Wilfred Thesiger : Le Désert des Déserts

Publié le 30 mars 2012 par Corboland78

Wilfred Thesiger (1910 - 2003) était un explorateur et un écrivain britannique. Il est surtout connu pour ses descriptions des peuples nomades africains et asiatiques.

Son ouvrage, Le Désert des Déserts est sous-titré « Avec les Bédouins, derniers nomades de l’Arabie du Sud ». Il s’agit du récit de ses deux expéditions pour cartographier le sud de l’Arabie entre 1945 et 1950. Des milliers de kilomètres parcourus à dos de chameaux, à travers les dunes et déserts de sable, accompagné de quelques Bédouins fidèles, partageant avec eux joies et souffrances quand la nourriture et l’eau venaient à manquer.

Seul un amoureux fou du désert pouvait se lancer dans une telle aventure et Wilfried Thesiger l’était assurément. Même si le lecteur ne se sent pas apte à dupliquer l’exploit, il peut en comprendre les motivations quand l’auteur écrit « Dans le désert, j’avais fait l’expérience d’une liberté impossible dans le monde civilisé, d’une vie allégée de tout bien personnel et appris qu’en fait ce qui n’est pas de première nécessité encombre. »

Si le voyage vous tente, vous saurez tout sur la vie des Bédouins et vous en apprendrez énormément sur les chameaux. L’origine du tam-tam arabe vous sera révélée, coutumes et us des tribus n’auront plus de secrets pour vous.

Mais Thesiger ne devra pas seulement faire avec les particularités des autochtones, il devra aussi déployer des talents de fin politique et des ruses dignes de Sioux, pour passer outre (d’eau fraîche !) les interdictions de circuler dans certaines zones ou slalomer entre les tribus rebelles pour parvenir à ses fins. Bien entendu on songe à Lawrence, mais c’est un compliment.

Un texte très moderne aussi car Thesiger qui ne voyage qu’à dos de chameau, devine déjà les conséquences induites par les forages pétroliers, de l’arrivée proche de voitures et avions dans la région sur le mode de vie des nomades : « des forces économiques échappant totalement à leur contrôle, finiraient par les condamner à vivre dans les villes où, « main-d’œuvre non spécialisée », ils rôderaient sans espoir le long des rues ». 

Un très beau texte écrit par un Européen de nationalité, mais Bédouin de cœur, ayant vécu au plus près de ces hommes, en parfaite harmonie avec la nature, même quand elle se montrait hostile de prime abord.    

« Nous étions quatre à avancer depuis un mois avec des ressources très modestes - peu d'eau et encore moins de nourriture. L'un de nous a eu la chance de tuer un lièvre. Nous discutâmes longtemps de la manière dont il fallait l'accommoder. Finalement, nous avons trouvé un puits et nous l'avons préparé. Ce fut long et mon impatience allait croissant. Soudain, au moment de s'attaquer au lièvre, nous avons vu surgir quatre Bédouins. Nous les avons accueillis, nous leur avons offert du café et des dattes. Et comme ils n'avaient pas mangé de viande depuis plusieurs mois, le lièvre leur fut donné. Nous n'en avons pas mangé un seul morceau. Pour mes compagnons, c'était normal puisque les nouveaux arrivants étaient nos hôtes. »


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