Belgrade, 2074. Edit, étudiante en psychologie, participe à la thérapie d’un autiste qui aurait écrit une équation permettant de décrire l’univers entier – un algorithme si complexe que tous les ordinateurs sur lesquels on l’a lancé ont planté après avoir développé rien de moins qu’une conscience propre. À coté de ça, Edit se fait implanter une puce pour tricher à un examen et alors que les hallucinations se mêlent à des prouesses physiques surhumaines, elle réalise peu à peu que son corps ne lui appartient plus.
Comme si elle le partageait avec une autre entité : une personne dont elle ne sait rien… et surtout pas les intentions.
Si l’ensemble paraît d’abord familier et évoque une production assez orientée vers un public adolescent, le récit s’oriente vite vers un propos plus que mûr dans la description de cette vie de jeunes gens préoccupés par leurs études et leurs loisirs – des plus simples aux plus extrêmes, voire même franchement dangereux – comme par leurs amitiés et leurs amours – sexe compris – et dont les relations avec leurs aînés s’avèrent souvent difficiles – même si le récit évite avec soin de s’appesantir sur la guerre civile serbo-croate. Mais on y trouve aussi sur le long terme des considérations que ne renierait pas un Mamoru Oshii, voire peut-être même un David Cronenberg, hélas sans une réelle profondeur du propos, ou alors seulement en filigrane…
Il s’agit néanmoins d’une production clairement orientée action et thriller où le suspense joue un rôle prépondérant et où on ne s’ennuie pas une seule seconde : aux épreuves qui tombent sur Edith s’ajoutent l’intervention de sbires d’une organisation qu’on suppose gouvernementale mais aux mobiles néanmoins obscurs – les aficionados d’X-Files : Aux Frontières du réel (Chris Carter ; 1993) apprécieront. Par-dessus le marché, l’auteur fait ici preuve d’un humour certain qui contribue beaucoup à rendre le film sympathique.
En dépit des lacunes de sa réalisation sur le plan de l’animation pure, défaut largement compensé par des graphismes et des designs très réussis, Technotise: Edit & I s’affirme comme une œuvre à découvrir pour son originalité comme pour sa personnalité, et qui laisse augurer du meilleur de la part d’un réalisateur assez atypique.
Maintenant, si les éditeurs français voulaient bien faire l’effort de se pencher sur les productions qui le méritent…
Note :
Ce film est tirée de la BD Technotise de Aleksa Gajić, dessinateur de la série Le Fléau des dieux qui adapte là sa propre œuvre. Il en signe le scénario mais aussi l’animation de nombreuses séquences ainsi que les principaux designs, parmi d’autres éléments.
Le film fut réalisé avec une équipe de 10 à 15 personnes, hors les doubleurs, dans un petit appartement de Belgrade. Il leur fallut plus de cinq ans pour en arriver à bout, pour un budget total d’environ 900 000 $.
Selon le réalisateur, le personnage d’Edit fut étudié pour ressembler à Jessica Alba et à la comédienne, chanteuse et mannequin serbe Nataša Bekvalac.
Technotise: Edit & I (Technotise – Edit i ja)
Aleksa Gajić, 2009
100 minutes
- le site officiel de Technotise: Edit & I (serbe)
- d’autres avis : Twitch (en), Japan Cinema (en), Cyberpunk Review (en)