Pour l’autisme, la HAS propose une prise en charge sur mesure.
En pleine polémique sur le packing ou sur la place de la psychanalyse, la Haute Autorité de Santé a rendu publiques en mars ses recommandations sur la prise en charge de l’autisme.
Comme prévu, ses experts se démarquent de ces deux thérapies et plaident plutôt pour les techniques comportementales, mais sans décerner pour autant à ces dernières un brevet d’efficacité absolue.
Très attendues, les recommandations sur la prise en charge de l’autisme ou autre trouble envahissant du développement viennent d’être publiées. Elles ne décernent a aucun label d’efficacité absolue à quelque technique que ce soit. La prudence de la Haute Autorité de Santé (HAS) témoigne de la difficulté de prise en charge de cette pathologie pas comme les autres et de la nécessité de déminer les polémiques de ces dernières semaines. Mais ça ne l’empèche pas ses experts de définir quatre points de repères majeurs dans la prise en charge de l’autisme.
En premier lieu, les recos mettent en avant la nécessité d’une prise en charge précoce. «Il est recommandé de débuter, avant l’âge de 4 ans et dans les 3 mois qui suivent le diagnostic», une prise en charge fondée sur «une approche éducative, comportementale et développementale, qu’il y ait ou non un retard mental associé», indique la HAS. Toutefois, faut il encore que cette recommandation soit assortie de moyens financiers et humains, précise le Pr Philippe Evrard (président du comité de pilotage des recommandations, neuropédiatre, Paris). Aujourd’hui, un tiers des enfants reçoit à temps et en service spécialisé la prise en charge nécessaire. Le diagnostic pourra-t-il être fait en temps voulu, alors qu’il faut entre 6 et 18 mois pour avoir une chance d’être examiné par les spécialistes, s’interroge-t-il ? A défaut de garanties pour l’instant, il est toujours permis d’y croire. C’est en tout cas la philosophie du président de la HAS : «on peut espérer que le troisième plan autisme s’appuiera sur ces recommandations et donnera les moyens nécessaires à leur mise en oeuvre», lance Jean-Luc Harousseau.
Deuxième point : la prise en charge doit être personnalisée, car «chaque enfant atteint est particulier, avec des symptômes qui lui sont spécifiques, et se trouve dans un contexte particulier» indique Jean-Luc Harrousseau. Troisièmement, la prise en charge ne doit jamais être imposée, mais proposée. Une façon pour la HAS de prendre un peu de champ par rapport aux très vives polémiques entre pro et anti-psychanalyse, tenants et adversaires du packing…
Psychanalyse et packing renvoyés dos à dos !
D’ailleurs, pour la HAS, il ne doit jamais y avoir de prise en charge exclusive. Tous les acteurs doivent être associés, tant médico-sociaux, que l’école, les parents, etc. « Le psychiatre garde une place essentielle pour coordonner et évaluer les troubles, les psychologies et éducateurs évaluent les progrès réalisées ou non, le pédiatre ou le généraliste assurent le suivi somatique : en sachant que l’épilepsie, les douleurs dentaires sont souvent mal traitées chez ces enfants et peuvent exacerber leurs troubles, et que, par ailleurs, les troubles du sommeil et de l’alimentation sont fréquents », souligne Philippe Evrard.
On retiendra aussi de ces Recos tant attendues de la HAS que le traitement idéal reste à inventer. « N’oublions pas que l’on ne sait pas guérir de l’autisme aujourd’hui, martèle le Dr Cédric Grouchka (HAS). Toutefois, il existe des moyens pour améliorer les symptômes, le QI, les troubles de la communication, du comportement, pour certes, seulement la moitié des enfants », poursuit-il.
Cela passe en premier lieu par des méthodes comportementales validées et très spécifiques que privilégient, comme prévu, la HAS et l’ANESM dans leurs recommandations. Mais avec la prudence d’usage: « aucune intervention ne permet de supprimer la totalité des troubles et aucune exclusivité dans l’intervention ne peut améliorer l’état de l’enfant », lance, comme message d’alerte aux familles, Cédric Grouchka. Si une intervention mono-professionnelle est proposée, les parents doivent donc la refuser catégoriquement.
Circonspection également concernant les traitements pharmacologiques: pour la HAS, ils sont envisageables, mais ne seront utilisés qu’en seconde intention, et seulement pour traiter les comorbidités : trouble d’hyperactivité, anxiété, dépression, épilepsie…
Quant aux sujets qui fâchent – à savoir la prise en charge psychanalytique et le recours au packing – elles ne figurent pas parmi les méthodes recommandées. « Elles sont non consensuelles », tranche Jean Luc Harousseau. Façon soft de signifier qu’elles ne font pas l’objet d’un consensus, étant donné que certains psychiatres sont pour et d’autres contre. Par ailleurs, elles pêchent aussi par leur insuffisance d’évaluation. Elles n’ont pas fait la preuve de leur efficacité, aucune étude ne s’étant intéressée à évaluer leur intérêt dans l’autisme. Les recos ne les retiennent donc pas. «Les psychiatres sont des médecins comme les autres, ils doivent se soumettre aux règles d’évaluation», a déclaré le Pr Jean-Luc Harousseau lors de la présentation du rapport. «Les psychiatres doivent se remettre en question», a-t-il répété, notant que, «plus de 30 ans après leur introduction», les approches psychanalytiques n’ont pas fait la preuve de leur pertinence dans ce domaine.
En ce qui concerne le packing (qui consiste à envelopper de linges humides certains enfants autistes), le niet est plus ferme encore. La HAS et l’ANESM sont formellement opposées à son utilisation en dehors de travaux de recherche. A ce sujet, une étude clinique est en cours, coordonnée par le Pr Pierre Delion (Lille), afin d’évaluer son intérêt dans l’autisme. Mais elle se heurte à des difficultés de recrutement.
Preuve supplémentaire que cette technique est un véritable repoussoir pour les familles.
Références: Charlotte Demarti, legeneraliste.fr, parents d’enfants autistes déçus de la psychanalyse