Il était une fois Mohammed Boudiaf...

Publié le 05 août 2007 par Naravas


Il était une fois…l’homme des ruptures

Le combat de cet homme ne se résume pas sur un blog. Nous nous contenterons de saisir trois moments terribles de sa trajectoire, indéfectiblement liée à l’histoire contemporaine de l’Algérie, et trois ruptures que l’homme a incarnées, portées et fait vivre : 

Rupture avec l’ordre colonial :

Le 15 et 16 février 1947, un homme âgé de 28 ans, natif de M’sila, adhérent du PPA (Parti du Peuple Algérien), écoeuré par les massacres de mai 1945, décide de donner toute son énergie pour organiser l’action directe contre le régime colonial, dans le cadre de l’O.S (l’Organisation Spéciale) qui venait d’être créée.

Le 23 mars 1954, avec la participation des membres du Bureau central du PPA-MTLD, Mohammed Boudiaf participe à la fondation du CRUA (Comité Révolutionnaire pour l’Unité et l’Action) qui appela en vain à l’unité des messalistes et des centristes au sein du PPA-MTLD.

Mais le moment crucial fut le 26 juin 1954, quand Boudiaf, Ben Boulaïd et Didouche décident d’enterrer le légalisme et les querelles messalistes du MTLD et de passer à l’action directe en faisant appel aux anciens de l’OS. C’est la célèbre "Réunion des 22" qui décida le déclenchement immédiat de la Révolution et désigna Boudiaf comme chef national chargé d’organiser et de coordonner le mouvement insurrectionnel. Celui-ci choisit comme collaborateurs Ben Boulaïd, Ben M’hidi, Didouche et Bitat. La Révolution et la République algériennes sont nées. 

Le groupe, élargi, tint une dernière réunion le 23 octobre 1954 où furent notamment arrêtés  l’heure du déclenchement et les éternels sigles FLN et ALN.

Rupture avec la dictature de Boumédiène :

Déclencheur de la Révolution, fondateur et premier à rejoindre le FLN, Boudiaf fut le premier aussi à le quitter. Quand l’émissaire de Boumédiène, qui n’est autre qu’un certain Abdelaziz Bouteflika, est venu en prison proposer à Boudiaf un coup d’état en secret, l’homme intègre le rabroua violemment et demanda des sanctions contre ce pyromane turbulent. Malheureusement, un autre chef historique, Ben Bella, accepta l’offre et prit militairement le pouvoir pendant l’été 1962 en faisant massacrer près de 2000 Algériens.

Boudiaf démissionne du FLN le 22 septembre 1962 en s’opposant à l'usupation du pouvoir par l’alliance Ben Bella- Boumédiène. Il tente de créer un parti d’opposition mais, suprême ironie, il fut emprisonné, lui, le Père de la Révolution.

Double rupture avec le système et l’islamisme :

Le 16 janvier 1992, à l’aéroport d’Alger, fut reçu un « historique », exilé au Maroc, inconnu des populations illettrées, appelé au chevet d’un Algérie malade. En 166 jours, il trace dans un verbe ciselé, franc, clair et rassembleur, le projet d’une Algérie démocratique. Restaurer l'autorité de l'état, achever le terrorisme islamiste et l'intrumentamisation de la religion,  jeter les bases d’un système démocratique, rétablir la confiance avec les gouvernés, s’attaquer à la corruption, refonder l’école sinistrée, retour à la légitimité des urnes, bref, jeter de nouveau --comme en 1954--  les bases d’un état moderne,  tels furent les thèmes du discours de celui qui fut placé à la tête du Haut-Comité d’Etat.

Le 29 juin 1992, il y a de cela 15 ans, après six mois d'un rêve de modernité, l’Algérie fut endeuillée par un clan de la mafia politico-financière : Mohammed Boudiaf tombe à Annaba sous les balles assassines de M’Barek Boumarafi, enfant de ce pays que ce Père de la Révolution a créé.

Maintenant, repose-toi Mass Boudhiaf !

Liens :

Boudiaf raconté par Annie Rey Goldzeiguer
Boudiaf raconté par Rédha Malek