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Morne plaine (l’enfant seul)

Par Borokoff

A propos de L’enfant d’en haut d’Ursula Meier ★★★☆☆

L’enfant d’en haut d'Ursula Meier - Borokoff / Blog de critique cinéma

Simon, 12 ans, prend chaque jour une télécabine qui l’emmène de la plaine industrielle où il vit avec sa sœur Louise, au sommet de la montagne et à une station de ski où il vole aux touristes toutes sortes d’objets qu’il revend ensuite au marché noir. Louise, qui vient de perdre son travail, en a marre de son frère mais est de plus en plus dépendante financièrement de lui et de ses trafics qui prennent de l’ampleur…

D’Ursula Meier, on se souvient du prometteur Home, sorti il y a quatre ans, où une chaotique famille tentait de s’en sortir en vivant au bord d’une autoroute.

Changement de décor ici, avec ces plans larges sur la plaine encerclée de montagnes. Mais les problématiques n’ont pas changé : la famille en crise, l’enfance meurtrie, la mère absente (au sens figuré dans Home), etc.…

Meier refuse qu’on colle à L’enfant d’en haut une étiquette de « film social ». Elle parle plutôt d’une « fable » inspirée par le souvenir d’un évènement qui l’avait marqué dans son enfance. Mais le côté fable est ici difficile à déceler, tant le réalisme caractérise ce troisième long-métrage.

Léa Seydoux - L’enfant d’en haut d'Ursula Meier - Borokoff / Blog de critique cinéma

Et ce réalisme est qu’on le veuille ou non social. La peinture des rapports entre Simon et Louise est décrite avec une crudité qui n’en révèle que mieux la dureté à défaut d’en dévoiler les raisons.

Simon et sa sœur sont deux êtres à la dérive et au bord de la marginalité. Louise (Léa Seydoux, parfaite) aimerait faire croire à son frère qu’elle ne l’aime pas, mais elle a trop besoin de lui pour s’en débarrasser. Louise et Simon ont perdu leurs parents dans un accident de voiture. Du moins, c’est ce que l’on apprend.

Très vite, on s’aperçoit que ce dont souffre le plus Simon, c’est de l’absence d’une mère. La manière avec laquelle il regarde la touriste anglaise à qui il a indiqué le chemin des pistes en dit long sur le manque affectif qu’il éprouve.

Sans révéler la teneur du scénario, Simon et Louise cachent un lourd secret familial qui explique la douleur de Simon et les raisons pour lesquelles il en veut tant à sa sœur. Révéler ce secret, ce serait expliquer aussi la distance voire la cruauté que met Louise envers Simon.

La capacité de Meier à diriger des enfants (Kacey Mottet Klein est excellent au passage), à capter leur souffrance, leur manque d’amour rappellent celle de Céline Sciamma dans Tomboy ou d’Hirozaku dans I wish nos vœux secrets. Mais il règne dans L’enfant d’en haut une mélancolie, une tristesse que renforce le refrain lancinant de John Parish, Girl, coécrit avec PJ Harvey.

N’en déplaise à Meier, dans cette chronique douce-amère de deux êtres totalement seuls et livrés à eux-mêmes, le côté fable est beaucoup moins évident (pour ne pas dire absent) que dans Home. Difficile en effet de voir dans l’histoire de L’enfant d’en haut de la poésie ou un échappatoire par l’imaginaire propres à la fable. Tout y parait au contraire profondément terre-à-terre (ce terme n’est pas péjoratif) et crédible. Seule la chute laisse entrevoir une forme d’optimisme alors même que la dernière demi-heure tire en longueur.

Si jusque là, rien n’illuminait cette plaine sinistre et lugubre où vivent Simon et Louise, la chute vient en effet apporter une lueur d’espoir. Un brin de nouveau sous le soleil…

http://www.youtube.com/watch?v=0F__2iC-_ug

Film franco-suisse d’Ursula Meier avec Léa Seydoux, Kacey Mottet Klein (01 heure 37).

Scénario de Gilles Taurand, Antoine Jaccoud, Ursula Meier : 

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Mise en scène :

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Acteurs :

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Dialogues :

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Compositions de John Parish : 

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