En lisant l'édito de Mélanie Thivierge dans le dernier Châtelaine et aussi parce que j'ai écrit une capsule informative sur le sujet dans le Coup de Pouce de septembre dernier, je me suis requestionnée sur le sujet.
Oui, je pense que j'ai de l'ambition. En général. Et des ambitions, j'en ai pas juste une, mille. Celle d'être heureuse, de réussir, d'être indépendante, d'avoir des enfants, d'avoir une carrière, de réaliser mes rêves, etc. (Si on veut parler de réussite, qui touche aussi l'ambition, lisez aussi le texte de Mylen Vigneault sur Yoopa qui nous a écrit "Mes enfants ne sont pas ma réussite." Ça tombe bien, je pense comme elle et cette phrase je l'ai dit souvent... et toujours sans me faire comprendre par les autres.)
Depuis longtemps et même encore aujourd'hui, une femme ambitieuse se fait regarder un peu étrangement. C'est surtout parce que "l'équation boiteuse «avoir de l'ambition = mauvaise mère» est forte dans l'imaginaire collectif". On garde aussi en tête que l'ambition, c'est négatif et agressif. On veut réussir et on est prêt à tout. Mais ce n'est pas cela du tout!
En 1989, lors de la tuerie de la Polytechnique, j'avais 12 ans et je venais de me rendre compte qu'être une fille pouvait déranger. Déranger à un tel point qu'on veuille les éliminer. Ça a été un choc pour moi. J'avais 12 ans, des amis gars, des amis filles. Je réussissais à l'école. J'aimais l'école. Je me voyais à l'université comme elles. Pourquoi ça aurait du énerver les gars? Je ne comprenais pas. En fait, rétrospectivement, je sais que l'ambition de ces filles dérangeait. 23 ans plus, l'ambition féminine dérange encore.
Pourtant, l'ambition n'est pas négative: elle donne du sens à notre vie. C'est un peu grâce à elle qu'on mesure notre équilibre entre qui on est, ce qu'on fait et ce qu'on voudrait être. Elle nous aide à donner une direction à notre vie. Elle devient problématique quand elle sert à épater la galerie, je pense, car elle ne nous est plus utile à nous... Et puis je suis fière de mon ambition car elle va aider mes enfants. Ils auront eu une maman qui n'a pas eu peur de faire plein de choses et qui a réalisé ses rêves. Une maman fatiguée par bout, qui se cours des fois, mais une maman qui leur a aussi montré que tout était possible! Qu'on peut réussir! Qu'il est permis de rêver et d'essayer. Se tromper. Changer. Mais qui est ce qu'elle est en se foutant un peu des conventions et des "qu'en dira-t-on?". J'espère qu'ils feront pareils et qu'ils fonceront.
Ah pis tiens, un peu de mémerages que j'entends à mon sujet...
"Quand tu pars dans les salons du livre, tu fais quoi de tes enfants?": cette phrase, je l'ai entendu des dizaines de fois. Ils ont un papa qui s'en occupent. Je me demande si mes collègues auteurs masculins se font demander cette question. Ont-ils peur que j'aie "oublié" mes enfants?
- "Tu dois t'ennuyer?" Je pense à eux, oui. Je m'ennuie aussi, mais j'ai plein de choses à faire. Je ne me morfonds pas.
- (quand mon Zamoureux et moi les amenons avec nous dans un salon): "Tu les amènes avec toi? C'est du sport?" J'ai choisi d'avoir des enfants dans la vie, c'est pas une "charge" de les avoir avec moi. C'est plus d'organisation, mais c'est loin d'être un fardeau!
Ça me rend aussi mal à l'aise qu'à "boutte" ces commentaires. Mais je me dis aussi que lorsque quelqu'un se sent obligé de me questionner ainsi, , est-ce parce que secrètement cette personne aurait voulu faire la même chose, mais n'a jamais osé? Parce que comme on dit "il faut avoir le courage de ses ambitions". Pas juste les dire, mais les faire. C'est comme tout ceux qui disent "Tu es chanceuse...". Ça n'a tellement rien à voir avec de la chance. (Là, c'est Marie-Julie Gagnon qui parlait de la fameuse "chance". Encore une fois, ses mots sont les miens.)
Mais bon tout ce discours me fait voir qu'être une femme qui mène plein de trucs de front, souvent avec brio, se fasse encore souvent regarder de travers. En 2012. Mais vous savez quoi? Tant pis! Si être ambitieuse, c'est être (Z)imparfaite... moi ça me va tellement! Car je ne voudrais pas être autrement.