Les animaux malades de la peste de Jean de La Fontaine
« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés… »La maladie de l’Euro fait, à bien des égards, penser à cette fable de La Fontaine : « Les animaux malades de lapeste »… Les marchés en leur fureur inventèrent pour punir les crimes… Ce, jusqu’au sacrifice du plus faible : pauvreGrèce ! Mais quelle est donc cette peste, qui infecte la monnaie, fluide vital de l’Europe ?Pourquoi les monnaies d’autres états et fédérations, les dollars, yuan, livres et autres, ne sont-ils pas affectés ?La raison en est assez simple, ceux-ci bénéficient de la souveraineté monétaire à laquelle l’Europe a renoncé. Lesexemples en sont donnés quotidiennement par les USA et la Chine.Pour réguler les tensions, il suffit d’émettre de la monnaie, de laisser filer les déficits, à l’inverse : de réduire lestaux directeurs, de vendre des devises, d’émettre des emprunts. Il existe en outre une condition nécessaire : que cecifasse l’objet d’une stratégie coordonnée et cohérente.C’est ce que faisaient les états européens avant la mise en place de l’euro. Pourquoi ne le font-ils plus ? N’ensont-ils plus capables ?S’il existe une monnaie européenne, une libre circulation des personnes et des capitaux, les souverainetés nationalesont subsisté notamment dans les domaines législatif et fiscal, sinon en théorie, au moins dans la réalité concrète. Pource qui concerne les fiscalités, elles ne sont ni harmonisées, ni coordonnées, mais soumises à une concurrence sanspitié et dont la loyauté est, pour le moins, contestable.Pour l’harmonisation, ce qui en est envisagé consistant plutôt en une uniformisation, dont les conséquences seraientfavorables aux plus forts, au détriment des plus faibles, il ne semble pas qu’elle ait la moindre chance d’aboutir et c’estheureux dans ces conditions.Si l’on considère que la monnaie est le fluide, l’instrument, qu’utilise un gouvernement pour réguler son économie etses finances publiques, on peut dire que l’instrument existe, mais que le mode d’emploi reste à établir et que celui-ci suppose l’accord de membres dont les intérêts sont, en l’occurrence et à cet égard, au moins divergents, pourcertains : contradictoires.La maladie, la spéculation contre l’euro, ne peut que s’étendre et s’amplifier. Les remèdes envisagésressemblent aux saignées du docteur Diafoirus, elles ne peuvent qu’affaiblir le malade qui pourra d’autant moinsrésister à la maladie. Provoquer une récession, une réduction des recettes fiscales et une aggravation des déficits.Malgré la crise de 2008, certains croient encore, ou se conduisent comme s’ils croyaient encore, à « la main invisible »ou à la « main de Dieu », qui ferait que les marchés tendraient vers l’équilibre, s’autoréguleraient et joueraient ainsi unrôle favorable d’arbitres entre les placements et investissements. Je doute que ce n’ait jamais été le cas, en outre ce nepourrait plus l’être car, selon la règle bien connue en économie, dès lors que les acteurs ont connaissance de larègle, ils spéculent dessus, ce qui l’empêche de s’appliquer.De nombreux exemples ont montré que la spéculation s’alimente elle-même, que dans ce domaine il suffit de crier« Au feu ! » Pour que tout s’embrase. Les marchés en donnent chaque jour des exemples.N-y a-t-il donc d’autre remède que de sacrifier l’âne de la fable ?Il est certain que la négociation et la mise en place d’une fiscalité européenne harmonisée et non uniformisée, prendraplusieurs années et ne peut avoir d’effet à court terme. Qu’une taxation des transactions financières, aussi minime soit-elle, comme ce qui est actuellement envisagé, aura pour premier effet une délocalisation d’une grande partie d’entreelles.Qu’une conversion au nominatif des titres d’emprunts entraînerait automatiquement la création de supports destinés àservir d’écrans permettant de contourner la réglementation et d’échapper à la fiscalité. Ce sont des effets secondaires.Depuis quand renonçons nous a l’usage de remèdes, à cause de leurs effets secondaires ?Pour ce qui se passe en dehors du territoire, qu’il soit national ou européen, il est certain que ceci ne pourra fairel’objet d’aucun traitement efficace, ni à court, ni à long terme. Le savoir est une bonne chose, en tenir compte estindispensable. S’en lamenter est une perte de temps et d’énergie stérile. Tenter d’y faire quelque chose, un gaspillageéhonté de temps, d’énergie et de moyens.Essayer de traiter à l’avance les effets secondaires, de prévoir les réactions des marchés et les mesures de protection etd’échappement des opérateurs, s’est toujours avéré inefficace. Les mesures prises sont toujours contournées, avantque d’être mises en œuvre. Il reste néanmoins possible de traiter les conséquences, les symptômes de la maladie. Làencore, pour être efficaces, les mesures se doivent de n’être conçues que dans cet objectif, les éventuellesconséquences injustes pouvant toujours être rattrapées « à posteriori ».La seule solution, qui me semble permettre d’atteindre ces objectifs, est la perte de la créance. Si, seule la BCEémettait des emprunts, prêtant elle-même aux états européens, que tous les titres émis soient nominatifs,que leur portage ou leur mise en pension soient interdits, sauf auprès d’elle, que le paiement des intérêts et leremboursement, ne puisse être effectué qu’au titulaire et que toute irrégularité entraine la perte de la créance, il seraitpossible d’assainir le marché.Cette méthode aurait en outre l’avantage de ne pas pénaliser les véritables préteurs de bonne foi qui, dans le cadre del’abandon des créances récemment intervenu, l’ont été autant, sinon plus, que les spéculateurs qui avaient mis le feu.L’Europe existe et elle est dotée d’une monnaie : l’euro.On peut s’en réjouir ou le déplorer, mais on doit constater que cette monnaie est un instrument et qu’en tant que telcelui-ci nécessite un opérateur et un mode d’emploi. Que ceux-ci n’existent pas et qu’aussi longtemps que ce serale cas, les problèmes posés ne pourront pas trouver de solution.Marc Albert CHAIGNEAUPUTEAUX, le 18 mars 2012« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés… »La maladie de l’Euro fait, à bien des égards, penser à cette fable de La Fontaine : « Les animaux malades de la peste »… Les marchés en leur fureur inventèrent pour punir les crimes… Ce, jusqu’au sacrifice du plus faible : pauvreGrèce ! Mais quelle est donc cette peste, qui infecte la monnaie, fluide vital de l’Europe ?Pourquoi les monnaies d’autres états et fédérations, les dollars, yuan, livres et autres, ne sont-ils pas affectés ?La raison en est assez simple, ceux-ci bénéficient de la souveraineté monétaire à laquelle l’Europe a renoncé.Les exemples en sont donnés quotidiennement par les USA et la Chine.Pour réguler les tensions, il suffit d’émettre de la monnaie, de laisser filer les déficits, à l’inverse : de réduire lestaux directeurs, de vendre des devises, d’émettre des emprunts. Il existe en outre une condition nécessaire :que ceci fasse l’objet d’une stratégie coordonnée et cohérente.C’est ce que faisaient les états européens avant la mise en place de l’euro. Pourquoi ne le font-ils plus ?N’en sont-ils plus capables ? S’il existe une monnaie européenne, une libre circulation des personnes et des capitaux, les souverainetés nationales ont subsisté notamment dans les domaines législatif et fiscal, sinon en théorie, au moins dans la réalité concrète.Pour ce qui concerne les fiscalités, elles ne sont ni harmonisées, ni coordonnées, mais soumises à une concurrence sans pitié et dont la loyauté est, pour le moins, contestable.Pour l’harmonisation, ce qui en est envisagé consistant plutôt en une uniformisation, dont les conséquences seraientfavorables aux plus forts, au détriment des plus faibles, il ne semble pas qu’elle ait la moindre chance d’aboutir et c’estheureux dans ces conditions.Si l’on considère que la monnaie est le fluide, l’instrument, qu’utilise un gouvernement pour réguler son économie etses finances publiques, on peut dire que l’instrument existe, mais que le mode d’emploi reste à établir et que celui-ci suppose l’accord de membres dont les intérêts sont, en l’occurrence et à cet égard, au moins divergents, pourcertains : contradictoires.La maladie, la spéculation contre l’euro, ne peut que s’étendre et s’amplifier. Les remèdes envisagés ressemblent aux saignées du docteur Diafoirus, elles ne peuvent qu’affaiblir le malade qui pourra d’autant moins résister à la maladie. Provoquer une récession, une réduction des recettes fiscales et une aggravation des déficits.Malgré la crise de 2008, certains croient encore, ou se conduisent comme s’ils croyaient encore, à « la main invisible » ou à la « main de Dieu », qui ferait que les marchés tendraient vers l’équilibre, s’autoréguleraient et joueraient ainsi un rôle favorable d’arbitres entre les placements et investissements.Je doute que ce n’ait jamais été le cas, en outre ce ne pourrait plus l’être car, selon la règle bien connue en économie, dès lors que les acteurs ont connaissance de la règle, ils spéculent dessus, ce qui l’empêche de s’appliquer.De nombreux exemples ont montré que la spéculation s’alimente elle-même, que dans ce domaine il suffit de crier« Au feu ! » Pour que tout s’embrase. Les marchés en donnent chaque jour des exemples.N-y a-t-il donc d’autre remède que de sacrifier l’âne de la fable ? Il est certain que la négociation et la mise en place d’une fiscalité européenne harmonisée et non uniformisée, prendra plusieurs années et ne peut avoir d’effet à court terme. Qu’une taxation des transactions financières, aussi minime soit-elle, comme ce qui est actuellement envisagé, aura pour premier effet une délocalisation d’une grande partie d’entre elles.Qu’une conversion au nominatif des titres d’emprunts entraînerait automatiquement la création de supports destinés àservir d’écrans permettant de contourner la réglementation et d’échapper à la fiscalité. Ce sont des effets secondaires.Depuis quand renonçons nous a l’usage de remèdes, à cause de leurs effets secondaires ?Pour ce qui se passe en dehors du territoire, qu’il soit national ou européen, il est certain que ceci ne pourra fairel’objet d’aucun traitement efficace, ni à court, ni à long terme. Le savoir est une bonne chose, en tenir compte estindispensable. S’en lamenter est une perte de temps et d’énergie stérile. Tenter d’y faire quelque chose, un gaspillageéhonté de temps, d’énergie et de moyens.Essayer de traiter à l’avance les effets secondaires, de prévoir les réactions des marchés et les mesures de protection etd’échappement des opérateurs, s’est toujours avéré inefficace. Les mesures prises sont toujours contournées, avantque d’être mises en œuvre.Il reste néanmoins possible de traiter les conséquences, les symptômes de la maladie. Là encore, pour être efficaces, les mesures se doivent de n’être conçues que dans cet objectif, les éventuelles conséquences injustes pouvant toujours être rattrapées « à posteriori ».La seule solution, qui me semble permettre d’atteindre ces objectifs, est la perte de la créance. Si, seule la BCE émettait des emprunts, prêtant elle-même aux états européens, que tous les titres émis soient nominatifs, que leur portage ou leur mise en pension soient interdits, sauf auprès d’elle, que le paiement des intérêts et le remboursement, ne puisse être effectué qu’au titulaire et que toute irrégularité entraine la perte de la créance, il serait possible d’assainir le marché.Cette méthode aurait en outre l’avantage de ne pas pénaliser les véritables préteurs de bonne foi qui, dans le cadre del’abandon des créances récemment intervenu, l’ont été autant, sinon plus, que les spéculateurs qui avaient mis le feu.L’Europe existe et elle est dotée d’une monnaie : l’euro.On peut s’en réjouir ou le déplorer, mais on doit constater que cette monnaie est un instrument et qu’en tant que telcelui-ci nécessite un opérateur et un mode d’emploi. Que ceux-ci n’existent pas et qu’aussi longtemps que ce serale cas, les problèmes posés ne pourront pas trouver de solution.Marc Albert ChaigneauMarc Albert Chaigneau a été conseil de sociétés et avocat d’affaires, puis responsable juridique pendant 35 ans. Il est l’auteur de « Crise financière ou de société ? » aux Editions Bénévent.