Souvenez-vous. Il y a deux ans au Rond-Point, le comédien s'offrait une récréation, enfilant plumes, robes à paillettes, et descendait son grand escalier accompagné de ses boys pour une amusante revue, un peu rapidement montée, puisant dans un répertoire allant de la Maillan à Carla Bruni (sa réjouisante interprétation de "Quelqu'un m'a dit" lors des derniers Molières en était issue). Deux ans plus tard, au Marigny, perruques, faux cils et talons hauts sont de retour pour un récital à la thématique lyrique, tout aussi improbable mais plus travaillé, permettant à Michel Fau de dévoiler avec finesse non pas ses talents de chanteur (qui ne se sont pas améliorés) mais bien ceux d'un grand acteur, transformiste haut de gamme, au jeu intelligent, subtil, décalé et plein d'esprit.
Une heure durant, Michel Fau saisit trucs et tics de cantatrices d'une autre époque (encore que...), tant dans l'expression que la gestuelle, allant jusqu'à risquer quelques pas de danse. Au programme "Samson et Dalila", "Castor et Pollux", mais aussi "Porgy and Bess", Zaz ou une exquise chanson paillarde en guise de rappel, le tout donné avec la même emphase. Savoureux. Mais le clou du spectacle réside sans doute dans un intermède non chanté au cours duquel Fau se livre à quatre variations d'un même monologue de Phèdre, allant du lyrisme d'une Sarah Bernhardt au naturalisme le plus extrême, en passant par le surjeu ultra démonstratif et introspectif d'une jeune comédienne. Techniquement remarquable et franchement drôle.
Reste que le spectacle, aussi réussi soit-il, se révèle rapidement répétitif. Ce qui passe délicieusement en pastille de 10 minutes supporte difficilement d'être étiré. Ne souhaitant pas tomber dans du cabaret trop populaire aux effets faciles (et c'est tant mieux), Michel Fau touche rapidement les limites de l'exercice.
Pour cet artiste talentueux, et pour quelques moments d'anthologie, il vous faudra toutefois vous rendre au Marigny.