Cette étude publiée dans l'édition du 8 avril dans la revue Human Reproduction, montre, pour la première fois l'effet des phtalates sur le système reproducteur de l'Homme et ici sur des testicules d'adultes humains exposés à la substance in vitro. Résultat, 30 % de moins de testostérone produite que par des testicules non exposés. Et qui dit moins de testostérone dit moins de spermatozoïde et risque d'infertilité. Conduite par une équipe de l'Inserm, cette nouvelle étude ne manquera pas d'interpeler les institutions sanitaires.
Dans un contexte de baisse de la fertilité, rappelle le communiqué de l'Inserm, de nombreuses recherches sont en cours sur l'impact des substances toxiques sur les mécanismes fondamentaux de la gamétogenèse fœtale et sur les réponses cellulaires et moléculaires aux génotoxiques. Les perturbateurs endocriniens, dont les phtalates produisent des effets œstrogéniques et interfèrent avec le système hormonal. Ils peuvent ainsi induire des altérations du système endocrinien, avec un impact sur la fonction de reproduction, voire la descendance. Or les phtalates sont partout, largement utilisés dans les produits de consommation allant des jouets en plastique, des matériaux de construction, aux shampooings et sont déjà connus pour perturber le système endocrinien. De nombreuses études ont déjà démontré leurs effets délétères sur le rat, des anomalies de l'appareil uro-génital et une baisse de la testostérone chez le fœtus.
Mais l'impact des phtalates sur la production de testostérone restait controversé. Une unité de recherche de l'Inserm-CEA- Université Paris Diderot avait déjà montré en 2008 montré que ces produits réduisent le nombre des cellules germinales fœtales mais pas la production de testostérone. Cette nouvelle étude de l'Inserm montre que les phtalates altèrent aussi la production de testostérone chez l'homme adulte.
L'exposition à une dose « normale » entraîne une réduction de 30% de la testostérone : Lorsque les chercheurs cultivent des testicules d'adultes et les exposent à 2 phtalates, DEHP et MEHP, ils constatent que cette exposition entraine une réduction de 30 % de la production de testostérone par rapport à des testicules non exposés. Comme seule une petite fraction des phtalates ajoutés est retrouvée dans les explants testiculaires, et que ces composés sont alors métabolisés, les chercheurs estiment que les effets anti-androgéniques observés se produisent dès des concentrations de phtalates équivalentes à celles retrouvées en cas d'exposition « normale ». Bernard Jégou, responsable de l'étude et directeur de l'unité de recherche confirme : « Dans les testicules humains adultes, le DEHP est métabolisé en produit actif dont le MEHP et le 50H-MEHP qui ont des effets directs sur la production de testostérone ».
Cette étude qui ajoute aux preuves déjà obtenues sur chez l'animal, par de nouvelles données portant cette fois directement sur le système reproducteur masculin, doit interpeler les institutions sur de nouvelles restrictions d'usage des phtalates de manière à réduire les niveaux d'exposition inévitables au quotidien. De nouvelles interdictions qui impliquent le développement et des essais d'innocuité de nouveaux matériaux de substitution innovants, comme dans le cas du bisphénol A.
Source: Communiqué Inserm et Human Reproduction 2012 March 8 doi: 10.1093/humrep/des069 Human testis steroidogenesis is inhibited by phthalates.
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