Exilé d’Egypte dans sa jeunesse, renié par son père, Claude François n’a qu’un rêve : être le meilleur, en haut de l’affiche musicale de son époque. Et quelle époque ! Celle de Salut les Copains et autres Johnny. La concurrence est rude et François n’aura de cesse de se renouveler et de mettre la pression sur tout le monde, lui en premier pour arriver à ses fins.
Réaliser un biopic est de manière générale un travail colossal et difficile. C’est très facile de foncer dans le mur. Et choisir Claude François comme sujet en rajoute une couche. Cet être impitoyable dans la vie, sur scène et en amour a tellement de facettes qu’il faut savoir doser pour éviter de partir dans tous les sens. Pour le coup, Florent Emilio Siri réussit à éviter les pièges en livrant une histoire passionnante et riche, sans jamais tomber dans la facilité de s’arrêter aux paillettes qui entourent Claude François.
Le personnage, bien qu’antipathique au possible sur bien des plans, révèle des failles qui vont l’influencer dans toute sa carrière. La première : la reconnaissance paternelle qu’il n’aura jamais. La seconde : un égo surdimensionné et une rigueur exacerbée. Complétement tiraillé entre le contrôle intégral de ce (et ceux) qui l’entoure et la générosité qu’il garde néanmoins envers ses fans, Claude François est un personnage qui passionne autant qu’il dégoûte.
Véritable businessman, l’artiste tire son inspiration des USA, de la Motown et de ses musiciens qu’il reprend en français, du disco et des paillettes, mais pas seulement. Il est sans doute un des premiers à amener le show à l’américaine sur nos terres, avec ses Clodettes et le star système. Il se sert des médias comme personne, achète même un magazine populaire de l’époque (sorte de Star Club des 60s) afin de maîtriser son image (presque) totalement. Il cache un de ses enfants au grand public. Bref, c’est une sorte de Madonna avant l’heure !
Et pour y arriver, il n’y va pas par quatre chemins. Il se donne à fond sur scène, se laisse approcher par les fans mais surtout met une pression d’enfer sur tout son entourage. Ce n’est jamais assez bien, assez grand… jamais assez. L’homme se perd dans le personnage médiatique et se laisse dévorer par le monde qu’il s’est créé. Il est entouré par plein de fans mais reste finalement seul. Et c’est là que le réalisateur entre en scène…
Avec ce film, Florent Emilio Siri dévoile avec finesse l’homme derrière les paillettes. Il n’épargne rien à Claude François. En le suivant de très près, il écorne cette légende souriante en le dépeignant avec tous ses défauts, sans jamais le mettre sur un piédestal. On a presque l’impression de le suivre vraiment par moment, ce qui est plutôt déroutant, il faut bien le dire. L’image est sublime, les décors sont réussis et le travail de maquillage est impressionnant.
Mais cela n’aurait pas été suffisant s’il n’y avait pas eu l’acteur belge Jérémie Rénier. Sa performance a déjà été saluée par de nombreuses critiques et pour cause, on oublie très vite qu’il ne s’agit que d’un acteur et on a bien des fois du mal à les différencier. (Mention spéciale pour la scène du « Mal Aimé » qui ressemble à s’y méprendre à des images d’archive – Oui Toute Ouïe doit avouer avoir passé son enfance à regarder des vieilles VHS de Claude François pendant des heures !).
Jémérie Rénier est également soutenu par un Benoît Magimel méconnaissable en Paul Lederman, la très belle Joséphine Japy en France Gall, ou encore Monica Scattini campant la mère de Claude François.
Bref, Cloclo est un petit bijou. Même s’il faut avouer que la scène de la douche avec tout ce suspense interminable n’était pas très nécessaire, mais si ce n’est que ça, ce n’est pas bien grave ! Car comme on dit, l’important c’est le voyage et non la destination ! On a suivi Claude François dans son ascension jusqu’à sa chute accidentelle et on a passé un excellent moment de cinéma.
Et toi, tu l’as vu ?