Cahier de poèmes

Par Anne Onyme

Emily Brontë
Éditions Points
224 pages

Résumé:

La poésie d’Emily Brontë, par sa force retenue, sa vertu exploratrice et son ampleur imaginative, occupe une place à part entière au sein du romantisme anglais. Ce recueil regroupe les poèmes qu’Emily elle-même souhaitait conserver ; ils forment le noyau de son œuvre, éclairant toute son activité créatrice.

Mon commentaire:

C'est en lisant Quand j'étais Jane Eyre que j'ai eu envie de me plonger dans la poésie d'Emily Brontë. Emily étant surtout connue pour son roman Les hauts de Hurlevent, j'avais hâte de découvrir la poétesse derrière cette oeuvre plutôt sombre. C'est donc avec une grande curiosité que j'ai ouvert ce Cahier de poèmes.

Le recueil contient deux parties. Outre une éclairante préface, un tableau chronologique et une liste de notes en fin de volume, on retrouve deux cahiers qu'écrivait Emily. Le premier est complet. C'est un cahier personnel qui rend compte de l'évolution d'Emily au fil du temps, tant au point de vue psychologique qu'au niveau de son écriture. La seconde partie comprend une sélection de longs poèmes issus du cahier Gondal.

Un petit mot d'ailleurs sur Gondal pour les non initiés. Il s'agit en fait d'un monde imaginaire créé par les Brontë. Emily en a écrit des poèmes, s'inspirant de cet univers bien particulier. De ce monde imaginaire il reste bien peu de choses, heureusement les poèmes ont subsisté.

La poésie d'Emily a été une belle découverte pour moi. J'y trouve quelque chose de très délicat et des poèmes empreints de romantisme et de solitude, parfois de tristesse. De nombreux poèmes sont très émouvants. Ils vont jusqu'au tréfonds de l'âme. On y retrouve un peu des Hauts de Hurlevent, mais aussi par moment une détresse touchante ou une luminosité à laquelle on ne s'attend pas. J'y perçois personnellement une certaine solitude de l'âme, mais aussi beaucoup d'espoir. Les longs poèmes du cahier Gondal sont plus lumineux et fantaisistes.

Un poème du premier cahier m'a particulièrement plu. Je vous le partage:

Pur à présent décline le soir d'été
Autour de ma maison, en splendeur adoucie
Le ciel sur son front sacré ne porte pas
Un seul nuage de mélancolie -

La vieille tour, anchâssée dans la lueur d'or,
Contemple d'en haut le soleil qui descend -
Si doucement le soir se fond dans la nuit
Qu'on peut à peine dire le jour fini -

Et c'est justement l'heure joyeuse
Où nous avions coutume de nous échapper
De secouer la tyrannie du labeur
Pour aller avec entrain joeur dehors -

Alors pourquoi tout est-il si triste et seul?
Nul pas allègre dans l'escalier -
Nul rire, nul accent pour donner coeur
Mais partout un silence sans voix.

J'ai tourné sans fin dans notre jardin
Et il me semblait qu'à chaque tour
Des pas allaient et venaient à ma rencontre
Et des mots portés par les souffles

En vain - ils ne viendront pas aujourd'hui
Et le rayon du matin poindra aussi morne
Dites: sont-ils perdus à jamais, nos éclairs
De soleil dans les brumes du souci?

Mais non, l'Espoir réprobateur assure
Qu'il est doux de pleurer les joies enfuies
Quand chaque orage voilant leur lumière
Prépare un plus divin retour.
30 août 1839,  P.45

Je ne connaissais pas Emily Brontë par sa poésie. Vraiment, c'est une belle découverte et je vous souhaite de pouvoir la découvrir vous aussi, si vous ne la connaissez que par Les Hauts de Hurlevent. Une poésie qui m'a beaucoup touchée.