Charles Avery, ST (Solipsist), 2010
Tous les ans, la promotion du master Sciences et techniques de l'exposition de Paris 1 organise une exposition à la galerie Michel Journiac (jusqu'au 12 avril seulement); ces dernières années, elles ont été denses et plutôt conceptuelles. Le cru 2012 est plus sensible, plus émotionnel; il part d'un texte de Borges sur la planète Tlön et navigue entre miroir et encyclopédie. On y découvre donc des mondes étranges et mystérieux, échappant à la logique ou au contraire la poussant au paroxysme comme cette sculpture de Charles Avery, coiffe de dialecticien solipsiste dont les pointes sont autant d'arguments logiques.
Bettina Samson, Henri Becquerel, 2009, détail
A l'arrière, on voit deux 'photographies' de Bettina Samson qui, évoquant 'Comment par hasard Henri Becquerel découvrit la radioactivité', montre l'empreinte sur une plaque photographique d'un morceau d'uranium. Les formes irréelles ainsi dessinées semblent avoir une qualité quasi charnelle, comme une peau trouée d'orifice, ornée de poils et de boutons, là où il n'y eut qu'ondes gamma et contamination. Devant ces images de re-création scientifique (encore plus audacieuses que celles de Caroline Durieux), on pense aux photos atomiques d'Edgerton montrées ici il y a quelques jours : même image ambiguë, impossible à interpréter, dangereuse, et qu'en même temps l'imagination tente de relier au visible, au connu.
Céline Beau, Vallen, 2009
A la confluence de l'encyclopédie et du miroir, on trouve aussi Vallen de Cécile Beau, mare d'encre noire qu'on croit alimentée par des gouttes qui tomberaient dans une lancinante répétition mais qui ne sont que fantaisies de l'imagination, et où se reflètent des images de volcans sous-marins de Dove Allouche (les fumeurs noirs).
Loris Gréaud, Hors-Prises, 2001
Enfin, je dois l'avouer, j'ai (enfin) aimé (pour la première fois depuis longtemps) une pièce de Loris Gréaud, un petit film expressionniste titré Hors Prise, à la musique et aux images hallucinatoires. Certes, il date de 2001; le texte de Bernard Marcadé en décrit fort bien la fantasmagorie, où l'oeuvre et le spectateur sont aussi des fantômes. Parfait pour Borges...
Photos de l'auteur. Bettina Samson et Loris Gréaud étant représentés par l'ADAGP, les reproductions de leurs oeuvres seront ôtées du blog au bout d'un mois.