Comme je suis un homme de parole, et que j’avais promis à Nathanaël, (qui étais à Limoges ce soir) un billet sur le sujet, et que la culpabilité me taraudait de ne l’avoir pas réalisé encore, ce soir je m’exécute enfin.
Si j’ai tant tardé, c’est que l’enjeu est fort à mes yeux, car je me fixais des objectifs peut-être incompatibles entre eux dans le format d’un seul billet, et pour certaines inconciliables. Mais jetons nous enfin à l’eau, on verra bien, il n’y aura pas mort d’homme. Trop perfectionniste, le gars…
Sarkozy a commis une erreur grossière. Il aurait du consulter ses nombreux conseillers en communication, avant de dire des conneries plus grosses que lui qui vont lui aliéner bien des lorrains, dont je suis, suite à des propos violents et grossiers, indignes d’un chef d’État. Attaquer frontalement des syndicalistes, cela ne s’est jamais vu. Mais peut-être sait-il déjà qu’il a perdu ? Cette hargne ne peut s’expliquer autrement.
Nous sommes nombreux à être solidaires des sidérurgistes lorrains, syndiqués ou pas, même parmi ceux qui n’ont pas les mots pour le dire, et dont je voudrais être la voix, d’où mon embarras pour faire ce billet : je n’ai pas le droit de les décevoir… Même s’il est probable que la plupart ne me liront jamais. Je pense à eux.
Nous avons pour beaucoup de la famille, des amis, des voisins, des connaissances, des relations politiques, associatives, syndicales, professionnelles, qui ont été ou sont en contact avec ce qu’il reste à présent de la sidérurgie dans notre région, cette conscience historique au fond de nous qui nous fait nous sentir solidaires et comprendre la parole des sidérurgistes comme des mineurs où qu’ils soient, vivent, et travaillent. Nous avons tous en Lorraine, qu’on en soit originaires ou pas (le propos n’est pas là), entendu des histoires plus émouvantes, drôles, ou tragiques les unes que les autres. Certaines dérisoires, faisant partie du lot quotidien de tout un chacun, le décor des hauts-fourneaux derrière en plus. Tout cela pour dire que l’histoire de la sidérurgie, et des combats syndicaux qui vont avec, et les nombreux raouts qui ont égrené les multiples plans de licenciements font partie du substrat de la culture historique et culturelle lorraine. Et cela même au fond des Hautes-Vosges, qui en sont pourtant si éloignées. Je le sais. Nous respectons la culture ouvrière, pour beaucoup d’entre nous, qui ne sommes pas des parvenus ou des gens aisés. La plupart d’entre nous, donc.
Aussi, c’est avec beaucoup de fierté, quand bien même les mots ne sont pas toujours les bons, les mieux choisis, les qui passent bien à la télé (on s’en fout, mais d’une force ! C’est ici le parler de beaucoup…), que nous regardons ce petit syndicaliste immigré du Portugal avec son casque et son bleu de travail, qui parfois ose tenir tête au Président de la République en personne. Car il incarne à lui tout seul tout notre imaginaire ouvrier lorrain. Nous sommes nombreux je pense à avoir ressenti de la fierté au fond de nous en voyant la manière dont il a expliqué les motifs de sa lutte après avoir détaillé un peu son parcours, notamment dans cette émission télévisée, avec des gens si importants… où il s’est montré si bon.
Nous sommes donc également nombreux à suivre discrètement, quand le temps nous le permet, le parcours de cette marche pour l’acier qui arrivera à Paris Vendredi, 6 avril 2012. Nous sommes fiers de ces gens qui se battent pour défendre l’emploi, non pas le leur seulement, mais celui de toute une région qui a beaucoup souffert. Et ça continue… Pour quel avenir pour les nôtres ?
capture écran site FR3
Alors, en plus de cette marche, dont vous pouvez suivre les étapes, physiques et médiatiques, ainsi que les réactions politiques ici, ils ont trouvé des soutiens. Dont celui de Bernard Lavilliers, un fidèle de toujours, qui malgré son état de santé a trouvé le moyen de mettre à disposition son site (dont l’illustration de ce billet est une capture d’écran) et sa musique comme nous le ferions tous pour une telle cause, au service des marcheurs et pour que le cœur de la Lorraine survive… A défaut de vivre vraiment : ça fait vingt ans au moins que nous sommes au bord de l’agonie, question emploi. Alors, les promesses qui n’engagent que ceux qui y croient, nous connaissons. Mais ce Président là, vraiment, il a fait fort : nous nous sentons tous insultés, et méprisés. Nous connaissons tous l’histoire. Nous savons tous que les 17 millions qu’il promet étaient déjà prévus, et que nous n’en verrons peut être jamais la couleur pour une grande partie si Mittal, comme c’est probable, se rétracte et préfère des pays à moindre coût de main d’œuvre… Comme si les promesses la main sur le cœur mais jamais tenues de Gondrange n’avait pas suffit à nourrir une haine légitime, il faut donc qu’il attaque frontalement les syndicats, à présent… Cet homme est fou.
Vendredi, pour célébrer comme il se doit, c’est à dire dignement, la fin de cette marche, un concert aura lieu à Paris, Place de Varsovie, juste à côté du Trocadéro. Les marcheurs arriveront pour 17h et le concert débutera à 19h. Douane, RIC, Bernard Lavilliers et de nombreux autres artistes qui soutiennent les sidérurgistes dans leur combat seront là. Plusieurs communes du coin (Florange, Knutange, Hayange, Fameck, Algrange, etc) organisent le départ d’une quinzaine de bus pour assister à ce concert du 6 avril.
Soyez nombreux. Sinon, je vous casse la gueule. Parole de lorrain.
( et n’oubliez pas de signer la pétition sur le site de Lavilliers, sinon, c’est pire qui va vous arriver…)