarkozy décroche une piètre quatrième position derrière Hollande, Le Pen et Mélenchon.

Pourquoi le vote FN est profondément anti-républicain

Le vote Le Pen n'est donc pas qu'un vote de souffrance. C'est donc bien aussi un vote « Dupont-Lajoie ». C'est un vote de rejet. Rejet de l'étranger, rejet de l'Europe, rejet de l'homosexuel, rejet du musulman (ou plutôt du non chrétien). Le phénomène est très répandu chez les 35-45 ans. Une génération qui s'est beaucoup fanatisée sur le plan religieux en réaction à Mai 68. On va à la messe, on fait le carême et surtout on en a marre des noirs, des juifs et des arabes (entendez les musulmans bien sûr). C'est une réalité très présente dans une ville comme Marseille par exemple. Rejet de l'égalité, rejet de l'autre, rejet de la différence, le tout matinée de difficultés sociales considérables. Ce rejet qu'il soit contre les étrangers, ou contre le système démontre clairement un anti-républicanisme latent. Une volonté profonde de jeter le creuset républicain avec l'eau du bain. Cela personne ne pourra le contester.

Ce qu'il sera également difficile à contester est le fait que Nicolas Sarkozy a considérablement banalisé ce rejet de la République. Dans le discours du Latran, il a mis le prêtre au-dessus de l'instituteur, dans son action en tant que ministre de l'Intérieur il a ligué les cultes les uns contre les autres, dans sa montée en puissance en 2007 et durant toute sa présidence il n'a cessé de bafouer l'identité républicaine profonde en parlant d'identité nationale, plutôt que de communauté nationale. Bref, la droite a mis un pied en dehors des valeurs républicaines. Cela lui a profité électoralement en 2007, mais a profité aussi au FN cette année. Comme si le fossoyeur de l'esprit républicain était tout bonnement son Président. Il y a fort à parier que cet entre deux tours va continuer dans cette veine. Si Nicolas Sarkozy perd, la droite sera en lambeaux et une scission de l'UMP entre ceux majoritaires qui sont si proches dans les idées du FN et les autres gaullo-chiraquiens est tout à fait envisageable.

Qui sème la haine récolte le FN dit un slogan de manifestation. Hystérisant la société, dressant les Français les uns contre les autres (assistés contre productifs), riches contre pauvres, étrangers travaillant en France contre Français, Nicolas Sarkozy est le meilleur porte-parole des idées du Front National. Il est, plus grave encore, avec ses lieutenants (Hortefeux, Guéant, Buisson, Estrosi) le meilleur contempteur du socle républicain. Bref, la droite en France est devenue extrême. Pas étonnant que l'extrême droite anti-républicaine en soit désormais si proche... Il est temps de changer non ?


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