Le premier tour de Serge Federbusch sur Atlantico !

Publié le 23 avril 2012 par Delanopolis
Interviewé à chaud par Atlantico, Serge Federbusch a dressé un rapide bilan du premier tour de la présidentielle. Atlantico : Quels sont les principaux points que vous retenez des résultats du premier tour de cette élection présidentielle ?

Serge Federbusch : Le principal enseignement reste que la stratégie de François Hollande - son calcul cynique et mécaniste - a payé. Sa campagne se résume à un mot d'ordre : « dégager Sarkozy ». Il promet le minimum et continue ainsi. Il sait bien qu’il faut maintenant qu’il ne prenne aucun risque.

La vraie surprise c'est que malgré ce que l’on a pu dire de la montée de Jean-Luc Mélenchon, le vote FN n’a jamais été aussi haut. Nous assistons donc à une sorte de "fixité" du vote protestataire. Ce qui est paradoxal : Hollande pourrait être élu grâce aux électeurs FN du premier tour, puisque 30% d'entre eux devraient se tourner vers le candidat PS. Si l'essentiel d'entre eux votaient pour Nicolas Sarkozy, il gagnerait.

Atlantico : Ce mécanisme de report de voix FN vers la gauche n'est toutefois pas fondamentalement nouveau...

SF : Certes, le FN est sorti des limbes de l’extrême droite en récupérant les voix venues de gauche. Mais Nicolas Sarkozy avait réussi en 2007 à les récupérer en tenant un discours sur le pouvoir d’achat. Je pense que sa grosse erreur pour cette campagne a été de ne pas parler suffisamment de pouvoir d’achat pour s’adresser à la partie ouvrière et prolétaire du FN. C’est ça qui va le tuer.

Atlantico : Selon vous, quelles vont être les clés de l'entre deux tours ?

SF : Nicolas Sarkozy s'est plaint d'avoir les neuf autres candidats contre lui. Cela va continuer, à part peut-être du côté de Bayrou, mais le score de celui-ci est tellement bas qu’il ne devrait pas avoir un poids réel.

Marine Le Pen a désormais intérêt à ce que Nicolas Sarkozy soit battu, en espérant que l’UMP soit laminée derrière pour qu’il y ait des triangulaires partout aux législatives et que le FN puisse incarner l’opposition à Hollande.

Quant à Jean-Luc Mélenchon, s'il avait été un peu plus haut, il aurait pu faire baisser Hollande et casser sa dynamique en jouant le rôle d’épouvantail auprès de l’électorat Bayrouiste. D’une certaine manière, le fait que Mélenchon ne soit pas arrivé très haut renforce Hollande pour le deuxième tour et les législatives. Reste que s’il avait été un vrai révolutionnaire, Jean-Luc Mélenchon aurait dû dire que Hollande est un social-traître et appeler à l’abstention. S’il lui laisse ses voix sans aucune contre partie, c’est l’assurance que les quelques députés communistes vont tout faire pour être réélus. Cela montre qu’il avait une très faible marge de manœuvre avec les communistes qui vont aller à la soupe pour obtenir des députés. Il aurait dû faire un vrai baroud d’honneur. Là, il est fini.

Atlantico : Comment avez-vous trouvé les prestations des différents hommes politiques sur les plateaux de télévision ce dimanche soir ?

Ils avaient tous des têtes d’enterrement à l’UMP ! François Fillon a fait un discours insipide, d’une tristesse désespérante, presque un discours d’adieu. Quant à la polémique sur les trois débats de l'entre-deux tours, elle est dangereuse pour Nicolas Sarkozy : si Hollande refuse, que fait-il ? S’il accepte d’aller sur le terrain de Hollande avec un seul débat, c’est déjà une capitulation... Il me semble que cela n'a aucun intérêt de faire une proposition dont on sait qu'elle va être refusée par l'adversaire.

Enfin, j'ai trouvé que Nicolas Sarkozy avait tenu un bon discours. C'est d'ailleurs remarquable qu’il continue à être bon alors que c’est plié ! C’est un drame et un crève cœur de voir quelqu’un de talentueux comme Nicolas Sarkozy en passe d’être remplacé par un roublard du Parti socialiste élevé dans le jeu des rapports de force et des demi-teintes. On se trouve dans une époque qui nécessite de l’énergie et des prises de risque et on va se retrouver à la présidence de la République avec quelqu’un qui ne sait jouer que des rapports de force des uns et des autres. Ce qui est valable rue de Solférino ne l'est pas au G8 ou au G20. Les méthodes de Hollande ne peuvent pas marcher dans une enceinte hors de celle des petits jeux politiciens français.

Propos recueillis par Aymeric Goetsch

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