C’est donc en faisant de savants calculs et des prédictions tout à fait aléatoires que j’ai établi une liste de priorités, en haut de laquelle s’est vite trouvé Perfect Sense, pour la simple et bonne raison que toutes les salles le programmant lors de sa seconde semaine d’exploitation annonçaient qu’elles ne le joueraient plus le mercredi suivant (tout de suite, ça pose la priorité…). C’était donc maintenant ou jamais (il s’avérera pourtant plus tard que l’UGC Orient Express a récupéré une copie du film pour maintenir l’exploitation du long-métrage en vie quelques jours de plus sur Paris). Si Perfect Sense faisait partie des films que je ne voulais pas rater, c’est parce que j’avais vu il y a quelques années un précédent film du réalisateur David MacKenzie intitulé My name is Hallam Foe (qui avait fini 11ème dans mon Top 20 des Meilleurs films de l’année 2008), et que j’avais bon espoir que ce nouveau long-métrage puisse être aussi fascinant, mélancolique et sensuel que son grand frère.
Le mystère est là, l’amertume évidente avec cette ambiance apocalyptique, et la sensualité est omniprésente dans ce jeu de séduction puis cet amour consommé par les personnages incarnés par Ewan McGregor et Eva Green. Pouvait-on rêver couple plus sensuel ? La beauté de la comédienne française est si troublante qu’elle provoquait une déconcentration régulière tout au long du film. Pourtant j’avais déjà largement de quoi me déconcentrer dans la salle, avec un couple de spectateur des plus atypiques juste devant moi. Lui avait enfilé un casque rappelant ceux des chantiers pour couvrir le bruit après avoir forcé sa compagne à s’asseoir près de l’écran, au 6ème rang, malgré les protestations de celle qui aurait à l’évidence préférer se placer quelques rangs plus haut.
Alors que la salle s’éteignit et que le film commença, lui se leva brusquement, marmonnant quelque chose dans sa barbe, faisant signe à sa compagne de le suivre, et allant se carrer les fesses un rang plus près encore. Trouvait-il qu’ils étaient assis trop loin ? Était-il déranger par le couple assis sur le même rang qu’eux et dont la femme n’avait pas encore fini de jouer avec son smart phone ? Sa compagne le laissa en tout cas s’avancer seul, refusant de le suivre encore plus près de l’écran, à la grande surprise du casqué qui ne comprenait pas pourquoi. Elle le rejoignit tout de même, une quarantaine de minutes plus tard… Mais lui, contre toute attente, à vingt minutes de la fin du film, se leva et se dirigea vers la sortie… il partit en laissant sa compagne derrière lui, elle qui resta jusqu’au bout. Il fallait le voir, presque rampant au pied de l’écran pour ne pas gêner les autres spectateurs alors qu’il aurait fait une tête de plus en marchant sur des échasses qu’il n’aurait nullement masqué l’écran. Un petit excès de prévention qui en dit long sur le spectateur qu’il est (un bon, laissez-moi vous le dire ! et amusant de surcroit).
Il y avait bien matière à nouer un drame amer, beau, déchirant dans ce Perfect Sense, et les regrets sont là… pourtant certaines images, et cette musique, et ces corps amoureux d’Ewan McGregor et Eva Green seront difficiles à oublier. L’impression n’est pas aussi forte qu’à la sortie de My name is Hallam Foe, mais la patte du réalisateur est palpable, entre mystère, mélancolie et sensualité. Et en parlant de mystère, qui diable avait reconnu la danoise Connie Nielsen dans le rôle de la sœur d’Eva Green ? L’actrice de Rushmore, Mission to Mars et Demonlover y est méconnaissable… (seul son nom au générique de fin m’a fait prendre conscience de sa présence !)