À deux semaines du premier tour des présidentielles, Nicolas Sarkozy promet de réduire la contribution de l’État français au budget de l’UE s’il est réélu. Cette promesse électorale est surtout un clin d’œil aux électeurs eurosceptiques de droite.
Par Alex Korbel.
À deux semaines du premier tour des présidentielles, Nicolas Sarkozy promet aux français de réduire la contribution de l’État français au budget de l’Union Européenne (UE) s’il est réélu.
Une tactique électorale
Ce débat est récurrent. Il a déjà eu lieu en 2010 et encore une fois en 2011, lorsque certains chefs des États contributeurs nets au budget de l’UE ont adressé une lettre à la Commission européenne, se plaignant de ne pas voir leur contribution baisser en pleine crise budgétaire nationale.
Cette promesse électorale est surtout un clin d’œil aux électeurs eurosceptiques de droite. Essayant de faire oublier la présidence française de l’Union européenne en 2008 où il prônait la « solidarité » entre États européens mal gérés, Nicolas Sarkozy doit courtiser les électeurs à la droite de l’UMP s’il veut se qualifier au second tour des présidentielles. Qu’il réussisse et le Président-candidat recentrera son discours pour ne pas laisser le champ libre à son rival le 6 mai 2012.
CAP is crap, let’s scrap it!
La contribution annuelle de l’État français au budget de l’UE s’élève à environ 20 milliards d’euros. Mais il faut y retrancher les 10 milliards d’euros de subventions européennes que l’État reçoit dans le cadre de la Politique Agricole Commune (PAC).
La PAC subventionne l’agriculture européenne à hauteur de 50 milliards d’euros par an. Elle freine les importations de produits agricoles moins chers ne venant pas d’Europe. Ces subventions européennes conduisent à une surproduction domestique. Celle-ci est systématiquement exportée, créant 17 milliards d’euros de pertes dans les pays les plus pauvres.
Mais la PAC permet aussi de garder le niveau des prix artificiellement élevé au sein de l’UE, réduisant d’autant le pouvoir d’achat de l’ensemble des consommateurs. Les consommateurs européens paient ainsi 42% plus cher pour leurs produits alimentaires que si la PAC était démantelée. Les familles les moins aisées, dans lesquelles la nourriture représente une part plus importante du budget domestique, sont celles qui souffrent le plus de ce programme.
Diffusé en direct sur Russia Today le vendredi 6 avril 2012.
Le copinage État-grandes entreprises agricoles
La PAC est aussi un autre visage du capitalisme de connivence à la française. Selon Contribuables Associés :
La liste des bénéficiaires de la PAC en 2008 révèle qu’en France, parmi les 24 premiers — ayant touché chacun plus de cinq millions d’euros –, ne figure aucun agriculteur. Le numéro 1 est le volailler Doux, avec 63 millions. On trouve aussi les noms de détenteurs de grosses fortunes : Rothschild, Dassault ou le Prince Albert de Monaco. Chez nous, la moitié du total des subventions est concentrée sur 10% des exploitants. […] Loin de contribuer à la survie des fermes familiales, l’argent public irrigue de grosses structures. (Source : Les dossiers du contribuable, p51, numéro 2, juin 2011)
L’exemple néo-zélandais
Faire cesser cette injustice en réformant la PAC est possible, au plus grand bénéfice de l’agriculture du pays.
Alors que la part de l’agriculture dans l’économie était plus importante en Nouvelle-Zélande à l’époque qu’en France aujourd’hui, le gouvernement de gauche néo-zélandais a réduit à zéro les subventions étatiques à l’agriculture en 1984.
Après la vague de mécontentent et de manifestations d’usage, cette suppression n’a pas été progressive, le gouvernement offrant juste aux agriculteurs qui le voulaient une prime s’ils sortaient du système avant l’échéance légale.
Depuis 1984, la valeur de la production agricole en Nouvelle-Zélande a fait un bond de 40% en dollars constants. La part de l’agriculture dans l’économie néo-zélandaise a augmenté, passant de 14% à 17% aujourd’hui. La productivité du secteur a augmenté de 6% par an en moyenne, contre 1% avant la réforme.
Les agriculteurs ont diversifié leur utilisation des terres, cherché des opportunités de revenus non-agricoles et, en suivant les signaux du marché maintenant libre, ont modifié leur production selon les souhaits des consommateurs, en réduisant par exemple le nombre d’ovins dans leurs élevages. La fin des subventions aux engrais a fortement diminué leur utilisation. Les prix des matières premières ont baissé parce que les fournisseurs ne pouvaient plus compter sur les subventions pour gonfler artificiellement la demande.
L’expérience néo-zélandaise a déboulonné le mythe selon lequel le secteur agricole ne peut pas prospérer sans les subventions gouvernementales.
Il n’est pas trop tard pour apprendre de ce qui fonctionne et réduire de moitié la contribution de l’État français au budget de l’UE en réformant la PAC.