La plupart du temps, une séance de médiumnité/spiritisme (séance de communication entre un vivant et un défunt) est l'occasion de reprendre une conversation interrompue par la mort, de poser au disparu les questions restées sans réponses. C'est aussi l'occasion pour le vivant de dire ce qu'il n'a pas eu le temps de dire à celui qui est parti. C'est un espace de parole(s) rouvert entre notre Monde des vivants et l'Au-delà.Ces séances sont souvent mélange de gaité et d'émotion. Comme un match qu'on nous donne miraculeusement l'occasion de rejouer après une défaite. Les intervenants se précipitent sur le terrain et donnent tout ce qu'ils ont dans le ventre avant le coup de sifflet final. Ce sont des moments de vérité.
Mais il arrive parfois que la question essentielle du Vivant porte sur les circonstances exactes du décès. Le Médium doit alors véritablement entrer dans la peau du défunt durant les instants précédant sa mort. Quand il s'agit d'une mort violente, c'est un exercice angoissant pour le médium qui bien entendu va revivre aussi la douleur du décès. Ces séances de spiritisme particulières sont rares et donc précieuses et je remercie les vivants qui y sont cités et qui certainement se reconnaîtront de m'avoir permis de les vivre.
Le jeune fils renversé par un train
Un soir, une nouvelle consultante se présente a priori pour une séance de voyance classique. Elégante et raffinée, elle pose devant moi 2 photos : celle d'un homme et celle d'un très beau jeune homme d'une petite vingtaine d'années. Je lui dis "Les 2 sont des pièges, mais vous comprendrez bien que concernant votre fils il est impossible pour la maman que je suis de prononcer les mots." Des larmes emplirent ses yeux : "Il est mort il y a 2 mois renversé par un train, j'ai besoin de comprendre".
Rien ne laissait présager un accident pour son fils pourtant très habitué à l'infrastructure des quais de leur gare de campagne et sa mère avait besoin de se rassurer sur les circonstances exactes de sa mort.
Très vite, je sentis le présence de son fils à côté de moi et sa main se poser sur mon épaule: "Qui est ******?" La mère me sortit une photo: "C'était sa petite fiancée ils étaient très amoureux"
Je souris : "Il vous a écrit une lettre quelques semaines avant sa mort, mais rassurez vous c'était un vrai message d'amour pas un testament. Votre fils était très heureux" (en effet, le jeune homme avait écrit une petite lettre spontanée à ses parents pour leur dire qu'il les aimait et qu'il ne leur disait pas assez et avec le recul des événements, les parents s'étaient à tort interrogés sur le sens exact de cette missive). Je sentis le soulagement de la mère.
Mais après avoir compris que le fils ne s'était en aucun cas suicidé, il fallut comprendre comment cet accident stupide avait eu lieu.
Je dus donc intégrer les derniers instants de vie du jeune homme traversant les rails et je dois dire que la perspective de me faire écraser par un train ne m'enthousiasmait guère. Cependant, je le fis et pus décrire à la mère chaque détail et la stupidité de la minute d'inattention lorsque, surpris par le froid, il voulut sortir son anorak de son sac à dos et ne vit pas le train arriver sur lui...
Habituellement, après une séance de spiritisme, je demande au défunt de me quitter et de remonter. Ce que je n'eus le cœur de faire pour ce jeune homme qui aurait pu être mon fils et qui était encore tremblant de peur. Il resta donc quelques jours près de moi et de ma famille, je continuai de lui parler, de le rassurer, et un matin...il n'était plus là.
Le suicidé par arme à feu
Cette très jolie veuve avait enfin refait sa vie et me consultait régulièrement pour des histoires immobilières. Nous évoquions souvent son défunt mari qui s'était suicidé avec un pistolet, mais nous n'avions jamais véritablement communiqué avec lui
Mais un jour elle voulut rouvrir l'enquête sur les circonstances de ce suicide, car consécutif à un licenciement abusif. Son mari avait en effet découvert de graves dysfonctionnements au sein de l'établissement militaire qu'il gérait et quand il voulut en faire part à sa hiérarchie, cette dernière le limogea brutalement. Blessé dans son orgueil, cet homme d'honneur avait donc mis fin à ses jours en se tirant une balle dans la tête.
Il s'agissait aujourd'hui de retrouver le carnet où le mari avait relaté tous les faits découverts (maltraitance), qui n'avait jamais été retrouvé depuis son décès, et nous décidâmes donc toutes deux d'entrer en communication avec son ancien mari.
Le hic est que ce dernier, qui se manifesta quasiment immédiatement, n'avait aucune envie que son ancienne épouse heureuse dans sa nouvelle de vie de femme, ne perde énergie, argent, et joie de vivre dans ce nouveau procès. Il voulait donc bien nous parler de tout sauf du fameux carnet.
S'ensuivit alors une joute verbale entre l'épouse qui le menaçait de représailles si il ne parlait pas (que pouvait-il vivre de pire que sa propre mort?) et le suicidé, campé sur ses positions qui refusait de dire où était caché le carnet.
Je dois dire que ce furent des instants très drôles, ubuesques, où chacun de nous trois fut même pris de fous rires.
Il finit par céder et révéla où était le carnet, bien dissimulé dans un lieu très atypique que lui seul était en mesure de me décrire. Elle s'écria: "Oui c'est là où étaient nos chevaux" Et elle se leva précipitamment, s'élançant à la recherche du carnet perdu. Nous laissant moi et son ancien mari un brin désappointés .
La sœur victime d'une agonie foudroyante
Ma consultante était en deuil . Sa sœur ancienne danseuse de l'Opéra de Paris était morte 3 jours après avoir été hospitalisée en urgence.
Ren ne laissait présager ce décès et les vraies explications de sa maladie ne furent jamais totalement trouvées. Mais le tourment de ma consultante était de savoir comment sa sœur avait vécu ces 3 derniers jours de vie et surtout si elle n'avait pas trop souffert.
Je dus donc intégrer le corps de sa sœur agonisante et à aucun moment ne ressentit de douleur: "je suis toute molle, je ne sens plus mon corps, je vois une butte engazonnée par la fenêtre avec une chapelle sur la droite"
Ma consultante se met à pleurer: "c'est exactement la vue que nous avions de sa chambre d'hôpital"
Je continue : "Maintenant je suis couchée, je vois le ciel au dessus de moi, j'avance sur le dos à travers une allée d'arbres avec des fleurs roses, j'entends comme un bruit de gravier en dessous de moi et la tante Odette qui trébuche et manque de tomber"
Je regarde ma consultante : "Peut-être suis-je dans la symbolique? Cette paix, ces arbres, moi couchée qui chemine..."
Elle me rétorque: "Non tu décris exactement le moment quand son corbillard est entré dans le cimetière, les arbres à fleurs roses sont dans l'allée centrale, et effectivement notre tante a été prise de vertiges à cet instant précis".
Je fus saisie de frissons, j'avais traversé le miroir, et n'étais plus seulement mourante, mais morte. J'interrompis rapidement la séance, car cette fois-ci "le voyage" risquait d'aller un peu trop loin.