Les scientifiques des Universités de Grenade et de Las Palmas de Gran Canaria ont analysé les données recueillies pendant 6 ans auprès de 8964 individus n’ayant jamais reçu de diagnostic de dépression au début de l’enquête. Un questionnaire leur a été soumis tous les 2 ans sur leur mode de vie et leurs consommations alimentaires. A cours de l’étude, 493 participants ont été diagnostiqués dépressifs.
L’analyse des résultats montre une relation positive entre la consommation de restauration rapide et les troubles dépressifs: ceux qui consommaient le plus ce type de nourriture avaient un risque accru de 51 % de souffrir de dépression par rapport à ceux qui en consommaient le moins.
Cet effet serait « dose-dépendant », c’est à dire que plus on mange de ce type d’aliments, plus le risque s’élève. Même une faible consommation était liée à un risque significativement supérieur. Des résultats semblables ont également été retrouvés sur la consommation de pâtisseries industrielles (viennoiseries, beignets…)
Ces résultats viennent corroborer ceux obtenus préalablement en 2011 par une autre étude dans le cadre du même projet, le Sun Project, publiés dans la revue médicale en ligne PloS One. 12059 personnes avaient été suivies pendant plus de 6 mois, et l’enquête concluait à un risque de dépression de 42 % plus élevé chez les consommateurs de fast-food.
Quant aux hypothèses avancées pour expliquer de tels chiffres, celle privilégiée par les auteurs de l’étude est « la présence importante de gras de type trans dans ce type d’aliments ». Ces gras peuvent avoir des effets négatifs sur différents systèmes biologiques, sur le risque de maladie cardio-vasculaire, mais aussi de dépression. » Ces acides gras trans seraient susceptibles d’augmenter la production de cytokines inflammatoires, qui diminuent la synthèse de neurotransmetteurs (ceux-ci baissent en cas de maladie mentale) et de neurotrophines, autres éléments liés au bon fonctionnement des neurones.
Les résultats de la précédente étude du Sun Project montraient que les personnes consommant le plus d’acides gras trans avaient un risque jusqu’à 48 plus élevé que celles n’en consommant pas. Selon les chercheurs, l’augmentation de l’incidence de la dépression ces dernières années pourrait être en partie due aux changements des sources de matières grasses dans l’alimentation occidentale, où certaines « graisses bénéfiques » ont été substituées par des graisses saturées et trans.
Au vu de ces résultats, il vient forcément à l’idée d’envisager également la relation inverse de causse à effet: ne serait-ce pas l’état de déprime ou de dépression qui amènerait à se tourner vers ces choix alimentaires ? Car la « junk food » apporte une satisfaction immédiate, ne nécessite aucun effort de préparation, voire même de mastication, est disponible à tout moment et créée une sorte de dépendance…Ce n’est pas une explication plausible aux yeux des chercheurs du fait que « l’étude est basée sur des gens qui n’avaient pas de dépression quand ils ont commencé à répondre aux questionnaires ».
La dépression affecte 121 millions de personnes dans le monde mais peu de choses sont connues à ce jour sur le rôle de l’alimentation dans le développement de troubles dépressifs. Les auteurs rappellent cependant que des études antérieures suggèrent le rôle préventif de certains nutriments et aliments, tels que les vitamines du groupe B, les acides gras oméga-3, l’huile d’olive et le régime méditerranéen en général…
Il faut dire que les participants ayant la plus grosse consommation de nourriture de type fast food étaient aussi susceptibles d’être célibataires, sédentaires, de fumer, de travailler plus de 45 heures par semaine et de manger moins de fruits et légumes, de poisson, de noix, de légumineuses et d’huile d’olive!
On peut aussi se demander si une relation moins directe de cause à effet entre consommation de junk food et dépression est possible, en cherchant les raisons qui ont fait que ces personnes se sont tournées vers ce type d’aliments: rythme de vie…
Bien que des études complémentaires soient nécessaires pour confirmer le lient entre les graisses utilisées en industrie agro-alimentaire et les troubles nerveux, la consommation, mais aussi la fabrication, de fast-food et de pâtisseries industrielles devrait être mieux contrôlée étant donné son impact sur la santé physique et mentale.