Thierry Wellhoff : « Les valeurs ne font pas un candidat, elles engagent un Président »

Publié le 10 avril 2012 par Delits

En ces temps de crise où les mots « promesses » et « espoirs » ont cédé la place au « réalisme » et à la « résignation », les candidats ont fait le choix de déplacer le débat sur le terrain des valeurs, piliers réputés inamovibles d’un courant de pensées, ou d’une famille politique. Thierry Wellhoff, Président fondateur de l’agence Wellcom, a récemment publié un première étude sur les valeurs des hommes politiques, et en particulier celles des candidats à l’élection présidentielle. Pour cette agence spécialisée des questions de valeurs dans l’univers corporate c’était une première.

A quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, Délits d’opinion a tenté d’en savoir plus sur ces valeurs, si haut portées par les candidats. A mi-chemin entre héritage d’une tradition idéologique et outil de marketing politique, les valeurs, mais surtout ce(ux) qu’elles engagent, sont une clef du scrutin et un engagement pris face aux Français.

Délits d’Opinion : Sur le plan des valeurs, avez-vus le sentiment que les principaux candidats sont en ligne avec les valeurs de leur famille politique ?

Thierry Wellhoff :  » Notre étude s’est focalisée notamment sur le profil des deux principaux candidats. Le premier constat porte sur le candidat Sarkozy dont les valeurs citées spontanément sont très proches de celles citées pour la droite : il est donc en ligne par rapport à l’idée que se font les Français des partis de droite. A l’inverse, les valeurs qui sont attribuées au candidat François Hollande ne sont pas exactement celles de la gauche selon notre échantillon. Ces éléments confirment bien qu’il existe un léger décalage entre François Hollande et l’idée que les Français se font de la Gauche. A titre d’exemple, la valeur solidarité est cité comme étant un des piliers des valeurs de Gauche alors qu’elle est attribuée seulement faiblement à François Hollande. On retrouve le même décalage sur la « valeur » écologie, perçue comme valeur de Gauche par 40% des Français mais rattachée à François Hollande que par 13% d’entre eux ».

Délits d’Opinion : Au regard de votre étude, François Bayrou incarne t-il des valeurs de droite ou de gauche ?

Thierry Wellhoff :  » Celui pourrait faire pencher l’élection a connu une trajectoire très particulière depuis quelques années au point qu’aujourd’hui il est difficile de le positionner comme un allié potentiel pour un grand candidat. Notre étude permet cependant d’éclaircir son positionnement perçu par les Français sur le plan des valeurs. En effet, nos résultats démontre que le choix des dix valeurs clefs les plus proches de Bayrou sont majoritairement de Gauche. On citera notamment l’humanisme et la démocratie, valeurs de Gauche selon notre échantillon, et qui arrivent dans le Top 5 des valeurs que les Français relient à François Bayrou. Ces éléments permettent d’imaginer un accord « idéologique » sans doute plus faisable avec Hollande qu’avec Sarkozy ».

Délits d’Opinion : Sur le plan des valeurs, quels liens peut-on identifier entre les celles de Marine Le Pen et de Nicolas Sarkozy ?

Thierry Wellhoff : « Les deux principaux candidats de droite partagent les dix mêmes valeurs aux yeux des Français. Si ce n’est pas dans le même ordre, ces indications confirment la proximité de perception de la part des Français entre les candidats de l’UMP et du Front National. On note par exemple une différence de hiérarchie sur la question du patriotisme où Marine Le Pen superforme à l’inverse de la notion de « performance » où c’est Sarkozy qui semble mieux l’incarner. Clairement, notre étude fait la démonstration que l’existence de valeurs fortes liées à une marque, ici un parti et une famille politique, sont autant d’atouts qui permettent de cliver et d’émerger auprès de certains électorats. Ces lignes de forces structurent ensuite le discours et renforcent la cohérence  tout au long de la campagne et au-delà ».

Délits d’Opinion : Dans quelle mesure les valeurs sont-elles en mesure d’influer sur le choix des urnes ?

Thierry Wellhoff : « Ce qui est certain c’est que l’élection de 2012 ne permettra pas au candidat élu de bénéficier de marges de manoeuvres importantes. Aussi, les valeurs aujourd’hui défendues par les candidats vont trouver une application directe dans la conduite des affaires. Il s’agira donc de voir si les Français, et en particulier les hésitants, ont préféré mettre l’accent sur la ré-assurance (sécurité, patriotisme) ou sur la générosité (humanisme, solidarité, fraternité).

En réalité on ne vote pas pour une somme de valeurs mais plutôt pour le candidat et sa capacité à démontrer qu’il entend être cohérent et défendre les valeurs qu’il défend. Au-delé des programmes et des projets qui, pour Hollande et Sarkozy, ne se différencient pas de manière très forte, les valeurs sont les lignes de fonds qui structurent la société et peuvent faire pencher l’élection à condition que les leaders parviennent à convaincre les citoyens de leur cohérence.

Retrouvez ici le communiqué de presse de l’agence Wellcom