Lundi 9 avril au Grand Journal de Canal+, dans sa tirade sur l’impuissance qu’aurait avouée la gauche dans sa lutte contre le chômage, outre une pique mal ajustée contre Lionel Jospin, Nicolas Sarkozy s’en est pris à François Mitterrand qui aurait dit : ″ le chômage, on n’y peut rien, on a tout essayé ″. On reconnait bien là l’élégance qui est la marque de fabrique de notre monarque, lequel n’hésite pas à faire parler un mort.
En 1993, au cours de la rituelle intervention télévisée du 14 juillet, Paul Amar interrogeait François Mitterrand sur la politique menée par le gouvernement d’Édouard Balladur à l’égard de l’emploi. Celui-ci avait pris dans ce domaine une série de mesures et sa majorité avait alors fustigé une prétendue inaction des gouvernements précédents. Le président avait convenu que les résultats de ces actions avaient été « tristes ». Mais il avait incité à la poursuite de ces efforts, déclarant : « Je dis simplement que l’on a tout essayé et tout ce qu’essaie le gouvernement actuel doit être autant que possible servi. Car il faut de la continuité dans l’effort. Si l’on fixe la conquête de l’emploi et donc la réduction du chômage comme objectif prioritaire, on a raison. Et je n’ai, moi, strictement aucun motif d’incriminer qui que ce soit ».
Ces phrases sont assez différentes du sens que tente de leur prêter notre illustre faussaire. Les propos de François Mitterrand ne visaient aucunement à affirmer que, tout ayant été tenté, il n’y avait qu’à baisser les bras et accepter sans réagir cette situation difficile. Il avait bien au contraire insisté sur la nécessité de considérer la réduction du chômage comme un objectif prioritaire et signifié qu’il ne fallait négliger aucun effort dans ce but. Dans le même temps, il avait fait preuve d’un esprit non partisan dont feraient bien de s’inspirer aujourd’hui ceux qui s’imaginent être, à eux seuls, la France.