Lettre ouverte de Sea Shepherd France à Alain Juppé, ministre des affaires étrangères
Monsieur,
En réponse à Madame Brigitte Bardot qui vous a interpellé par courrier sur les efforts de Sea Shepherd pour mettre un terme à la chasse illégale pratiquée par le Japon en plein sanctuaire baleinier antarctique, vous répondez par un courrier daté du 10 Février que "… la France ne peut soutenir Sea Shepherd qui semble privilégier les actions qui sortent du cadre de la légalité et des principes essentiels de sécurité en mer".
Vous ajoutez plus loin qu’à l’instar des pays les plus "protecteurs" des baleines, la France a condamné "ces pratiques de protestations violentes en mer".
Nous jugeons utile de préciser Monsieur, que les actions de Sea Shepherd ne sont, contrairement à ce que vous semblez penser, ni de nature protestataire – la protestation est vaine dans le cas présent et nous la laissons à d’autres - ni de nature violente: en huit ans d’interventions dans le sanctuaire baleinier, Sea Shepherd n’a jamais blessé aucun braconnier bien que ces derniers ne fassent nullement preuve de la même retenue à l’égard de nos équipages. La violence en Antarctique Monsieur est d’une autre nature: elle résonne à chaque coup de harpon explosif dans ce sanctuaire baleinier qui n’a de sanctuaire que le nom.
Et les actions sortant du cadre légal ayant cours dans cette zone sont les mises à mort répétées de ces baleines vulnérables, comme s’est d’ailleurs récemment plu à le rappeler la Cour de Justice Américaine, interpellée par les baleiniers Japonais sur "nos illégalités".
Nous entendons donc votre condamnation de nos "actions violentes et illégales" mais sachez bien, Monsieur, que nous ne demandons pas mieux que de vous passer le relais sur cette question.
La France tout comme de nombreux "pays protecteurs" des baleines sait faire entendre sa voix lorsque ses intérêts sont mis à mal. Il semble malheureusement que la survie des baleines ne représente pas un enjeu suffisamment important pour que la France fasse preuve de cette même force de persuasion qu’elle déploie pourtant ailleurs. Tout comme les autres "pays protecteurs" des baleines, elle ne juge pas utile de dépasser la vaine protestation contre la chasse baleinière et se contente "d’efforts diplomatiques" qui ont pourtant prouvé leur totale inefficacité.
Dans un Appel aux Nations, émis récemment et adressé entre autres à la France, nous signifions bien que nous n’avons aucun plaisir ni aucun intérêt à risquer nos vies aux confins du monde, chaque année depuis huit ans pour donner un semblant de réalité à des mesures de protection des baleines mises en place par les "pays protecteurs" des baleines. Dans cet appel, nous spécifions que nous serions heureux de ne plus jamais retourner en Antarctique pour peu que les gouvernements concernés prennent enfin les mesures nécessaires pour faire cesser le massacre illégal des baleines dans ce sanctuaire.
Sea Shepherd ne réclame pour son compte aucun soutien de la France, ni de nulle autre nation. Nous n’attendons rien d’autre des gouvernements qu’ils ne prennent leurs responsabilités et qu’ils se décident enfin à défendre en mer celles qu’ils défendent avec tant d’ardeur sur le papier.
Dans cette attente, nous continuerons d’agir en conformité avec la Charte Mondiale pour La Nature des Nations Unies afin de pallier autant que possible au manque de volonté et au manque d’initiative des "pays protecteurs des baleines" dont la France fait partie pour que le jour où la préservation des océans occupera enfin la place qu’elle mérite dans l’ordre des priorités de nos gouvernements… il reste encore quelque chose à préserver.
Veuillez recevoir, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sincères salutations.
Lamya ESSEMLALI
Présidente Sea Shepherd France