Un certain nombre de médias français envisagent de violer la loi et d'annoncer des estimations de résultats du premier tour de l’élection présidentielle dès 18H30. Il en va de même pour quelques médias étrangers qui, me semble-t-il, ne sauraient être tenus de respecter, dans leur pays, une loi française.
Invité sur Europe 1, aujourd’hui jeudi 19 avril, Nicolas Sarkozy a déclaré : « Ça ne me choque pas, parce que le monde est devenu un village. Ne recréons pas une ligne Maginot. Nous avons des règles qui parfois sont datées, tout le monde le sait » Comme on l’interrogeait sur les risques d’une influence d'une telle diffusion sur l'issue du scrutin, notre président candidat a répondu : « On ne va quand même pas faire une frontière numérique entre la France et tous les autres pays du monde pour interdire aux autres de communiquer avec la France {…]. Je rappelle que cela existe déjà pour nos compatriotes d'outre-mer, qui sont encore en train de voter alors qu'on a annoncé les résultats ici ».
Il est certain que les déclarations de médias français posent un problème car elles marquent une volonté d’enfreindre la loi. Cettequestion avait été évoquée dès 2007 mais, étonnamment, insouciance ou calcul, aucune démarche législative n’a été entreprise pour apporter une solution à ce problème né du considérable développement de l’Internet.Il est cependant une remarque qui s’impose, ce n’est pas à quelques jours d’une élection prévue depuis cinq ans qu’il est opportun de modifier une modalité de ce scrutin et c’est de surcroît absolument impossible étant donné que le Parlement n’est pas en session et que son mandat est à la veille d’expirer.
La déclaration de Nicolas Sarkozy est, tout à la fois, indécente et inconstitutionnelle. Indécente parce que, étant candidat à cette élection, cela lui interdit de se prononcer sur des règles fixées par la loi. Depuis quand les concurrents d’un jeu en fixent-ils les règles ? Dire « Nous avons des règles qui parfois sont datées » est grotesque. Nous avons une multitude de lois très anciennes et, aussi vieilles soient-elles, elles demeurent applicables tant qu’elles n’ont pas été abrogées, amandées ou remplacées. Déclaration inconstitutionnelle car, malgré ce qu’a pu lui autoriser une majorité de godillots, il n’appartient pas au président de la République de fixer la loi.
Toujours aussi maître de son expression, il profère aussi en terminant une énormité. Il souligne qu’il n’est pas pensable de « faire une frontière numérique entre la France et tous les autres pays du monde » avant de rappeler « que cela existe déjà pour nos compatriotes d'outre-mer ». Questions : Qu’est-ce qui existe déjà, une frontière ? Et où résident nos compatriotes d'outre-mer, dans d’autres pays du monde ?
Espérons que les électeurs auront à cœur de le renvoyer à ses études, pour lui permettre d’achever une formation très insuffisante.