« Ce que je trouve triste, c'est la musique sans âme qu'ils passent souvent à la radio, cette musique qui n'est qu'un produit. Si elle n'a pas de vie, n'est-elle pas bien plus triste qu'une chanson mélancolique ? » Mirel Wagner saisit là une question essentielle. Elle peut parler, cette jeune finlandaise d'origine éthiopienne. Elle peut parler, car les quelques cordes qu'elle pince dans le vide, les quelques phrases qu'elle murmure de sa voix nue, si délicate et si fragile, sont tout ce qu'il y a de plus vivant et de plus personnel. J'ai rencontré sa musique au concert de Dark Dark Dark. Pas bien préoccupée par l'océan de regards qui la scrutaient, elle souriait timidement, se permettait un peu d'auto-dérision ; son innocence et sa simplicité, à l'image de sa musique, m'ont touché. Comment des chansons si vides et si décousues pouvaient-elles occuper tant de place ? On médite plus qu'on ne danse, plongé dans une intimité bien déconcertante. Du refrain de No Death (« no death can tear us apart ») aux cordes ensorcelées de Dream, on rend visite aux fantômes d'une vie comme les autres, une vie marquée par l'amour et la mort. Mirel Wagner fait la différence, car elle est splendide dans sa sincérité. On ne regarde pas un artiste mais une âme triste, une âme heureuse, une âme qui vibre. Elle sait parler comme ça et n'a pas besoin d'artifices pour nous prouver qu'elle est irrésistible.