Si tu as Free, t’as rien compris…

Publié le 09 avril 2012 par Mister Gdec

Il n’y a pas si longtemps, je me souviens avoir lu ici et là que le patron de Free serait de gauche, que ce soit à l’occasion du rachat du Monde ou de l’obtention de la quatrième licence 3G par Free, et son offre qui en son temps a cassé la baraque… au point que plusieurs centaines de milliers de personnes émigrent pour une offre apparemment plus avantageuse. C’est leur choix.

Je n’ai pas fait partie de ceux-là, plus prudent quant à moi, attendant de voir ce que cela allait donner, et j’en suis fort satisfait : soucis techniques caractérisés, menace d’Orange de ne plus porter le réseau, attaque judiciaire d’autres opérateurs… et aujourd’hui cette affaire de pratiques managériales et de gestion du personnelle particulièrement choquante. Si c’est cela être de gauche, alors… je n’en suis pas. Voici quelques témoignages de salariés (et d’ex) :

A chaque petit écart, ses supérieurs sont impitoyables. Un retard de quelques minutes, une attitude qui déplaît,… tout est prétexte pour mettre fin à une période d’essai. Pire, les renvois ont lieu aux yeux de tous

Je suis repartie à mon poste de travail suivie de mon responsable dans le dos, qui m’a dit qu’il fallait à tout prix que je lui rende publiquement tous mes effets : mon badge, mon casque… Et il m’a reconduit jusqu’à la porte, devant tout le monde

C’est un terrorisme managérial“, accuse même un délégué CFDT. “On a jamais vu ça dans l’histoire du groupe

Free a bien  tenté de calmer le jeu en renvoyant la directrice du principal centre d’appel concerné par l’un de ces témoignages. Mais « Bernard Alain, le responsable télécoms de Force Ouvrière, affirme que le syndicat a entendu le même type de témoignages “sur d’autres sites Free“. “Le dialogue social dans cette entreprise est à l’image de sa démarche commerciale, c’est-à-dire très originale“, accuse-t-il. » (source). Free ne s’est d’ailleurs même pas soucié de contester les méthodes de licenciement pourtant si moralement contestables… et ne s’en est nullement excusé. Des soucis d’ordre sociaux pourraient donc bien accompagner les soucis techniques du groupe puisqu’une grève serait en préparation, et pas seulement en France, puisque les pratiques de Free posent question aux syndicats marocains également, comme vous pouvez le constater en cliquant sur le lien…

Avant que ce scandale n’éclate, Acrimed s’attaquait déjà à « l’image – coproduite par les médias – que le patron de Free veut donner de lui-même et de son entreprise», en titrant l’un de ces billets : Xavier Niel, le « capitalisme cool » à l’assaut des médias (2) : un patron comme un autre. Je vous invite à lire non seulement celui-ci mais celui qui le précédait pour avoir un panorama complet du pédigree et de la logique de l’empire Niel… et de ce patron dit « de gauche »… Où l’on se remet en mémoire le fait qu’un ancien patron de Libération, Vittorio de Filippis, a été emmené menotté au petit matin d’un jour de novembre 2008 suite à une plainte en diffamation du procédurier et  honorable Monsieur Niel, auquel il convient de ne surtout pas s’attaquer, même quand on dit la vérité, pour ne pas avoir d’ennuis avec la justice. Car selon que tu seras puissant ou misérable…

Est-ce de cette gauche là dont la France a besoin ? Aussi, quand on me demande de voter pour Hollande, et cette “gauche” qui n’a guère de répugnance semble-t-il à tolérer ce genre d’individus, comme elle a tant encensé ceux qui en représentent les intérêts, à l’image de ce candidat dit de gauche que fut DSK en son temps (les mêmes qui aujourd’hui entourent le candidat du PS, justement…),  et pour cette logique libérale qui a tant fait pour que certains abandonnent la gauche au point de même douter qu’il y en ait encore une jusqu’à il y a peu, j’avoue n’avoir guère de sentiment de culpabilité à renoncer à l’art si éloquent mais pourtant si pathologiquement schizophrène du vote utile… Pour qui ?

De même, quand j’entends et lis que Eric Coquerel a réaffirmé aujourd’hui sur RTL face à l’antipathique Aphatie qu’en l’état, le programme du Front de gauche était “incompatible” avec celui de François Hollande, et qu’il ne devrait donc pas y avoir “de participation au gouvernement”, “ni des communistes, ni du Front de gauche” en général, j’ en suis ma foi satisfait, quitte à en scandaliser quelques uns.

François Hollande propose une politique qui en 2013 vise à réduire les déficits à 3 %, ça fait 54 milliards d’économie. Nous estimons qu’on ne fait pas une politique de gauche avec ça. François Hollande nous dit aujourd’hui « c’est à prendre ou à laisser , on se rassemblera au second tour autour de mon programme » donc dans ce cas, on laissera”.

Quelle différence y a-t-il en effet entre cette orientation de politique économique et celle que peut prôner par exemple un Kessler, dont on sait l’influence qu’il a sur l’entourage de Sarkozy ? N’est-ce pas la même logique libérale, qui se veut la seule pragmatique de surcroît, qui condamne au chômage 10 000 salariées en Allemagne parce qu’un parti qui représente 6 % des électeurs préfère ses intérêts électoraux à ceux du bien commun… ? Et parce qu’il préfère son idéologie à la morale… Et ce serait nous qui  serions aveuglés par notre idéologie, et archaïques, et dépassés ? Quelle différence entre le vote d’une règle d’or et le retour à 3 % de déficit que propose Hollande, qui nous condamnera dans quelques mois à un nouveau plan d’austérité ?

Qui aurait à souffrir d’une orientation politique différente, qui romprait enfin avec cette idéologie perverse et dévastatrice, partout en Europe, voir dans le monde ? Certainement pas ceux pour qui je me bats, envers et contre.

Not my président.