Expo matisse au musée pompidou

Publié le 01 avril 2012 par Abelcarballinho @FrancofoliesFLE

 

Matisse: Paires et Séries au Centre Pompidou





Après la période des peintres impressionnistes, la peinture libère la couleur, couleur vive, pure, directement posée sur le tableau, en aplats, généralement entourés de lignes (les contours sont importants chez lui ). C'est cet aspect qui passionne Matisse et qui fera de lui le premier des peintres " fauves " , ainsi nommées par leurs couleurs.

L’exposition rassemble une sélection exceptionnelle de chefs-d’oeuvre provenant de prestigieuses collections publiques ou privées du monde entier. En  confrontant les toiles-soeurs du peintre, le Centre Pompidou décrypte son processus créatif.

L’exploration répétitive d’un même sujet, les paires ou les séries, a permis à Matisse d’explorer la peinture elle-même : les variations de cadre, de dessin, de touche et de couleurs nous montrent combien Matisse fut un penseur profond de la forme.




Scénographie aérée

«Pour une étude préliminaire, j'utilise toujours une toile de même taille que celle destinée au tableau définitif, et je commence toujours par la couleur, confiait Henri Matisse à la journaliste américaine Clara MacChesney, en visite dans son atelier d'Issy-les-Moulineaux en juin 1912. Je ne retouche jamais une étude ; je prends une nouvelle toile de la même taille, comme il m'arrive de changer un peu la composition. Mais je m'efforce toujours de rendre le même sentiment tout en allant plus loin. Une toile devrait toujours, selon moi, être décorative. Quand je travaille, j'essaie de ne jamais penser, seulement de sentir.»

La parole de l'artiste allège la visite qui s'abstient d'une avalanche de textes explicatifs. La scénographie est aérée, la couleur dosée comme un indice. Il suffit de regarder. Les tableaux s'éclairent mutuellement. Ils se ressemblent parfois aussi peu que des frères comme ces trois Pont Saint-Michel à Paris, peints autour de 1900: ils semblent être de la main de trois peintres différents.

 


Quand Matisse peint au printemps 1914 son Intérieur, bocal de poissons rouges, le soleil irradie le quai Saint-Michel de sa lumière de fin d'après-midi (Centre Pompidou). Quand il y revient à l'automne 1914 via Poissons rouges et palette, la mobilisation a été décrétée le 1er août, dans une France en pleines moissons. Le noir a envahi la composition, l'homme ne s'y lit plus qu'à travers un code formel, la douceur des jours s'est évanouie, la nature morte mérite son nom. C'est l'une des gloires du MoMA de New York.



Un petit rien qui change presque tout. Là encore, la confrontation des deux huiles sur toile est une exploration en direct d'un esprit qui crée, contemple et invente encore. À l'été 1912, Matisse peint une nature morte dans son atelier d'Issy-les-Moulineaux. Une chaise en bois avec un coussin en tissu, un vase de capucines posé sur une sellette de sculpture. En arrière-plan, La Danse: la première version (1909), toute bleu azur, herbe émeraude et chair douce aux accents nacrés, enivre les visiteurs du MoMA; la seconde (1910), vigoureuse, tonique et fauve à la chair orangée, ceux de l'Ermitage à Saint-Pétersbourg. En reprenant ces Capucines à la danse  même composition et même format -, il se décale légèrement sur la droite, petit rien qui change presque tout. La chaise au premier plan devient une demi-abstraction, la sellette une peinture en 3D que met en relief l'utilisation inversée du rose et du vert. Les danseurs à la carnation intense sur ce bleu plus dense jaillissent du mur.

La vie en bleu - Il y a de l'éblouissement dans l'air lorsque s'achève cette promenade matissienne devant la série des Nu bleu I, II, III et IV, réalisée à l'hôtel Regina de Nice au printemps 1952. Grâce à cette exposition négociée au sommet dans le cercle fermé des plus grands musées du monde, voici une parentèle rarement réunie qui vaut toutes les leçons de peinture.
Le Nu bleu I, stylisé à l'extrême comme l'acrobatie d'une danseuse, vient de la Fondation Beyeler à Bâle. Les Nu bleu II et Nu bleu III ont la rondeur féminine des Tahitiennes aux gorges pleines, galbe souligné de vide par le seul jeu du ciseau. Elles sont des déesses modernes du Centre Pompidou depuis 1984 et 1982. Enfin, le Nu bleu IV ne mérite pas son numéro, car il est celui qui a donné naissance, par sa gestation complexe des volumes, à tous les autres.
Le Musée Matisse de Nice a prêté cette merveille qui démontre le travail pensé et soupesé de Matisse. Le peintre procède à un collage très étudié de papiers gouachés et découpés pour obtenir ses à-plats monochromes et le mouvement réduit à son essence. Les traits au fusain courent sur la feuille de papier (102,9 × 76,8 cm). L'élan spontané comme un jeu d'enfant qui anime les trois autres nus bleus est, en fait, la somme d'une recherche expérimentale rigoureuse.
Crédits photo : Lucien Lung pour Le Figaro/Succession H.Matisse


sources: Télérama  /  Le Figaro