Lors de l’expédition Santo, dans l’archipel du Vanuatu (Pacifique), des chercheurs du Muséum d’histoire naturelle de Paris et de l’IRD (Institut de recherche pour le développement) ont découvert de nouvelles espèces de mammifères appartenant à un ordre méconnu et que l’on pensait éteint, les Rhinogrades. Trois nouvelles espèces sont présentées dans une exposition à la Grande galerie de l’évolution du Muséum du 1er avril au 31 mai 2012.
La caractéristique des Rhinogrades est leur nez très développé. Grâce à une remarquable diversité d’adaptation, leur nez est bien plus qu’un organe olfactif : il peut servir à la marche, au saut ou, au vol. Cependant, c’est dans des échantillons de bois ramenés de l’île d’Espiritu Santo, que le botaniste Jean-Noël Labat a découvert sept spécimens au nez en forme de foret –ou mèche à bois. Ils appartiennent à un nouveau genre de Rhinogrades appelé Nasoperforator.
«C’est la première fois que nous trouvons un mammifère, et même un vertébré capable de forer à l’aide d’un mouvement rotatif», explique Guillaume Lecointre, du Muséum.«La tête de l’animal est renforcée, son cou inexistant. Le tronc peut tourner à 180° et ensuite lorsque les membres antérieurs se bloquent les membres postérieurs les rattrapent. Tout le corps, et en particulier la colonne vertébrale robuste et souple à la fois, sont en quelque sorte investis dans la fonction rotative capable de transférer toute la force de l’animal dans son nez ».
Autre originalité du Nasoperforator : «c’est le premier mammifère xylophage, c’est-à-dire mangeur du bois!» poursuit le chercheur. «Les copeaux de bois sont naturellement orientés vers la bouche. L’animal possède dans son tube digestif des micro-organismes capables de digérer les composants chimiques complexes du bois. On connaît déjà bien ce genre de symbioses chez les insectes xylophages ; il est intéressant de constater qu’elle s’est produite aussi chez les mammifères ».
L’Otopteryx volitans est l’un des Rhinogrades décrit dans l’ouvrage du Pr Stümpke. (MNHN)
Les nouveaux spécimens sont présentés naturalisés, aux côtés d’autres Rhinogrades qui ont été découverts lors des travaux de rénovation de la Grande galerie. Cet ordre de mammifère a été décrit pour la première fois dans les années 60 par le Pr Harald Stümpke (Allemagne). Mais ces animaux étaient classés avec les espèces disparues; l’atoll du Pacifique sur lequel ils vivaient a en effet disparu, comme l’expliquent les Pr Lecointre et Jullien dans la vidéo réalisée par le Muséum. A l’occasion de l’exposition l’ouvrage de Harald Stümpke est réédité et actualisé (1).
«Il est important pour un musée comme le nôtre d’être capable de sortir de ses collections des pièces qui suscitent l’émerveillement, commmente Guillaume Lecointre. Cela permet au public de réaliser que nous n’avons pas tout découvert, que nous continuons à découvrir de nouvelles espèces».
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