Nous n'étions pas à Marseille, hélas, ce samedi magnifique ! Coincés dans le froid au nord de la Loire, nous avons vu à la télévision la belle fête du Prado, et écouté, enthousiasmés, le discours de Mélenchon.
Oh ! Bien sûr, les esprits chagrins nous diront que c'était un discours du passé, une belle utopie, et que la seule "vérité", la seule "modernité" qui vaille consiste à marcher le nez au sol, en recevant sans broncher les coups des sacro-saints "marchés", et en nous contentant, pour toute révolte, de mordre ceux qui marchent à nos côtés, de préférence les plus faibles...
L'esclavage et la bestialité comme nec plus ultra de la modernité !... Quant à l'avenir, c'est devenu un gros mot. Il n'y a plus d'autre futur que la misère et la mort, Saint Nicolas (Sarkosy) et Saint François (Bayrou) nous le répètent assez, avec leur doigt en l'air comme de bons professeurs !
Et puis voilà que ce type, un peu métèque, un peu pied-noir mâtiné d'espagnol et d'italien, nous rappelle que le coeur de l'histoire bat toujours entre les rives de la Méditerranée (et pas forcément à Berlin, Londres ou Washington ! Devant une foule colorée, joyeuse, jeune et enthousiaste, il nous dit que le destin de l'homme n'est pas d'être esclave, que l'être humain n'est pas une "ressource" au service de l'économie, que la vie, l'enfant, l'éducation, la santé sont des droits et pas seulement des "dépenses" à compresser à tout prix ; que le travail peut être une œuvre, avant d'être une torture ; et que l'on peut vivre debout.
Devant une marée de drapeaux rouges, il nous dit que l'étranger n'est pas un ennemi à écraser et à rejeter à la mer, mais un hôte, qui nous fait honneur en venant chez nous, et que nous devons recevoir dignement, parce que le métissage est une chance - la seule chance, à vrai dire, pour l'humanité, de se perpétuer. Et où le dire mieux qu'à Marseille, cette ville fondée par des marins et des commerçants, et née d'un mariage d'amour entre de nouveaux arrivants et ceux du bateau précédent ? Cette ville où toujours ont su cohabiter les immigrés venus de partout, Corses, Juifs, Italiens, Arméniens, Espagnols, Maghrébins, Africains, Commoriens, avant que la droite xénophobe et le fascisme n'ait répandu leur poison...
Ce discours-là, je le savais par cœur avant de l'entendre, parce qu'il a nourri toute ma vie, toute ma culture. Nous l'avons cru mort, perdu, inaudible ; et voilà qu'il réapparaît, au grand dam des réactionnaires de toute obédience ! Il est porté par toute une jeunesse qui n'en peut plus de n'entendre partout que le discours de la soumission, de l'abjection et de la haine !
J'ai un peu l'impression de revenir à la maison...