Avec Twixt, Coppola retourne à ses années étudiantes et à l’horreur pour offrir un film déroutant aussi bancal qu’intéressant dans l’évolution dans la carrière du cinéaste.
On a tendance à l’oublier mais le Francis Ford Coppola qui nous avait régalé avec Le Parrain et Apocalypse Now a débuté dans l’écurie Corman en tant qu’assistant-réalisateur puis avec Dementia 13. Avec Twixt, il termine un cycle de 3 films personnels et à petit budget qu’il avait commencé avec l’Homme sans âge, comme un petit retour aux sources fait de fraicheur et d’expérimentations malgré son expérience. Après le familial Tetro, il retourne donc à l’horreur qu’il avait presque abandonné depuis son magnifique Dracula.
Sur un thème très classique du genre, il emmène un écrivain fantastique (Val Kilmer en Stephen King raté) dans une bourgade au passé mystérieux. Alors qu’il apprend au fur et à mesure qu’un meurtre a eu lieu, il rêve la nuit d’une fillette fantôme qui lui racontera l’histoire du village. Le clocher du village, l’hôtel hanté, les vampires, le temps suspendu, jusqu’à l’apparition d’Edgar Allan Poe … Coppola insère dans son récit tous les éléments fantastiques qui ont été présents dans le rêve qui l’a amené à réaliser le film donnant alors une impression étrange.
Entre le très cheap et le kitsch, on peut le dire, le film n’est pas forcément d’un très bon goût esthétique, à l’image de Val Kilmer qui ressemble lui de plus en plus à Steven Seagal, la maitrise des arts martiaux en moins. C’est assez déroutant de voir que Coppola retourne ici à une certaine simplicité qui fleure bon les années 60, comme si il avait oublié la perfection technique et narrative qu’il avait apporté au cinéma. En soit, l’histoire n’apporte rien au genre et aligne même les clichés si bien qu’elle devient vite assez peu intéressante et seule la filiation du film avec les réflexions poétiques d’Edgar Allan Poe fera son originalité. Conte macabre plutôt graphique, Twixt n’a en soit que peu d’intérêt et se perd facilement dans la facilité ou le n’importe quoi.
Pourtant si le film est loin d’être extraordinaire et ressemble bien plus à un film fourre-tout d’étudiant en cinéma indé d’horreur, il est intéressant de voir que Coppola fait ce film à ce stade de sa carrière, maintenant qu’il n’a rien à prouver, qu’il bénéficie d’une expérience et d’une culture large et d’une liberté totale. Son film est rempli d’une certaine fraicheur et d’une sérénité qui sont tout à fait dans l’esprit de cet étudiant de 72 ans qu’est Coppola. Il va même jusqu’à expérimenter quelques nouvelles techniques. A ce titre, bien qu’inutiles pour l’histoire, son travail sur les couleurs ou sur 2 scènes en 3D nous permet de voir qu’il tente toujours de nouvelles choses et qu’il s’amuse avec les outils d’aujourd’hui en essayant d’impliquer les spectateur dans le processus.
Finalement, bien plus que le film qui restera en soit assez mineur dans la carrière de Coppola, l’intérêt de Twixt se situe plus dans la récréation qu’il représente pour Coppola qui revient ici à la case départ, la réflexion sur la vie et la famille en plus. Mais après ces quelques années d’errance cinématographique, nous avons plutôt hâte de voir ce que le maître nous réserve de plus ambitieux ensuite.
D’ailleurs, je tiens à remercier Pathé qui nous a offert après la projection en avant-première publique une masterclass d’une heure de Francis Ford Coppola (en soit bien plus passionnante que le film). Nous y avons ainsi appris qu’il voyait l’avenir du cinéma de manière bien plus interactive avec le spectateur (les technologies de montage lui permettant d’arranger le film selon ce qu’il désire à ce moment là), que Twixt découle d’un rêve qu’il a fait (il n’aurait pas pu en être autrement à la vision du film), que les acteurs ne sont pas difficiles (ils ont juste peur), qu’il a grand plaisir à tourner en famille et surtout qu’il a ensuite un projet bien plus ambitieux en préparation (ce qui est rassurant).