Lettre aux hésitants de gauche.

Publié le 04 avril 2012 par Forrestgump54

Camarades,
La percée historique du Front de Gauche reconfigure l’espace politique de notre pays. Même s’il est clair qu’il faut toujours se méfier des chiffres des instituts de sondages, il apparaît a minima clairement que la dynamique de la campagne présidentielle de 2012 est du côté de la gauche radicale. Cette situation sans précédent en effraie plus d’un alors que tous devraient avoir des raisons de se réjouir, car en dehors des quelques oligarques qui ont effectivement tout à perdre (mais un monde plus juste est-il vraiment une perte ?), le programme commun du Front de Gauche défend les « ninety-nine percent », les 99% spoliés par les 1% les plus riches. On nous dit que parce qu’il s’adresse à tous (sauf, donc, aux plus riches d’entre nous) et promet une vie meilleure pour tous, notre programme est populiste. Cela est révélateur de la société dans laquelle nous vivons : une société où l’espoir est interdit et où seules sont autorisées la souffrance, la dépression (morale et économique) et l’autoflagellation. Notre programme promet une vie meilleure pour 99% de la population Française ? « Il ne peut pas être mis en place ! Il est irréaliste ! Il est populiste ! » Les insultes injustifiées pleuvent de toutes parts… parfois provenant d’individus qui n’ont même pas lu ledit programme. Une fois encore, cela est tout à fait typique d’une société où l’espoir est si peu autorisé que dès qu’il pointe le bout de son nez, beaucoup croient au mirage et s’en détournent.
Il est temps, pourtant, d’y croire ! Ceux d’entre nous qui l’ont fait ne regrettent rien et voient le Front de Gauche atteindre des sommets espérés mais inattendus (la nuance est essentielle). L’élection présidentielle de 2012 peut prendre un tournant historique et les électeurs ont, pour la première fois depuis 1981, la possibilité de placer au deuxième tour la gauche qui se bat, c’est à dire la seule gauche, la vraie gauche, la gauche éternelle (on ne m’en voudra pas si je plagie de Gaulle ?) ! Le programme commun de 2012 n’est pas irréaliste parce qu’il promet de belles choses ; au contraire : il s’appuie sur des études économiques précises et ne promet que ce qui est réalisable, ce que nous on peut[1] réaliser. Il est temps pour les électeurs, tous les électeurs de se tourner vers le Front de Gauche et de le regarder avec des yeux nouveaux : des yeux qui voient qu’une société plus juste, plus écologique et plus démocratique est possible et qu’elle peut se mettre en place dans les cinq ans à venir. J’aimerais donc m’adresser à mes compatriotes hésitants pour leur proposer un nouveau regard sur le Front de Gauche, un regard bienveillant, qui puisse enfin voir tout ce qu’une gauche forte et unie peut faire, demain, pour la France.
Aux camarades du NPA et de Lutte Ouvrière,

Depuis l’élection présidentielle de 1995, ce sont les divisions de la gauche qui amenuisent nos chances de voir un candidat de la gauche radicale arriver au pouvoir. En 2012, nous avons l’opportunité unique de réaliser une union sans précédent de la « gauche de la gauche », comme se plaisent à dire les commentateurs politiques, mais qui est en réalité la gauche au sens où nous l’entendons tous. Nos trois forces politiques n’ont aucun intérêt à camper sur leurs positions quand l’unité est possible. Regardez le programme du Front de Gauche, regardez-le en détail ! Vous n’y trouverez que des éléments de convergence avec les idées que vous défendez ! Nos trois candidats étaient sur C dans l’air la semaine dernière et tous développaient une approche commune de la crise financière : audit citoyen de la dette, faire payer les banques qui se sont engraissées sur notre dos pendant plus de cinquante ans, etc. Les actions que nous voulons mettre en place, les moyens que nous voulons utiliser diffèrent, mais les idées sont majoritairement les mêmes ! Notre candidat ne vous revient pas ? Pour les électeurs du NPA, il fait partie du système, il a été ministre et sénateur au sein du Parti « Socialiste » et il ne peut donc pas défendre un programme de gauche ; c’est mal connaître Jean-Luc Mélenchon, qui a toujours défendu une ligne de gauche au sein d’un parti qu’il aimait et qu’il a quitté précisément parce qu’il estimait qu’aucun changement ne serait possible de l’intérieur. Pour les électeurs de Lutte Ouvrière, il n’est pas communiste et c’est un problème… alors même que les communistes ont décidé de se joindre au mouvement de la gauche unie et forte de son unité. Regardez les noms de vos partis ! Le Nouveau Parti Anticapitaliste, c’est le Front de Gauche ; le parti de la Lutte Ouvrière, c’est le Front de Gauche ! Il est temps de réaliser notre unité et de faire gagner la « gauche de la gauche », la gauche que nous avons en commun : la gauche que nous aimons !
Aux camarades d’Europe Ecologie – Les Verts,
Beaucoup d’entre vous se sont sentis trahis par l’accord passé entre votre force politique et le Parti « Socialiste » et ils ont raison. Vos dirigeants ont souhaité obtenir des circonscriptions pour, disaient-ils, créer un groupe écologiste à l’Assemblée Nationale. S’il est évident que les idées de l’écologie doivent être défendues corps et biens dans l’Hémicycle, la méthode choisie a laissé pantois plus d’un électeur : un groupe à l’Assemblée et une trentaine de postes ont donc plus de valeur que le combat contre le nucléaire ? Fallait-il, en passant cet accord, que vos dirigeants renient jusqu’à cela ? A la fin de la législature, si le programme respecte l’accord qui a été passé, seule la centrale de Fessenheim aura été fermée. La construction de l’EPR, de son côté, n’aura pas été stoppée.
A vous aussi, je dis qu’il est temps de réaliser l’union de la gauche ! Regardez notre programme ! Intéressez-vous aux points écologiques et sociaux et comparez-les avec vos idées ! Vous verrez que c’est le Front de Gauche qui les défend le mieux ! C’est parce que nous sommes déjà des Sans-Culotte que nous n’avons pas eu l’occasion de baisser nos frocs face au Parti « Socialiste » ! Dans le détail, nous voulons « éteindre la dette verte », nous voulons la planification écologique pour qu’un programme de grande ampleur soit mis en place ; nous voulons faire passer les camions sur des trains de la frontière belge à la frontière espagnole ; nous voulons le smic à 1700€ parce qu’il permettra aux plus modestes de consommer bio et aux producteurs d’avoir une juste rémunération pour leur travail ; nous voulons des circuits de distribution plus courts et pour cela, nous mettrons en place une taxe à l’importation relative au chemin parcouru par le produit avant d’arriver en France ; nous voulons, enfin, un référendum sur le nucléaire. Ce n’est pas un moyen d’éviter la question : c’est un moyen d’avoir un débat national sur le sujet, de faire bouger les mentalités et de proposer plusieurs solutions. Il ne faut pas avoir peur du peuple ! Notre programme prévoit, en cas de référendum favorable, une sortie raisonnée du nucléaire, en intégrant notamment le scénario Négawatt[2].
Alors à vous aussi je le demande : défendez vos idées en rejoignant la force politique qui les défend le mieux ! Poussez vos dirigeants à remettre en questions leurs accords et à rejoindre un Front de Gauche uni sur les questions sociales et écologiques. Avec vous, nous pouvons vaincre toutes les résistances et mettre en place un vrai programme écologique qui fera figure d’exemple pour le monde entier !
Aux camarades du Parti socialiste,
Beaucoup d’entre vous hésitent à franchir le pas car ils ont peur de voir le Front National présent au second tour et de revivre le choc national (et international) du 21 avril 2002. Or, grâce à l’action du Front de Gauche pour montrer le vrai visage d’un parti qui avait presque réussi à se « dédiaboliser », le Front National est aujourd’hui en net recul et le risque de voir Marine Le Pen au second tour est devenu peu probable. Les discours récents de la candidate du Front National, notamment celui de Nantes (qui faisait un lien entre immigration et terrorisme), montrent bien la teneur profondément xénophobe de ce parti fasciste et provoquent l’écœurement de ses propres électeurs. Ce n’est pas le Parti Socialiste qui a lutté contre le Front National, c’est le Front de Gauche ! Et le recul de Marine Le Pen n’est dû qu’à notre action pour braquer la lumière sur le programme du FN et le faire imploser par l’« effet Dracula » qui fait sens pour bon nombre d’entre vous.
Beaucoup d’entre vous ont rejoint le Parti Socialiste il y a plusieurs années, beaucoup d’entre vous ont rêvé d’une énergie comparable à celle générée par le programme commun de 1981 ; nous voulons vous dire que cette énergie existe et qu’elle se cristallise autour d’un nouveau programme commun : celui du Front de Gauche. Où est passé le Parti Socialiste des années 1980 ? Où est passé le socialisme dans le programme de François Hollande ? Au Front de Gauche, nous savons où il est : il est dans notre programme ! Il est temps que vous ouvriez les yeux et que vous vous rendiez compte que le parti que vous soutenez (pour l’instant) n’a plus de socialiste que le nom !
Nous, nous proposons depuis longtemps le salaire maximum. Et nous ne le mettons pas à la limite symbolique du million d’euros (taxé à 75%, de surcroît, ce qui n’a rien d’un plafond), mais à la limite de « vingt fois le revenu médian », ce qui, actuellement, signifie 360 000 euros par ans ou 30 000 euros par mois. Combien pâtiront de cette mesure ? Moins d’un pour cent de la population ! Combien bénéficieront de cette mesure ? Le reste, c’est-à-dire presque tous !
Nous, nous proposons le smic à 1700 euros par mois. On nous dit : « c’est impossible, vous allez tuer la croissance, pousser à la délocalisation, etc. ». Le discours néolibéral vous aurait-il tous convaincus ? Le programme de François Hollande propose une revalorisation automatique du smic qui le portera à 1640 euros en fin de mandat et on ose nous dire que pour une soixantaine d’euros, les PME vont mourir et le taux de chômage augmenter de manière exponentielle ? C’est une blague éhontée ! D’autant que pour ce smic à 1700 euros, nous proposons un programme cohérent qui inclut une double taxe sur les produits importés. Cette taxe est d’abord écologique, parce qu’elle prendra en compte le chemin qu’a parcouru le produit avant d’arriver en France ; elle est ensuite sociale, parce qu’elle prendra en compte le salaire des ouvriers qui ont fabriqué ledit produit. Faites le calcul vous-même : avec cette double taxe, il n’y aura plus aucun intérêt à produire hors de France pour qui veut vendre au marché français ! Et nul ne doute que les grands groupes industriels feront le même calcul et choisiront de revoir leurs marges à la baisse, au profit du plus grand nombre. « Ils augmenteront les prix de vente » ? Oui, peut-être, mais n’oubliez pas qu’on mettra le smic à 1700 euros. Cohérence toujours. La règle du « pas d’écarts de salaires de plus de 1 à 20 au sein d’une entreprise permettra, avec l’augmentation du revenu médian occasionnée par la hausse du smic, de créer un cercle vertueux et équitable. Les PME trouveront des acheteurs plus riches et plus à même d’acheter leurs produits. Cohérence.
Nous, nous proposons d’emprunter directement à la Banque Centrale Européenne. « Ils ne voudront pas » ? Très bien : nous forcerons les banques à emprunter à la BCE et, par ce moyen détourné, nous obtiendrons exactement le même résultat ! Voilà comment on se libère de la tutelle des marchés ! Voilà comment on évite à la France le sort de la Grèce, de l’Italie, et peut-être bientôt de l’Espagne ! Un seul mot : résistance ! Nous proposons de surcroît la création d’un pôle financier publique pour faire le contrepoids à la puissance des banques et des compagnies d’assurance.
Et puisqu’on parle d’Europe, vous voulez revenir sur le Mécanisme Européen de Stabilité ? Très bien, nous aussi. Mais nous voulons aussi revenir sur le traité de Lisbonne qui a été passé en force deux ans après qu’un référendum l’a refusé (le nom a changé mais pas le fond) ! La volonté des peuples français et néerlandais souverains a été bafouée ; nous voulons réparer cette erreur démocratique et historique ! « Impossible », dites-vous ? Figurez-vous que le Royaume-Uni applique un droit d’opt-out (comprenez « de retrait ») pour toutes les lois européennes jugées trop « sociales » et menaçant le fonctionnement de la City. Nous voulons simplement appliquer ce droit d’opt-out dans le sens inverse et bloquer les lois qui nous sembleront trop libérales pour le fonctionnement de notre système social !
Vous l’avez compris : si vous voulez voter pour un programme réellement socialiste aux prochaines élections, il vous faudra voter pour le Front de Gauche. L’élection présidentielle de 2012, c’est la chance historique de voir la France réaliser son « Printemps citoyen ». D’ailleurs puisqu’on en parle… beaucoup d’entre vous ont entendu parler de la « Révolution citoyenne » et s’imaginent des hordes d’hommes et de femmes armés de pierres et de bâtons, dressant des barricades et menaçant la paix civile. Relisez-bien le programme : la Révolution citoyenne (j’allais dire « comme son nom l’indique »), c’est la révolution par les urnes ! C’est le choix de mettre, dans la grosse boîte, une petite enveloppe qui change la vie de tous ! C’est le choix de mettre en place une société plus démocratique et plus juste ! C’est le choix de la VIe République, demandée par Arnaud Montebourg au sein de votre propre formation politique ! C’est le choix d’une plus équitable répartition des salaires dans la France de demain !
Alors, à tous les hésitants de gauche,
Il est temps de faire gagner la gauche républicaine, sociale et écologiste ! Il est temps de montrer aux néolibéraux et aux capitalistes (et, au passage, à tous les citoyens qui ont fini par croire à leurs sornettes à force de se les faire rabâcher par les médias) que le peuple de gauche n’est pas mort et qu’il est entré en lutte ! Nous avons été unis contre la réforme des retraites et contre le Traité Constitutionnel Européen ; nous le sommes aujourd’hui et le serons demain, dans un Front de Gauche qui est le pendant, au XXIe siècle, du Front Populaire des années 1930 !

Vive la gauche unie ! Vive la sociale ! Vive la République !


[1] Généreux Jacques, Nous on peut ! Pourquoi et comment un pays peut toujours faire ce qu'il veut, Paris, éd. du Seuil, septembre 2011.

[2] http://www.negawatt.org/scenario-negawatt-2011-p46.html

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