C'est grâce à une hallucination due à la fière que, dans le début D'un Château l'autre, reviennent à Céline les souvenirs de Siegmaringen. Comme s'il fallait un état tout à fait exceptionnel pour faire revivre un moment si exceptionnel.
La mise en scène est habile. Céline se décrit sur son lit, en train de se tourner et de se retourner, et les scènes arrivent l'une après l'autre, font partie de ce délire, ont un côté hallucinatoire. Tout est vrai, sans doute, mais la fièvre donne une portée outrancière aux événements.
La description des toilettes, par exemple: Ferdinand et Lili ont une chambre à l'hôtel Löwen, en face des wc. Un peuple immense en proie à la diarrhée (mauvaise alimentation) et gorgé de bière vient s'y soulager, ça forme des ruisseaux énormes qui suivent le corridor et envahissent la chambre du docteur.
Autres scènes insensée : les descriptions de la gare surpeuplée, la promenade de Pétain et de ses ministres, à la queue-leu-leu selon la hiérarchie, et le demi-tour impeccable après qu'un fou qui s'est proclamé amiral les arrête devant le Danube pour éviter les sous-marins ennemis...
A ces scènes à la Bosch s'opposent les lieux. Une petite ville de conte de fée, son château jadis habité par les Hohenzollern, les bois autour. Et au-dessus, la RAF et les déluges de feu!