Il fait de beaux dessins, Keith Rankin. Un petit tour sur son Bandcamp, et l'on sait que ce mec a tout compris à l'esthétique. Multi-instrumentiste et électronicien, il s'est imbibé d'un patrimoine musical inestimable, remontant jusqu'aux premières exhalations du krautrock et aux premiers fantasmes robotiques, afin de ciseler de petites merveilles progressives aux sons d'outre-espace. Il sait donner à chacune de ses cassettes une allure unique, qu'elle soit ambiante, bruyante ou contemporaine. Celle-ci est plutôt dansante – le hameçon parfait, si l'on s'en réfère aux tendances. On aime toujours les artistes barrés, neufs et écoutables. Giant Claw, c'est les trois à la fois ; on peut même se permettre de le qualifier de visionnaire. Le premier titre, Haunted Planet I-II, c'est huit minutes d'imprévisible et d'imparable, ça court de plus en plus vite, ça réactive votre métaconscience et avant d'avoir dit bonjour à la Lune, vous êtes déjà dans l'hyperespace, à danser parmi les protons. C'est magique de partir si loin avec des idées si simples. Keith Rankin semble toujours savoir comment agencer les sons – il est plus architecte qu'il n'est rockeur, et cela se traduit aussi bien dans ses compositions et dans leur titres que dans ses créations graphiques. Son amour pour la subtilité conceptuelle saura, tôt ou tard, le placer au cœur de la prochaine révolution artistique.