Posted in Changer de vie
Pourquoi perdre son temps à courir partout ?
Les yeux rivés sur le compteur, le nez dans le guidon, il faut foncer, coûte que coûte, chaque minute compte ! Il faut produire, consommer, jouir au maximum de la vie... jusqu’à en mourir ? Avec « Il a eu une vie bien remplie » comme épitaphe ?
Je suis bien placé pour en parler. Hyperactif depuis longtemps, je ne m’arrête jamais. Mes nombreux projets et ambitions m’ont fait dévorer tous les livres de « développement personnel », en particulier ceux sur la productivité. J’ai même été jusqu’à optimiser mon temps de sommeil et à ne dormir plus que deux heures par jour (c’est le sommeil polyphasique, pour les curieux) !
Pourtant, une fois ma vie parfaitement optimisée et pleine d’activités, mon temps ne s’est pas ralenti, bien au contraire. Il s’est encore accéléré, toujours plus vite, toujours plus rapide ! L’effet contraire à celui recherché… Aujourd’hui, à presque 30 ans, je ne peux que constater, impuissant, que ma vie continue à filer entre mes doigts.
« Mais les journées sont super longues ! »
En quelques mots, Gabrielle m’a étalé d’un véritable uppercut verbal. Mais comment fait-elle pour trouver le temps long ? A une époque où tout s’accélère, où la Terre rapetisse jour après jour... elle vit dans une grotte ou quoi ? Quelle est donc sa potion magique, avec bave de crapaud et viscères de vipère ?
« On a fait le choix de ne pas travailler beaucoup, mais d’avoir du temps libre »
Laure et Gabrielle travaillent peu, partagent un mi-temps à deux. Gabrielle est psychologue en hôpital, deux jours par semaine. Le reste du temps (et ça en fait, du temps), et bien… c’est de la liberté. Et pas question de se surcharger, de « combler le vide » du temps par des activités diverses et variées.
« Avec tout ce temps, on vit, on se balade, on cuisine, on dort –parfois 10h par jour !- on bricole et jardine, on lit et surtout…on glande ! »
OK, mais avec quel argent ?
Avec moins de 500€ de dépenses par mois, elles ont fait le choix de ne pas « perdre leur vie à la gagner ». Ce slogan, beaucoup en parlent, mais combien le vivent vraiment? Avec 1 000€ par mois de revenus, elles vivent même très bien, merci pour elles. Cela leur permet de profiter du temps, un luxe devenu rare.
Comment font-elles ?
Rien ne les prédisposait pourtant à tenter l’aventure de la Simplicité Volontaire. Il y a peu, elles étaient vraiment « comme tout le monde » : appartement à Lyon, télé, voiture, congélateur, toilettes « mouillées »...
C’est un article sur Serge Latouche dans « Politis » qui déclenche tout. Pour 3.50€, elles achètent puis dévorent son livre, « Petit traité de la décroissance sereine ». Puis le journal « La Décroissance » « nous a aidées à comprendre le lien entre nos actes quotidiens et leurs conséquences, sur la planète et sur la société, ici et ailleurs. On s’est dit : Enfin ! Nous ne sommes pas les seules à penser comme ça ! »
« On a commencé à se poser des questions, les bonnes questions : Le progrès technique, ok, mais pour quoi faire ? Est-ce que les gens sont plus heureux ainsi ? »
« On a aussi déménagé ici, à 15km de Lyon, dans cette maison de 50m². C’est largement suffisant pour nous deux. Et c’est bien plus écolo que de faire construire un pavillon HQE quelque part en banlieue ! »
Suite au déménagement, on a voulu se débarrasser de notre télé. Pourtant, Laure était alors une vraie accro : « Je l’allumais, je restais scotchée, je zappais bêtement, je mangeais devant... Ne plus avoir la télé, ça fait un bien fou. On n’avait pas envie d’arranger notre salon autour d’un écran ».
« On a remplacé nos toilettes par des toilettes sèches, viré le congélateur. On chauffe très peu, à 13°C. L’hiver, on met un pull, c’est la révolution ! Résultat, notre frigo peut aussi rester éteint. »
« La voiture, ça a été le plus difficile à virer. Dans ma famille, on est très « voiture ». Je faisais encore 15 000km par an avant de m’en débarrasser. Mais finalement on l’a revendue, ça a été une super libération. Ici on n’est pas loin de Lyon, il ne faut que 45min pour y aller en vélo. Pour partir en vacances, on prend le train. On est aussi devenues accro aux voyages en vélo. »
Laure ajoute : « A l’inverse, ma mère a beaucoup d’argent. Elle est entourée de plein d’objets, mais elle vit seule. Et au final elle est malheureuse. C’est peut-être par soif de revanche sociale : elle est née pauvre, fille de mineur et ainée de neuf enfants. Résultat, la télé remplace les amis… et quand on va la voir, on se sent vite agressées par la télé criarde, les pubs outrancières etc. »
Laure et Gabrielle, un bel exemple de joie de vivre… partagée !