Je trouve cette photographie extraordinaire. Certes Lauren Bacall est déjà extraordinaire en elle-même. Son visage incroyable, comme sculpté dans de l’ivoire et dessiné à l’encre de Chine, dans les films en noir et blanc de mon adolescence ; ses sourcils, sa bouche, ses paupières paresseuses. Elle était d’une beauté à couper le souffle. Presque masculine dans la rigueur de ses traits. The Look. Mais cette photo, superbe, frontale, directe, sans pose, sobre dans son écrin noir, nous bouleverse. Justement parce que l’on reconnait les traits si purs qu’on connaissait, et qui sont devenus plus flous. Elle ne sourit pas. Elle ne triche pas. Elle regarde, fermement, simplement, l’objectif. La vérité ici. Oui, Lauren Bacall est une vieille dame. Elle a des rides, de grandes oreilles, des paupières plus lourdes encore. Mais elle fait face. Au temps qui passe, au regard d’autrui. (Et le regard du public sur les actrices… comme il est toujours dur ! ) Elle s’en fout nous dit-elle. Ou peut-être ne s’en fout-elle pas, mais elle est droite dans ses bottes. Je suis Lauren Bacall, j’ai 88 ans, j’ai été glamour, j’ai connu le grand amour, j’ai eu plusieurs vies, elles sont en moi et sur mon visage. Mais surtout elles sont à moi. Je ne vous les dirai pas. Regardez-moi si vous voulez. Je suis comme ça. À prendre ou à laisser. Dans l’univers des stars liftées, botoxées jusqu’à ne plus ressembler à autre chose qu’à leurs clônes, et dans l’univers sucré de tumblr qui voue facilement un culte au jeune et joli, cette image fait du bien. Bravo Lauren Bacall. Je vous trouve très belle.
dehemm:
Lauren Bacall, by Andy Gotts