Résumé :
Juillet 1789, il fait très chaud à Versailles, une chaleur étouffante qui vient du ciel et de Paris où gronde l’orage. Sidonie Laborde, lectrice de la Reine Marie-Antoinette, a le regard tourné vers sa souveraine et est immergée dans un château où le quotidien qui se répète paresseusement semble laisser la prison de la Bastille. Jusqu’au jour où le vent de la Révolte – non, de la Révolution – bouleverse les codes et les repères. Sidonie va vitre trois jours encore auprès de celle que bientôt le Royaume appellera « la Reine autrichienne ».Critique: Encore un film du côté des serviteurs et des larbins. Mais ces derniers portent un regard si juste sur les puissants qui n’ont que l’illusion de leur pouvoir. Un film sur les femmes dont le regard – avec ou sans couronne – va à l’essentiel. Aimer, donner, perdre… Benoît Jacquot là s’est emparé d’une « H »istoire emblématique aux résonnances troublantes en cette fin de règne pré élections. Et cette histoire – où la petite rejoint la grande et lui donne tout son sens – est servie par un trio d’actrices éclatantes. Diane Kruger est une Marie-Antoinette hésitante et pathétique, si loin de l’adolescente Ladurée d’une Sofia Coppola trop jet ici. Elle pleure le soir du 15 ou du 16 juillet, en brûlant les lettres de ses amants et en comptant ses bijoux. Il faudra attendre pour que la transformation du Temple opère. Quant à la Duchesse de Polignac, elle est incarnée par une Virginie Ledoyen encore là distante et froide que la caméra de Jacquot saisit avec une rare force. Consciente de sa grande valeur – pour la Reine qui la pleure et pour le peuple qui veut lui couper la tête – elle sait le prix du renoncement et celui de son salut. Léa Seydoux, enfin, est le fil rouge, intense, indispensable, de ce basculement irréversible d’un monde perdu. Elle coure à en perdre haleine dans les couloirs sans fin d’un château que l’on déserte, ce qui donne lieu à un magnifique plan séquence dont on reparlera.La lectrice – un personnage déjà mis en scène par Michel Deville – est ici comme un œil qui capte tout et qui sait que par le regard que l’autre porte sur vous l’on peut donner l’illusion de beaucoup de choses. Le regard posé par un gendarme sur Léa Seydoux, transfiguré en Polignac, dans un carrosse en fuite, ouvre la voie à la liberté de la favorite de la Reine.
Jacquot signe là sans doute son meilleur film.
Arthur A.