Depuis ce socle assuré j’aventure mes pas et le reste, les hontes, les humiliations, les terreurs n’existent plus ou à peine – au loin certes cela miroite là-bas d’éclats de lave obscure – à deux doigts, à vingt mètres un cerisier s’ouvre si bien, tu sais j’ai appris à entendre la brise passer sur les pétales, j’ai appris à deviner les pâleurs criantes à venir qui se marieront pourtant à l’océan du ciel, j’ai tant appris. La terre a beau m’attirer à elle, je me doute que j’entendrai encore bien des années les coups de ciseaux des martinets entre les murs dégrisés du couchant et le ressac qui manque tant au moment où je pose ces mots.
J’attends beaucoup des laisses qu’on aperçoit sur les plages, ma vie en dépend puisqu’après tout c’est le lieu où l’eau et le sol se touchent, déposant comme une culture naturelle des chefs d’œuvres d’argent vif que les enfants seuls ou presque apprécient alors que les contours sont au plus précieux de Cézanne, la ligne souple de Proust fidèle, le bord de la voix Debussy. Je souris : les laisses attestent que quand la mer se retire, mon enfant, la joie d’avoir été ne disparaît pas comme un souffle, elle flotte entre deux, tu vois, comme l’écriture et autres moments hallucinés des fondations qui demeurent et nous font demeurer.